« Le capital-investissement français dépassera le britannique bien avant 2020 » (AFIC)

Par Delphine Cuny  |   |  723  mots
Les montants levés au premier semestre par les fonds de private equity français ont augmenté de 30% pour atteindre 8,1 milliards d'euros. On devrait battre un nouveau record sur l'ensemble de l'année.
Le capital-risque pour les startups n’est pas le seul à enchaîner les records : tout le secteur du private equity, qui investit dans les PME et ETI non cotées en Bourse, enregistre une forte accélération des montants levés et du nombre d’entreprises soutenues. « C’est porteur pour l’économie française » insiste le président de l’Association française des investisseurs pour la croissance (AFIC), Olivier Millet.

Si le métier de « VC » (venture capitalist) est devenu aussi « cool » que celui de startupper ces dernières années, pour autant le capital-risque n'est qu'une des facettes du capital-investissement (le financement des entreprises non cotées en Bourse de toutes tailles), qui, lui aussi, se porte très bien. « Le capital-risque enregistre des chiffres remarquables, mais ce n'est pas la seule réalité du marché : l'ensemble du capital-investissement français est en train d'accélérer », a fait valoir  Olivier Millet, le président de l'Association française des investisseurs pour la croissance (AFIC), en présentant le baromètre du secteur réalisé avec le cabinet d'audit Grant Thornton ce lundi.

Au premier semestre, les acteurs du capital-investissement hexagonaux (innovation, développement, transmission/LBO et retournement) ont levé 8,1 milliards d'euros d'épargne mondiale, en hausse de 30% sur un an, dont les deux tiers venant d'investisseurs français (secteur public, assureurs, fonds de fonds, industriels, family offices, etc). Ceci augure d'un nouveau record sur l'année, après les 14,7 milliards de 2017.

« Nous battons des records en levées de fonds et en nombre d'entreprises soutenues, avec près de 1.200 startups, PME et ETI accompagnées dans leur croissance », a relevé Olivier Millet, qui est également président du directoire d'Eurazeo PME. « Cette levée de fonds va irriguer majoritairement l'économie française au cours des 4 à 5 prochaines années, puisque 84% des entreprises soutenues ont leur siège en France. C'est porteur pour l'économie française », a-t-il insisté.

En capitaux investis dans les entreprises, le montant est en croissance de 16% à 6,39 milliards d'euros sans dépasser le record de 2007.

[Montants investis par les acteurs du capital-investissement. Crédit AFIC]

Accélération post-Macron en vue

Ardent soutien des réformes du président Macron et du Premier ministre Edouard Philippe, Olivier Millet estime que « le contexte est plus favorable qu'il y a un an, ce qui nous permet d'être raisonnablement optimistes », en faisant référence aux mesures fiscales telles que la suppression de l'ISF sur les valeurs mobilières et la flat-tax à 30%. « Avant Macron, il y avait déjà une dynamique, post-Macron, on peut imaginer qu'il y aura une accélération de la confiance et une envie de croissance » espère-t-il, parlant de « réconcilier l'épargne française et les entreprises. »

L'afflux de capitaux n'a pas concerné qu'un seul gros acteur, tel que le géant Ardian, l'ex-Axa Private Equity, Astorg ou PAI, mais 127 fonds, un record là aussi. La France compte 300 sociétés d'investissement, dont certaines très petites.

« La trajectoire de croissance du capital-investissement français ces dernières années le rapproche non seulement de l'objectif de doubler la taille des levées annuelles à 20 milliards d'euros d'ici 2020, mais aussi le positionne pour devenir le premier marché d'Europe. Bien avant 2020, le capital-investissement français sera devant le marché britannique en fonds levés et en montants investis », a assuré Olivier Millet.

D'ores et déjà, les professionnels français ont levé au cours du semestre plus que les fonds d'investissement britanniques sur l'ensemble de l'année 2016 (6,1 milliards de livres soit environ 6,83 milliards d'euros), lesquels subissent la dévaluation de la livre sterling et les premiers effets du Brexit.

« La France possède un tissu d'entreprises non cotées, startups, PME, ETI, remarquable et des opérateurs de capital-investissement dynamiques, ambitieux et crédibles à l'international. Les ingrédients sont là pour aller plus vite que prévu », a argumenté Olivier Millet.

S'il a appelé « tout le monde à garder la tête froide : lever des fonds c'est bien, l'usage qu'on en fait est encore plus important », le président de l'AFIC a évacué l'idée d'une bulle.

« La valeur des actifs dans le monde a augmenté, du fait du QE [le quantitative easing, la politique monétaire accommodante des banques centrales, ndlr]. Ce n'est pas spécifique au non-coté, on entend que tout est cher, en particulier sur les marchés boursiers américains.

La force du private equity est de ne pas présenter de risque systémique. On l'a vu lors de la dernière crise financière : si un fonds commet une erreur, les autres ne sont pas impactés. La thèse selon laquelle il y aurait trop d'argent dans le capital-investissement est une erreur d'analyse », a plaidé le président de l'AFIC.