Pour l’assureur Swiss Life, les contrats "euro-croissance" sont mort-nés

Par Mathias Thépot  |   |  571  mots
S’ils louent l’initiative intellectuelle de créer des contrats d’assurance-vie "euro-croissance", les dirigeants de l’assureur Swiss Life sont très sceptiques sur le succès du nouveau dispositif auprès des clients.

Prévu dans le cadre de la loi de finance 2014, le contrat d'assurance vie "euro-croissance" fait déjà l'unanimité dans son principe dans le monde de l'assurance. Le lobby de la profession, la Fédération française des sociétés d'assurances (FFSA), s'est même publiquement réjoui de la création de ce contrat proposé dans le rapport des députés PS Karine Berger et Dominique Lefebvre. Il devrait en effet avoir la sécurité d'un fonds en euros et le rendement plus attractif des supports en unités de compte (UC), dans lesquels les sommes versées sont placées dans un portefeuille qui se compose en majorité d'actions, mais qui peuvent, en cas de marchés baissiers, afficher un rendement négatif. L'"euro-croissance" a en fait été "élaboré sur le principe des contrats "euro diversifiés" existant et reposant sur une allocation d'actifs combinant mieux au profit de l'économie le risque et la sécurité", indique le rapport Berger-Lefebvre.

Les assureurs cherchent à introduire davantage d'unités de compte dans leurs contrats

Ce nouveau contrat émerge dans un contexte où les assureurs cherchent à introduire le plus possible d'unités de compte dans leurs contrats d'assurance-vie. Le niveau général des taux d'intérêt est en effet historiquement bas, ce qui rend les contrats en euros peu rentables. L'assureur Swiss Life France fait partie de ceux là. Axé sur une clientèle haut de gamme qui a pour avantage d'être "plus stable", selon son PDG Charles Relecom, l'assureur a introduit 36% d'UC dans ses contrats d'assurance-vie, et en intègre même 50% en moyenne dans ses nouveaux contrats.

"Les clients ne voudront pas" de l'"euro-croissance"

Le lancement du contrat "euro-croissance" va donc dans le sens de la politique commerciale du groupe. Seulement voilà, l'un des directeurs généraux de l'assureur Eric Le Baron le certifie, "les clients n'en voudront pas", au même titre que les contrats "euro-diversifiés".
L'"euro-croissance" voit en effet ses fonds bloqués pendant plusieurs années dans des entreprises et surtout le capital garanti au terme des huit ans seulement. L'épargne ne serait donc pas garantie en cours de vie comme c'est le cas pour un contrat ou un fonds en euros. Pour Eric le Baron, fin connaisseur du comportement des souscripteurs de contrats d'assurance-vie, l'épargnant moyen souhaite avant tout "investir ses économies à long terme et pouvoir les récupérer rapidement à court terme en cas de coup dur".

Une contrainte fiscale pour les encours supérieurs à 500.000 euros

Le contrat "euro-croissance" pourrait in fine trouver son salut chez les souscripteurs les plus aisés, moins concernés par les pépins de la vie. Mais ils seront contraints fiscalement, ce qui exaspère les assureurs : pour les encours de contrats de plus de 500 000 euros, l'avantage fiscal inhérent à tous les contrats d'assurance vie sera à l'avenir réservé "aux contrats en unités de compte et aux contrats "Euro-Croissance"", indique le rapport Berger. Pour Charles Relecom, il serait désastreux d'instaurer "une assurance-vie à deux vitesses" entre les souscripteurs les plus aisés et les autres. "Créer un support "euro-croissance" pourrait être une bonne chose, mais si cela doit s'inscrire dans un dispositif compliqué, où il faut distinguer les contrats des épargnants selon leur montant, cela les découragera", avertissait pour sa part le président de la FFSA Bernard Spitz, en avril dernier.