Warren Buffett roulé dans la farine par son potentiel successeur ?

Par Jérôme Marin, à New York  |   |  389  mots
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Berkshire Hathaway a annoncé mercredi soir la démission de David Sokol. Il avait récemment acheté des actions de Lubrizol... avant de convaincre le milliardaire d'acquérir ce producteur de lubrifiants.

Warren Buffett a-t-il été abusé par l'un de ses bras droits ? C'est la question que l'on peut se poser ce mercredi soir après l'annonce de la démission de David Sokol. Considéré par de nombreux observateurs comme l'un des favoris à la succession du milliardaire au poste de PDG de Berkshire Hathaway, il avait récemment été le principal artisan du rachat de Lubrizol pour 9 milliards de dollars. Problème: quelques jours avant de proposer cette opération à son mentor, David Sokol avait acheté près de 100.000 actions de ce producteur de lubrifiants.

"Dave m'a présenté l'idée de racheter Lubrizol le 14 ou 15 janvier, raconte le sage d'Omaha dans un communiqué qu'il qualifie lui-même d'inhabituel. Au départ, je n'étais pas convaincu, mais j'ai changé d'avis après qu'il m'a rapporté une discussion avec son PDG, James Hambrick. Bien que la décision de mener à bien cette acquisition a entièrement été la mienne, avec l'appui du conseil d'administration de Berkshire le 13 mars, cela ne serait jamais intervenu sans les premiers efforts de Dave".

Une semaine avant d'évoquer cette possible acquisition avec Warren Buffett, David Sokol a acheté 96.060 actions Lubrizol, soit 9,9 millions de dollars au cours de clôture du 7 janvier. Depuis l'annonce du rachat, accompagné d'une prime substantielle destinée à convaincre les actionnaires, le titre a progressé de plus de 30%. Si bien que cet investissement représente aujourd'hui 12,9 millions de dollars. Un gain potentiel de 3 millions de dollars.

Warren Buffett ne considère pas cette opération - dont il n'a appris l'existence que le 19 mars, 5 jours après l'officialisation du rachat de Lubrizol - comme illégale. Mais "ce n'est pas de cette façon que l'on réalise des acquisitions, et encore moins chez Berkshire", estime Jeff Matthews, auteur du livre "Pèlerinage à Omaha", la ville de naissance du milliardaire dans laquelle il tient chaque année la très courue réunion annuelle de sa holding financière.

Officiellement, Warren Buffett n'a pas réclamé la démission de David Sokol. "La lettre de Dave a été une surprise totale, malgré deux précédents, poursuit-il dans son communiqué. Je lui avais parlé la veille et n'avais perçu aucun indice sur ses intentions. Cette fois, toutefois, je n'ai pas essayé de le retenir et j'ai accepté sa démission".