Ma conseillère bancaire est un robot !

Par Delphine Cuny  |   |  733  mots
Voici Aida, la nouvelle employée du service client de la banque suédoise SEB, issue de l'intelligence artificielle de l'Américain IPsoft.
Elle s'appelle Aida et a tout de l'employée idéale, travaillant 7 jours sur 7, jamais malade, toujours souriante. Cet assistant virtuel, tournant à l'intelligence artificielle, est actuellement déployé au service client de la banque suédoise SEB. Une première.

L'intelligence artificielle (IA) a fait son entrée dans les banques françaises, dans les back-offices, pour aider les conseillers à traiter certains emails au Crédit Mutuel, par exemple. En Suède, elle a carrément débarqué au service client, à la banque SEB (Skandinaviska Enskilda Banken). Depuis novembre dernier, la banque a recruté "une nouvelle employée numérique", une blonde souriante appelée Aida, qui répond directement aux questions des clients sur la page d'accueil du site web. L'ex-directrice générale de SEB, Annika Falkengren, en avait fait une démonstration bluffante lors de la dernière assemblée générale des actionnaires, en mars dernier (voir le passage à la 15e minute).

"Je suis toujours au travail, 24 heures par jour, 365 jours par an. J'ai le sens du service et j'ai soif d'apprendre", répond Aida d'une voix légèrement robotique.

[Démonstration du robot Aida lors de l'Assemblée générale annuelle des actionnaires de SEB le 28 mars 2017. Crédit : Bloomberg]

Cette assistante virtuelle tournant à l'intelligence artificielle, issue de la technologie de l'Américain IPsoft, a d'abord été testée pendant plusieurs mois en interne, à l'assistance informatique en ligne (hot-line). En trois semaines, la version antérieure, baptisée Amelia, a tenu 4.000 conversations avec 700 employés et "a réussi à résoudre la majeure partie des problèmes sans délai", selon le responsable de la stratégie de SEB, Rasmus Järborg - en particulier des tâches répétitives et à faible valeur ajoutée, comme répondre à la perte de mot de passe.

L'américain IPsoft, qui se définit comme "l'entreprise du travail numérique(the digital labor company), affirme travailler avec "4 des 5 plus grandes banques d'investissement mondiales" et 6 des plus grands assureurs américains. Le cabinet britannique d'intelligence économique Ovum l'a classé comme le leader de l'intelligence artificielle conversationnelle.

L'IA et les subtilités du suédois

Satisfait, le groupe SEB, qui est conscient d'être "à l'avant-garde" en Europe, a décidé de passer à l'étape d'après, avec un lancement grand public en suédois. Et c'est là que les choses se compliquent.

"Aida n'est pas encore très bonne, c'est un logiciel américain, il faut qu'elle apprenne le suédois, y compris le suédois professionnel, le mauvais suédois, les erreurs de prononciation, etc. C'est plus difficile que prévu", nous confie un porte-parole de SEB. 'Elle est encore en formation ! Ce n'est que le début."

Depuis son déploiement sans fanfare en novembre dernier, Aida a conversé avec 30.000 clients. Ce qui n'est pas rien à l'échelle des 1,2 million de clients particuliers de SEB en Suède. Aida peut d'ores et déjà résoudre certains problèmes simples comme fournir une identité de banque mobile ou guider pas à pas un internaute qui n'est pas encore client.

"Les réactions ont été majoritairement très positives chez les clients. Il n'y a aucune ambiguïté sur le fait qu'ils n'échangent pas avec une vraie personne et ils ne s'attendent pas à des réponses à tout. L'avantage est qu'Aida peut tenir plus de 100 conversations en même temps, il n'y a pas besoin d'attendre son tour comme au centre d'appels : les clients réclament des réponses instantanées", souligne le porte-parole de SEB.

Un complément de l'humain

En interne, aussi, les employés n'auraient pas manifesté d'inquiétude ou d'hostilité.

"Je m'attendais à des réactions, mais il n'y en a pas vraiment eu", confie le porte-parole. "Le secteur bancaire suédois vit de telles transformations avec la digitalisation accélérée que c'est perçu comme une étape de plus. Le recours à l'intelligence artificielle s'inscrit dans notre stratégie de transformation. Nous avons présenté très clairement Aida comme un complément du service client humain. Aujourd'hui, elle est loin d'être parfaite."

Aida doit décharger les conseillers de la plateforme téléphonique, qui emploie 800 personnes et est déjà opérationnelle 24 heures sur 24, des tâches les plus simples et routinières. A terme, elle sera peut-être aussi intégrée à l'application mobile (quand elle parlera mieux suédois) et au sein du portail de services bancaires (au-delà de la page d'accueil), voire proposée pour la clientèle des entreprises.

"Mais un robot ne remplacera jamais la construction d'une relation avec une entreprise", insiste le porte-parole de SEB.