Liborgate : Société Générale et Crédit Agricole seraient visées par les enquêteurs

Par Julien Bonnet  |   |  696  mots
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Dans l'affaire de manipulation des taux interbancaires Libor et Euribor, les enquêteurs s'intéresseraient actuellement aux liens entre un trader de Barclays et les collaborateurs de quatre autres banques européennes HSBC, Deutsche Bank, Crédit Agricole et Société Générale, révèle le quotidien britannique Financial Times. Pour le moment, seule Barclays a écopé d'une amende dans ce scandale qui continue de secouer la planète finance.

Les régulateurs bancaires se penchent sur les liens entre les traders de Barclays, à l'origine du scandale de manipulation des taux interbancaires Libor et Euribor, et ceux de quatre autres banques européennes, dont deux françaises, affirme le Financial Times dans un article publié mercredi. Les établissements cités par le quotidien sont HSBC, Deutsche Bank, Crédit Agricole et Société Générale.

Une vingtaine d'enquête ouvertes

Pour le moment, seule Barclays a fait les frais de cette affaire en écopant d'une amende de la part des autorités américaines et britannique. D'un montant certes record de 290 millions de livres (362 millions d'euros), l'établissement a bénéficié d'un "rabais" sur cette sanction grâce à sa participation à l'enquête. Mais trois de ces principaux dirigeants, dont le directeur général Bob Diamond et le président Marc Agius, ont été contraint d'annoncer leur démission. Le Libor et l'Euribor sont des taux de référence du marché interbancaire. Ils sont essentiels car ils permettent de déterminer le prix de 350.000 milliards de dollars de produits financiers. Ces taux étant fixés après agrégation des données fournies par différentes banques (16 pour le Libor, 44 pour l'Euribor), Barclays n'a manifestement pas pu agir seule. Une vingtaine d'enquêtes auraient ainsi été ouvertes et concerneraient entre autres JP Morgan Citigroup, Royal Bank of Scotland et JPMorgan Chase, en plus des établissements cités par le FT.

Le trader de Barclays auraient cité quatre confrères

Philippe Moryoussef, chez Barclays de 2005 à 2007 et actuellement interrogé par les autorités, est soupçonné d'avoir contacté un certain nombre de collaborateurs d'autres banques pour qu'ils alignent leurs stratégies et puissent ainsi profiter des manipulations de taux, selon le quotidien britannique qui se réfère à un communiqué du régulateur américain de la CFTC (Commodity Futures Trading Commission) et à des sources proches du dossier. Ce trader aurait ainsi contacté Michael Zrihen du Crédit Agricole, Didier Sander chez HSBC et Christian Bittar de HSBC. L'identité de l'employé suspect de la Société Générale reste floue, indique le FT qui précise que ces personnes ne travaillent plus pour les banques en question.

Scoiété Générale assure coopérer pleinement avec les autorités

Joint par l'agence Reuters, un porte-parole de Société Générale a fait savoir qu'aucune malversation n'a été découverte à ce jour. "Nous coopérons pleinement", a-t-elle déclaré. Le gouverneur de la Banque de France Christian Noyer a dit à plusieurs reprises, qu'à sa connaissance, aucune procédure n'avait été déclenchée contre des banques françaises qui auraient pu être suspectées de manipuler les taux interbancaires. "Elles ont été interrogées par les autorités compétentes et les réponses, apparemment, ont été satisfaisantes puisqu'à ce stade, il n'y a aucune suite", avait-il notamment affirmé mercredi sur Europe 1.

Scandales en série

La Deutsche Bank a proposé aux autorités européennes et suisses de coopérer totalement avec les enquêteurs dans cette affaire, afin de bénéficier du statut de "témoin repenti" et d'éviter ainsi une condamnation trop lourde, avait révélé l'hebdomadaire "Der Spiegel" dimanche. Quant à HSBC, les pépins judiciaires s'accumulent. Un rapport du Sénat américain montre en effet que des pratiques de la banque l'ont conduite à aider des clients à blanchir massivement des fonds en provenance des régions les plus dangereuses et les plus secrètes de la planète. HSBC a reconnu des "défaillances" et présenté publiquement ses excuses mardi mais risquerait une amende d'un milliard de dollars.

Si on ajoute la perte de trading estimée à 6 milliards de dollars chez JP Morgan et l'audience en appel du procès Kerviel en France, ces affaires contribuent depuis le début de l'année à réduire un peu plus la crédibilité et la réputation du secteur bancaire dans le monde, déjà mises à mal depuis la crise financière de 2008. Une situation que l'on pourrait comparer à celle d'un cancre dont le commentaire du professeur dépité serait : "a touché le fond mais creuse encore".