DIRECT BNP "Le président ne se mêle pas des affaires de justice" (Obama)

Par latribune.fr  |   |  1270  mots
"Nous sommes dans des négociations, c'est vrai, nous avons de bons rapports avec les Etats-Unis et nous souhaitons les garder", a déclaré François Hollande qui s'entretiendra de cette question avec Barack Obama jeudi soir à Paris lors d'un dîner de travail. (Photo : Reuters)
BNP Paribas est menacée d'une amende record aux Etats-Unis. Son sort fait l'objet d'une intervention de la part de l'exécutif. Voici les dernières annonces et les principaux commentaires relatifs à ce dossier.

Ce 5 juin sera-t-il jour le plus long pour BNP Paribas ? La menace d'amende record qui plane sur elle fait l'objet de prises de positions publiques de la part des dirigeants français. Jusqu'à s'imposer dans les discussions franco-américaines, lors du dîner prévu avec Barack Obama ce jeudi.  Voici les dernières annonces et commentaires sur ce sujet. 

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    Obama n'interviendra pas

Le président américain Barack Obama ne veut pas intervenir dans l'affaire BNP Paribas, a-t-il déclaré jeudi à Bruxelles, au terme d'une réunion du G7.  En réponse à une question sur les sanctions que la justice américaine pourrait infliger à la banque française, il a ainsi répondu :

"La tradition aux Etats-Unis est que le président ne se mêle pas des affaires de justice."

Mercredi, son homologue français François Hollande a qualifié de "totalement disproportionnées" ces mêmes sanctions. 

  • Sapin estime qu'"il ne faudrait pas que la confiance soit rompue"

Le ministre des Finances a déclaré dans une interview au Monde "totalement respecter l'indépendance de la justice [américaine]. Mais nous sommes aussi des partenaires de confiance et il ne faudrait pas que cette confiance soit rompue". Et d'ajouter :

"Cela pourrait affecter les discussions en cours sur le traité de libre-échange. C'est une question suivie de près par le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius."

Michel Sapin confirme par ailleurs dans le quotidien du soir que BNP Paribas "a pris des décisions lourdes, en interne, pour adapter ses procédures". Précisant :

"Un certain nombre de collaborateurs, qui avaient participé aux transactions concernées, ont été remerciés dans des conditions nettes et claires."

  • Des "actes répréhensibles" mais qui réclame l'équité

Plus tôt dans la journée, le ministre français des Finances a admis que BNP Paribas avait "certainement, du point de vue de la justice américaine et du point de vue des lois américaines, commis des actes répréhensibles". Il a toutefois insisté sur la nécessité que les éventuelles sanctions n'hypothèquent pas l'avenir du deuxième groupe bancaire de la zone euro:

"Il est normal que ces actes répréhensibles fassent l'objet d'une condamnation. Nous voulons que ce soit dans un cadre équitable. Payer pour le passé, ça paraît légitime. Payer pour l'avenir, ce serait illégitime", a-t-il ajouté.

"Si le cumul des diverses amendes était démesuré, ce serait un traitement inéquitable", a-t-il dit. "Il y a d'autres aspects en particulier, qui touchent à la capacité d'une banque d'agir sur un territoire ou d'agir dans une monnaie qui, s'ils étaient démesurés, seraient inéquitables."

  • Prot poussé vers la sortie?

Des membres de la direction de la banque souhaiteraient le départ de son président, Baudouin Prot, selon le Wall Street Journal. Un tel geste constituerait, d'après les sources du quotidien financier, un geste d'apaisement à l'égard des autorités américaines. 

Les frictions porteraient en outre sur les accusations portées contre l'établissement avec cette question toujours en suspens: les activités qui lui sont reprochées étaient-elles ou non légitimes? 

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La veille, mercredi, les annonces se sont succédées. En voici un bref résumé ainsi que les derniers rebondissements concernant l'enquête pour un éventuel contournement par la banque de l'embargo américain qui risque de lui coûter jusqu'à 10 milliards de dollars.

