La Poste en lice pour racheter Monte Paschi Banque ?

Par Delphine Cuny  |   |  850  mots
La banque toscane est présente en France depuis 1990. Monte Paschi Banque fait de la banque privée et de détail, des services aux entreprises et aux professionnels de l’immobilier.
Selon nos informations, une « data room » aurait été ouverte pour que l’entreprise publique audite les actifs, des agences au portefeuille de clients, de la filiale française de la banque italienne récemment renflouée par Rome. Un mandat aurait été confié à la banque Rothschild.

Contrainte de réduire la voilure après sa recapitalisation de 5,4 milliards d'euros sur fonds publics, la banque toscane Monte dei Paschi di Siena envisage de céder ses filiales en France et en Belgique. Selon nos informations, la direction de Monte Paschi Banque (la filiale française) a indiqué jeudi dernier aux délégués du personnel qu'un mandat avait été confié à une banque d'affaires - il s'agirait de Rothschild - afin de recueillir les différentes offres de reprise. Selon d'autres sources concordantes, l'un des repreneurs potentiels serait la Poste, qui serait déjà entrée dans un processus de « data room » - la consultation des documents de l'entreprise en vue d'un audit d'acquisition - qui ne préjuge en rien de l'issue. La Poste n'a pas fait de commentaire, la banque Rothschild n'a pas souhaité en faire non plus. Monte Paschi, en France et en Italie, n'a pas répondu à nos sollicitations.

Fondée il y a plus de 500 ans, la plus ancienne banque commerciale au monde encore en activité est présente en France depuis 1990, lorsqu'elle a racheté un réseau d'agences qui appartenait à la banque australienne ANZ et avait changé maintes fois d'enseigne, de la Banque ottomane à la banque britannique Grindlays. Monte Paschi Banque compte aujourd'hui 18 agences, essentiellement à Paris et sur la Côte d'Azur. C'est un petit établissement qui emploie 275 personnes et fait de la banque privée et de détail, des services aux entreprises et aux professionnels de l'immobilier : les syndics de propriété représentent la moitié de sa clientèle.

[Extrait du rapport annuel 2016 de Monte Paschi Banque S.A.]

Recapitalisation toute fraîche

Les salariés français sont inquiets car ils se doutent qu'ils font partie des 450 postes ayant vocation à disparaître d'ici à 2021 par le biais de cession d'actifs. En tout, la maison-mère s'est engagée à réduire de 22% ses effectifs, soit de 5.500 postes. La filiale française a réalisé un produit net bancaire de 41 millions d'euros en 2016, stable, et un résultat d'exploitation proche de l'équilibre, selon son rapport annuel. Son total de bilan atteint 1,18 milliard d'euros mais ses fonds propres n'étaient que 65,3 millions d'euros à fin 2016 : la maison-mère a dû la renflouer en février par une augmentation de capital de 40 millions d'euros, en plus des 15 millions d'euros injectés l'année d'avant.

Monte Paschi Banque a inscrit une lourde provision de 27 millions dans ses comptes l'an dernier, dont une large part liée à la perte de créances dans le dossier William Saurin, ce qui a fait virer ses comptes dans le rouge. Il y a quelques années, c'est dans l'affaire Urbania Immobilier qu'elle avait « perdu quelques plumes », rappelle une source interne - comme d'autres banques, mais moins affectées proportionnellement à leur taille.

 « On a toujours été en vente ! », ironise un salarié qui a plus de vingt ans de maison.

"Pas de fermeture ni de licenciement"

La direction générale aurait en fait relancé le mandat de son « advisor » qui était échu - La Poste a déjà été citée comme acquéreur possible il y a quelques années. Les dirigeants ont assuré aux délégués du personnel qu'il n'y aurait pas d'autres fermetures d'agences que les trois prévues en août avant le plan de restructuration de la maison-mère (Grenoble, Montpellier et Paris Saint-Dominique) et qu'il n'était pas question de fermer l'entité.

« La Monte Paschi n'a jamais licencié personne », a fait valoir la direction de la filiale française, selon un participant à la réunion.

Le plan de restructuration de la banque de Sienne prévoit, outre des départs naturels, un accompagnement par le Fonds de solidarité des salariés (italiens) dont les postes sont supprimés. Le syndicat FO Banques s'est ému de l'avenir des salariés de la filiale dans un courrier adressé le 13 juillet au président de la République, Emmanuel Macron.

Grâce à une reprise de provision, la filiale française afficherait un bénéfice net flatteur de 4,8 millions d'euros à fin juin 2017 (et un résultat opérationnel proche de l'équilibre). Son portefeuille de clients (près de 40.0000, dont 11.000 particuliers, 5.200 entreprises et 19.500 syndics) pourrait intéresser la Banque Postale qui avait regardé de près la Banque Palatine, filiale de BPCE spécialiste des PME et de leurs dirigeants, qui fut elle-même sous pavillon italien (Sanpaolo) de 1988 à 2003. La Palatine est sa concurrente directe et bien positionnée aussi auprès des syndics (qui apportent des dépôts importants), mais elle est sept fois plus grosse en produit net bancaire. Monte Paschi Banque posséderait également un patrimoine immobilier non négligeable. Il y a quelques années, une banque russe s'était intéressée à cet établissement bien implanté sur la Côte d'Azur mais la Banque de France n'avait pas laissé faire.

Quant à la filiale belge de Monte Paschi (une centaine de salariés), elle pourrait être cédée à une banque américaine ou britannique, a affirmé récemment le président de Monte Paschio Belgio, Guido Ravoet.