Les analystes de marché parient sur la sortie de la Grèce de la zone euro

Par latribune.fr  |   |  733  mots
"Qu'est-ce qui coûte le plus cher? Le Grexit ou le maintien de la Grèce dans zone euro? telle est la question à laquelle l'Europe doit répondre", explique Ciaran O'Hagan.
La majorité des stratégistes estiment que la situation financière grecque et la victoire du non au référendum ne permettent plus d'envisager le maintien de la Grèce dans la zone euro. Ils attendent du sommet européen prévu mardi soir, des décisions "courageuses"...

La sortie de la Grèce de la zone euro est devenue lundi le scénario central d'un certain nombre de grands intermédiaires financiers, au lendemain du "non" massif des électeurs grecs au compromis proposé par les créanciers d'Athènes (FMI, BCE et UE) pour régler le problème de sa dette.

Désormais, les acteurs des marchés financiers ont les yeux rivés sur les dirigeants européens dont ils attendent des décisions "courageuses".

"La principal question qui se pose aujourd'hui c'est de savoir si les autorités de la zone euro auront le courage de demander à la BCE de couper l'ELA (Assistance de liquidité d'urgence)", écrit Ciaran O'Hagan, responsable de la stratégie taux en zone euro à la Société générale.

La réponse à cette question, s'il devait y en avoir une, devra attendre mardi soir la fin du Sommet de la zone euro, qui aura été précédé dans la matinée d'une réunion des ministres de l'Economie de la zone.

Le rôle du couple franco-allemand

Le couple franco-allemand, considéré comme le pilier de la construction européenne, se réunira lundi soir à l'Elysée où Angela Merkel et François Hollande tenteront de définir les moyens de renforcer la zone euro en cette période de déstabilisation.

"Qu'est-ce qui coûte le plus cher? Le Grexit ou le maintien de la Grèce dans zone euro? telle est la question à laquelle l'Europe doit répondre", explique Ciaran O'Hagan.

"Jusqu'à présent, la France et l'Allemagne ont réussi à maintenir une forme de coordination et à donner l'impression d'unité. Nous serons particulièrement attentifs à ce qu'ils maintiennent un tel cap : toute désunion serait extrêmement déstabilisatrice, et ses effets dépasseraient la question grecque et soulèveraient des questions existentielles pour la zone euro", ajoute-t-il.

Le Grexit, scénario favori des analystes

Pour Michael Michaelides, analyste taux chez RBS à Londres, le "non" ouvre la "porte du Grexit", et porte cette probabilité à 55% contre 40% avant le référendum de dimanche.

"Le vote de dimanche accroît les risque de voir la Grèce être le premier pays à sortir de l'Union économique et monétaire (UEM)", estime également Mark Haefele, responsable mondial de l'investissement chez UBS Wealth Management. Et, comme les autres experts, il estime qu'Athènes ne sera pas en mesure d'honorer une échéance de 4,2 milliards d'euros due le 20 juillet à la BCE.

"Nous jugeons hautement improbable que l'Eurogroupe infléchisse sa position dans le sens voulu par la Grèce en vue de la mise en place d'un troisième plan d'aide", indique Michael Michaelides.

Selon lui, en l'absence d'un accord qui conduirait au Grexit, les dirigeants politiques européens n'ont pas besoin d'"expulser la Grèce". Faute d'accord avec ses créanciers, la Grèce ne pourra pas rembourser à l'Eurosystème (SEBC) la moindre obligation souveraine grecque que celui-ci détiendrait le 20 juillet.

Une monnaie parallèle

Le conseil des gouverneurs de la BCE serait alors amené à réduire le plafond de l'ELA accordée à la Grèce, et les banques grecques deviendraient "insolvables", ce qui impliquerait une restructuration des banques et/ou à des pertes des déposants, et la nécessité d'une monnaie parallèle pour recapitaliser les établissements financiers, ce qui conduirait finalement au Grexit, explique RBS.

Les stratégistes de SG, de RBS, d'UBS ou de Cholet Dupont Finance et Patrimoine estiment que, contrairement à ce qui s'était passé lors de la première crise de la dette souveraine en zone euro en 2010-2011, l'UE et la BCE disposent aujourd'hui d'instruments efficaces contre la "contagion" : Mécanisme européen de stabilité (MES), Fonds européen de stabilité financière (FESF), intervention directe sur les marchés en faveur de pays qui en font la demande (OMT).

De nouveaux outils pour gérer la crise?

Mark Haefele (UBS) souligne qu'outre cette boîte à outils, la Banque centrale européenne dispose aussi de son programme d'assouplissement quantitatif (60 milliards d'euros d'achats d'obligations par mois). Il ajoute que la BCE peut compter aussi sur l'aide de la Fed pour contrer toute montée de l'aversion au risque au niveau mondial en différant sa première hausse des taux en 10 ans, à après septembre, voire au début 2016, si les craintes entourant la Grèce devaient provoquer une forte montée du dollar.

(Avec Reuters)