  • Hollande: "Nous attendons la réciprocité et le respect"

François Hollande a estimé mercredi que des sanctions disproportionnées de la justice américaine contre la banque française BNP Paribas pourraient avoir des conséquences sur les relations entre la France et les Etats-Unis:

"Je suis également informé de ce qu'est la justice américaine, je la respecte, elle est indépendante, mais en même temps nous avons des relations entre les Etats-Unis et la France, un partenariat, et rien ne doit pouvoir le compromettre"

"Nous sommes aussi engagés dans d'autres discussions et nous attendons la réciprocité et le respect", a déclaré le président français en marge du sommet du G7 à Bruxelles, interrogé sur un possible impact des déboires de la banque française sur la négociation du traité de libre-échange entre l'Union européenne et les Etats-Unis.

"Nous sommes dans des négociations, c'est vrai, nous avons de bons rapports avec les Etats-Unis et nous souhaitons les garder", a ajouté le président. 

  • Kerry : "c'est quelque chose sur lequel nous pouvons travailler"

John Kerry, le chef de la diplomatie américaine, s'est exprimé sur le dossier depuis Beyrouth où il se trouve en déplacement. Il a déclaré à des journalistes: 

"C'est un sujet qui relève de notre système judiciaire pour le Trésor et le ministère de la Justice (...) Nous voulons évidemment, quoi qu'il en soit, que cela soit juste et que cela reflète quelque chose d'adéquat par rapport à ce qui a pu se passer (...) Je suis confiant, c'est quelque chose sur lequel nous pouvons travailler et que nous pouvons régler". 

  • Une note placée sous surveillance négative

La note de crédit à long terme (A+) de BNP Paribas a été placée quelques heures plus tôt sous surveillance "négative" par l'agence de notation Standard & Poor's. Une conséquence directe du risque de condamnation encouru par la banque.

  • Le sujet au menu des discussions entre Obama et Hollande jeudi

En marge d'une visite à Varsovie, le président français confirme qu'il évoquera le cas de BNP Paribas jeudi lors de sa rencontre avec son homologue américain. Ce dernier sera en France pour célébrer avec les 70 ans du débarquement allié en Normandie. 

"Je ne sais pas si lui veut en parler, mais je lui en parlerai", a affirmé le président français en marge de la visite d'un musée. 

  • L'Elysée confirme l'envoi d'une lettre à Barack Obama

Le 7 avril, François Hollande a écrit à Barack Obama a propos de ce dossier. Le président français s'inquiète auprès du président américain du "caractère disproportionné" des sanctions envisagées aux Etats-Unis à l'encontre de la banque française.

  • Réactions dans l'opposition

La lettre et le risque de sanction ont suscité de nouveaux commentaires dans l'opposition. 

L'ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin (UMP) a ainsi déclaré devant les parlementaires:

"Je pense que la sévérité [américaine] a des apparences particulièrement excessives (...) Je ne suis pas sûr qu'aux Etats-Unis, faire monter un dossier au niveau politique soit la bonne solution."

Un autre ancien chef du gouvernement, Dominique de Villepin, qui s'était illustré en 2003 lorsqu'il était ministre des Affaires étrangères en s'opposant frontalement à Washington au sujet de la guerre en Irak s'est lui aussi exprimé. Il a affirmé lors de l'émission  "Questions d'info" LCP-Le Monde-France Info-AFP: 

"Les entreprises européennes respectent les règles européennes d'embargo, elles n'ont pas à subir le joug des Américains dans ce domaine. Les Américains fixent leurs règles, nous fixons nos règles"

Jean-Christophe Fromantin, député des Hauts-de-Seine (UDI) écrit quant à lui dans un communiqué: 

"Nous ne pouvons pas imaginer que le commerce mondial soit entre les mains d'un pays qui, par ses propres décisions politiques et par l'influence de sa monnaie, pourrait décider de la légalité de la quasi-totalité des transactions commerciales (...) Cette affaire montre l'urgence et l'enjeu d'une plus grande ambition pour l'euro"

(article créé le 04/06/2014 à 16:20, dernière mise à jour le 05/06/2014 à 16:18)