Henri de Castries : l'assurance ne crée pas un risque systémique

Par Séverine Sollier  |   |  596  mots
Henri de Castries, président directeur général d'Axa.
Le patron du groupe Axa défend la spécificité des activités d'assurance par rapport à la banque, alors que l'association regroupant 140 régulateurs nationaux vient d'annoncer la publication d'une liste d'assureurs systémiques.

Le recensement des assureurs systémiques fait bondir Henri de Castries, Pdg d'Axa.   "Ce n'est pas parce que les acteurs sont gros qu'ils sont systémiques", s'est-il exclamé  à l'occasion d'une conférence devant des journalistes européens le 30 mai. Alors que l'Association internationale des contrôleurs d'assurance (IAIS) annonçait au même moment qu'elle publierait, au second semestre 2013, une liste des assureurs d'importance systémique, c'est-à-dire ceux dont la faillite pourrait avoir de graves conséquences pour l'économie, le patron du groupe français s'est appliqué à démontrer pourquoi les compagnies d'assurance ne sont pas systémiques.

Le "bank run" existe mais pas "l'insurance run"

Pour ce dirigeant de l'un des principaux groupes d'assurance en Europe, être systémique suppose trois conditions : un risque de faillite soudaine, un risque de contagion et un risque de non substitution de l'entreprise. "Y-a-til un risque de faillite immédiate dans l'assurance ? Non. Un assureur peut disparaître, mais une fermeture pour retraits massifs n'existe pas", a-t-il affirmé faisant référence au risque de "bank run" rencontré par certaines banques durant la crise de 2008 par opposition aux assureurs qui ne sont pas exposés au même risque de manque de liquidités. "Les assureurs n'ont pas de risque de liquidité", a-t-il martelé.

"Y-a-til un risque de contagion dans l'assurance?", s'est ensuite interrogé Henri de Castries avant de répondre "non, même pas à travers la réassurance". Pour le Pdg d'Axa, la faillite d'un assureur ne menace pas l'assureur voisin et d'autant moins si ces activités sont bien divisersifiées. Quant au risque d'être non remplaçable, il lui semble inexistant dans la mesure où il est toujours possible à un client de s'assurer auprès d'une autre compagnie.

Le spectre d'AIG plane

Bref, "l'assurance, elle même ne crée pas un risque systémique", a -t-il conclu avant d'ajouter qu'en considérant les assureurs comme systémiques, "les régulateurs veulent surtout s'assurer que les compagnies n'ont pas d'activités parallèles", qui, elles, pourraient éventuellement être systémiques. Ce fut par exemple le cas d'AIG aux Etats-Unis victime en 2008 de des déboires de sa filiale spécialisés dans les produits financiers dérivés, qui a nécessité un sauvetage de l'Etat. "Prévoir des fonds propres additionnels n'est pas la solution", estime Henri de Castries, contrairement à la diversification des activités qui  selon lui est efficace pour réduire le risque. "La diversification permet de lutter contre le risque systémique", indique-t-il.

Les assureurs ne sont pas des banques et pourtant...

Pourtant, l'IAIS, qui regroupe les régulateurs de 140 pays et plus de 120 assureurs, a établi en coordination avec le Conseil de stabilité financière (FSB), chargé de réguler le secteur bancaire, 18 critères et cinq catégories pour identifier des assureurs systémiques. Ces critères sont la taille, l'activité internationale, l'interconnection, les activités hors du secteur traditionnel de l'assurance et la viabilité des établissements.

Selon la définition du régulateur, les assureurs systémiques sont des "institutions d'une taille, d'une importance sur le marché et d'une interconnection mondiale telle que leur mise en difficulté ou faillite pourrait sérieusement ébranler le système financier mondial". Le FSB, qui a notamment créé les nouvelles normes bancaires de Bâle III, avait annoncé en janvier que les régulateurs voulaient renforcer l'encadrement des grandes banques nationales et des assureurs, après avoir décidé d'améliorer la surveillance de 29 banques internationales dites d'importance systémique. C'est donc au tour des assureurs d'être visés.