Les assureurs traditionnels en guerre contre Benoît Hamon

Par Ivan Best  |   |  535  mots
Benoït Hamon, ministre de l'économie sociale et solidaire, en charge de la consommation Copyright Reuters
Porté par Benoît Hamon, le projet de loi sur la consommation devrait permettre aux assurés de résilier à tout moment leurs contrats d'assurance auto, ou habitation. Les compagnies traditionnelles s'opposent à cette nouvelle disposition dont pourraient profiter les assureurs en ligne

Les assureurs ne sont pas seulement en lutte contre le projet de loi sur l'emploi, et les conditions de la généralisation des complémentaires santé, qui risquent fort de privilégier les institutions de prévoyance. Un autre front s'est ouvert, pour eux, avec le projet de loi sur la consommation, défendu par le ministre de l'Economie sociale et solidaire, Benoit Hamon, projet qui devrait être présenté en conseil des ministres courant mai.

Résiliation à tout moment

Ce texte prévoit la possibilité pour les consommateurs de résilier leur assurance à tout moment, après une année entière sous contrat. Une possibilité qui serait offerte pour l'auto comme pour l'habitation. Les assureurs traditionnels sont vent debout contre cette nouveauté, qui risque de leur faire perdre des clients.
Aujourd'hui, en effet, les assurés ne peuvent résilier que dans les deux mois précédant la date d'échéance de leur contrat. Après, c'est trop tard. Du coup, nombre de consommateurs restent chez leurs assureurs, même s'ils voient passer, à l'occasion, des offres plus intéressantes. Ainsi, les Français conservent pendant six ans leur assurance, contre deux ans seulement dans les pays comme la Hollande, où la résiliation est autorisée à tout moment. Les Hollandais bénéficient ainsi de prix plus bas.

Les assureurs traditionnels perdants
C'est l'un des objectifs de la future loi Hamon : il ne sera plus question de date limite. Les assureurs traditionnels risquent d'y perdre des plumes. Car, entre les tarifs qu'ils proposent et les offres des assureurs en ligne, visibles sur des comparateurs, l'écart de prix serait en moyenne de 229 euros par an (-34%) pour une assurance auto, selon une étude Ipsos. Une étude bien sûr mise en avant par les sites internet comparateurs et les assureurs en ligne, qui verraient les clients affluer.
Outre le risque de perdre des contrats, les assureurs traditionnels verront leurs coût de gestion augmenter fortement (de 15 à 20%, selon l'un d'entre eux), avec l'accroissement du turnover de leurs clients. Selon un courrier interne à la Fédération française des sociétés d'assurance, un point de turnover annuel des clients représenterait un coût équivalent à 0,8% des primes perçues. Pas négligeable.

Tous les arguments utilisés
Face au danger, les assureurs traditionnels utilisent tous les arguments, comme la menace d'une multiplication du nombre d'automobilistes roulant sans être couverts, alors même que le projet imposera en fait au consommateur d'établir la preuve de la souscription d'un nouveau contrat avant de résilier l'ancien. D'autres sont plus modérés dans leur dénonciation du projet. Ainsi, la position d'Axa, qui critique la future loi Hamon, est peut-être plus ambiguë que le groupe veut bien le dire : sa filiale, Direct Assurance, est en plein boom. Son chiffre d'affaires a augmenté de 15,6% en 2012, avec une des meilleures rentabilités du secteur. Direct Assurance devrait profiter de la loi Hamon, et accroître encore fortement son activité, pour le plus grand bénéfice de sa maison mère: les contrats que perdraient les Assurances Axa seraient bien plus que compensés par les gains de la filiale low cost.