Taxe Tobin, union bancaire : Michel Sapin redit son "amitié pour la bonne finance"

Par Christine Lejoux  |   |  731  mots
Michel Sapin veut "créer les conditions d'un financement performant, pour accélérer la reprise de l'économie.". REUTERS.
Le ministre des Finances "n’acceptera pas d’accords déséquilibrés au détriment" de la France, dans le cadre des projets de taxe sur les transactions financières et d’union bancaire européenne.

Quand on tient un bon mot, grande est l'envie d'en user et d'en abuser. Trois jours après avoir décrété que "notre amie, c'est la finance, la bonne finance"- alors que François Hollande en avait fait son "adversaire" lors de sa campagne présidentielle -, Michel Sapin a redit mercredi son "amitié pour la bonne finance", lors des rencontres internationales organisées par Paris Europlace, l'association chargée de promouvoir la place financière de Paris. Cette "bonne finance", Michel Sapin - qui reconnaît la nécessité de disposer "d'un financement performant" pour "accélérer la reprise de l'économie" - a tenté de la rassurer sur trois sujets.

A commencer par le projet de taxe sur les transactions financières (TTF), ou "taxe Tobin." Après l'accord conclu début mai entre onze pays européens - dont la France, l'Allemagne et l'Italie, mais pas le Royaume-Uni -, la TTF doit voir le jour le 1er janvier 2016 au plus tard. Elle concernera dans un premier temps les actions et quelques produits dérivés, mais ni son assiette ni son ampleur ne sont encore déterminées. Un peu plus tôt dans la matinée, François Pérol, président du directoire de BPCE (Banque Populaire Caisse d'Epargne) et futur patron de la Fédération bancaire française (FBF), avait souligné combien "la mise en place de la TTF serait préjudiciable aux économies des pays concernés."

Les banques et les entreprises vent debout contre la TTF

Gérard Mestrallet, PDG de GDF Suez et président de Paris Europlace, parle même de "véritable menace" si la TTF s'appliquait aux produits dérivés. Car cela générerait sans doute une délocalisation massive des transactions sur les produits dérivés de Paris, Francfort ou encore Milan vers Londres, renchérissant ainsi les coûts de financement des entreprises françaises, allemandes ou italiennes. Et ce, alors même que les entreprises européennes devront de plus en plus recourir aux marchés pour se financer, dans les prochaines années, compte tenu des contraintes réglementaires qui pèsent désormais sur les banques.

De fait, pas plus tard que le 3 juillet, plusieurs organisations patronales françaises et allemandes - dont le Medef - ont demandé aux Etats-membres de renoncer à la TTF, dénonçant son "impact très négatif sur le financement des entreprises." "Le gouvernement a une approche ambitieuse de la TTF, sur le fond, mais pragmatique sur le plan de sa mise en forme. Ainsi, je n'accepterai pas un projet déséquilibré au seul détriment de la place financière de Paris", a simplement promis Michel Sapin.

L'Europe divisée sur le financement du fonds de résolution unique

Qui, au sujet de l'union bancaire européenne, "n'acceptera pas » non plus « un accord déséquilibré qui pénaliserait le secteur bancaire français." Selon le journal Les Echos du 9 juillet, l'Europe, malgré l'accord sur l'union bancaire trouvé en mars, serait en effet divisée sur la question de l'abondement du fonds de résolution unique, destiné à financer le sauvetage ou la liquidation de banques en difficulté. Un bloc emmené par l'Allemagne souhaiterait que ce fonds, qui doit être doté de 55 milliards d'euros en huit ans, soit financé essentiellement par les grandes banques. Une solution qui avantagerait le système bancaire allemand, composé de très nombreuses petites banques, et qui, à l'inverse, pénaliserait la France, dont le secteur bancaire est très concentré.

Le ministre des Finances a enchaîné sur ce qui, à ses yeux, constitue un autre "sujet de préoccupation" pour la finance européenne, à savoir la prééminence du dollar dans les transactions internationales. Une prédominance qui "entraîne de toute évidence un certain nombre de conséquences, dont l'extraterritorialité des normes américaines", a précisé Michel Sapin, faisant allusion à la sanction record récemment infligée par les Etats-Unis à BNP Paribas, accusée d'avoir réalisé des transactions en dollar dans des pays sous embargo américain. "Dans ce contexte, je suis convaincu que la zone euro doit se réinterroger sur le rôle que nous assignons à notre devise commune, et se mobiliser pour faire progresser l'usage de l'euro comme monnaie d'échange internationale", a déclaré le ministre des Finances.