Royaume-Uni : la croissance résiste mieux que prévu au Brexit

Par Romaric Godin  |   |  781  mots
L'économie britannique a connu une croissance de 0,5 % de son économie au troisième trimestre.
Le PIB britannique a progressé de 0,5 % au troisième trimestre, alors que les prévisions du Trésor avant le référendum sur l'UE prévoyaient une contraction. L'effet Brexit a été assez faible cet été.

Le Brexit n'a pas conduit le Royaume-Uni à la récession. Pas encore, du moins. Ce jeudi 27 octobre, l'Office National des Statistiques (ONS) britannique a indiqué qu'entre juillet et septembre, autrement dit, sur le premier trimestre qui a suivi le vote en faveur de la sortie de l'UE le 23 juin, l'économie britannique a connu une croissance de 0,5 %. Le rythme est certes moins rapide qu'au trimestre précédent (0,7 %), mais il demeure néanmoins soutenu. Depuis le début de 2015, la croissance britannique trimestrielle n'a été que deux fois plus rapide.

Les services en croissance solide

Comme le souligne l'ONS, « le cadre de la croissance s'est montré largement non affecté par les suites du référendum sur l'appartenance à l'UE ».  La croissance de ce troisième trimestre a été principalement tirée par le secteur des services, le seul qui ait, du reste, apporté une contribution positive à la croissance (0,64 point de pourcentage pour une croissance de 0,8 %). Selon l'ONS, c'est le sous-secteur du « transport, stockage et communication » qui a réalisé la meilleure performance avec une croissance de 2,2 % sur le trimestre. Une croissance qui est la plus rapide depuis le quatrième trimestre 2009 et qui s'appuie sur le secteur de la communication (production de films et séries ou de musique). Pour autant, l'ONS signale une croissance soutenue dans les domaines de l'hôtellerie-restauration (+ 1,1 %), mais aussi des services aux entreprises et de la finance (+ 0,5 %). Le Brexit n'a donc pas causé l'effondrement immédiat de la City.

L'industrie et la construction reculent

Les autres secteurs ont cependant contribué négativement à la croissance britannique. Les valeurs ajoutées dans l'industrie, l'agriculture et la construction se sont contractées respectivement de 0,7 %, 0,4 % et 1,4 %. Faut-il voir dans ces baisses un premier « effet Brexit » ? Peut-être dans la construction dont le recul est très marqué. C'est la plus forte chute depuis le premier trimestre 2012 et ce pourrait être la conséquence de la chute de la livre et d'une tendance des investisseurs internationaux, qui sont clés pour le marché immobilier outre-Manche, à se détourner du Royaume-Uni. Mais la construction avait déjà commencé à décliner au trimestre précédent (-0,1 %) et ce secteur ne pèse que 5,9 % du PIB britannique (même s'il influe ensuite également indirectement sur le secteur des services). Au final, la construction a ôté 0,1 point de croissance au PIB national.

Concernant l'industrie, le recul de 0,4 % est d'abord causé par un recul de la production manufacturière (sans les secteurs énergétiques et miniers) qui atteint 1 % sur la période. Mais au trimestre précédent, la hausse de la production manufacturière avait atteint 1,6 %, un rythme jamais égalé depuis deux ans. Il y a eu une sorte de consolidation.

Effet Brexit réduit pour l'instant

La croissance britannique semble donc globalement résistante à l'effet Brexit. Mais il convient de rappeler que, au cours de ce trimestre, l'effet Brexit a été assez diffus : il s'est principalement concrétisé par la baisse de la livre estimée à 14,4 % face à la moyenne pondérée des autres monnaies par l'ONS. Cette baisse a joué sur le secteur de la construction et sur les prix à la production (+7,8 % en août sur un an, +7,2 % en septembre). Cet effet a peut-être été rude pour certaines entreprises britanniques, surtout celles qui n'exportent pas. Pour celles qui exportent, les prix à l'exportation, en hausse de 10,2 % en septembre, ont compensé ce renchérissement, peut-être cependant au prix de parts de marché.

Effet Brexit surestimé avant le référendum

L'effet reste cependant réduit. Dans sa prévision publiée avant le référendum, le Trésor britannique prévoyait en effet un recul de 0,1 % du PIB trimestriel entre juillet et septembre. Cette vision négative - qui n'a guère influencée les électeurs - semble avoir été bien trop pessimiste. La force de résistance du secteur des services a été sous-estimée avant le vote. Désormais, la vision dominante est d'affirmer que les effets négatifs du Brexit se concrétiseront plus tard, notamment pendant les négociations de sortie de l'UE et après la réalisation de cette sortie. La perspective d'un « hard Brexit » où le Royaume-Uni se retrouverait exclu du marché unique européen et où la finance britannique perdrait tout accès à ce marché pourrait certes conduire à une correction économique. Mais il semble néanmoins que l'économie britannique dispose d'une capacité de résistance. Du reste, ce temps permettra de conduire une réponse politique, notamment en termes d'investissement public, ce que le gouvernement de Theresa May semble déterminé à construire. Le pire n'est donc jamais certain, même si l'ombre d'une récession britannique n'est pas encore totalement dissipée.