Un volet "phare" de la loi Florange censuré par le Conseil constitutionnel

Par latribune.fr  |   |  556  mots
La proposition de loi avait été adoptée par le Parlement le 24 février dernier. Mais des sénateurs et députés UMP ont saisi le Conseil constitutionnel pour en contester 3 articles.
La loi "Florange" prévoyait de durcir les règles de reprise de sites rentables. Son volet prévoyant des sanctions contre les dirigeants porte atteinte à la liberté d'entreprendre et au droit de propriété, a tranché le Conseil constitutionnel.

Surprise autour de la loi Florange. C'était une des mesures phares de la campagne du candidat François Hollande. Mais le Conseil Constitutionnel a censuré, ce jeudi 27 mars, une de ses parties les plus importantes, qui ouvrait notamment la voie à des pénalités contre les entreprises fermant un site rentable.

Les Sages ont en effet jugé que l'obligation pour un employeur d'accepter une offre de reprise sérieuse ainsi que la compétence confiée au tribunal de commerce pour l'apprécier, avec des sanctions à la clé, constituaient une atteinte au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre.

>> Lire : La loi Florange, ou la méconnaissance gouvernementale de l'économie

La proposition de loi, cosignée par des députés socialistes, écologistes et radicaux de gauche, avait été adoptée définitivement par le Parlement le 24 février dernier. Mais quelques 108 sénateurs et 80 députés UMP avaient alors saisi le Conseil constitutionnel pour en contester trois articles. Deux de ces articles contestés ont été jugés conformes à la Constitution - ceux relevant du volet favorisant l'actionnariat de long terme et encadrant les OPA hostiles.

Le juge n'a pas à se substituer au chef d'entreprise

La loi fait obligation aux entreprises d'au moins 1.000 salariés, ou appartenant à un groupe d'au moins 1.000 salariés, de rechercher un repreneur en cas de projet de fermeture d'un établissement entraînant un licenciement collectif. Le Conseil a estimé que ce principe était conforme à la Constitution, de même que celui de l'information du repreneur potentiel sur la situation de l'entreprise.

Mais la partie portant sur les sanctions à l'égard des employeurs refusant une offre sérieuse de cession ou ne respectant pas l'obligation de recherche d'un repreneur n'a pas passé l'examen. L'article en question prévoyait que le tribunal de commerce pouvait être saisi par le comité d'entreprise. Il imposait une règle : un employeur ne peut motiver son refus de cession que s'il y a "mise en péril de la poursuite de l'ensemble de l'activité de l'entreprise".

Un principe qui, ont tranché les Sages, prive l'employeur de sa capacité d'anticiper des difficultés économiques et de procéder à des arbitrages économiques. Le Conseil constitutionnel a aussi considéré que le juge n'avait pas à substituer son appréciation à celle du chef d'entreprise.

"Atteinte à la liberté d'entreprendre"

Ces contraintes "portent, tant au droit de propriété qu'à la liberté d'entreprendre, une atteinte manifestement disproportionnée au regard de l'objectif", selon la décision du Conseil constitutionnel.

La loi prévoyait par ailleurs, en cas d'absence de recherche d'un repreneur ou de refus d'une offre sérieuse, une pénalité pouvant atteindre jusqu'à vingt fois la valeur mensuelle du Smic par emploi supprimé, soit plus de 28.000 euros par salarié, mais ne pouvant dépasser 2% du chiffre d'affaires.

Du fait des éléments censurés, cette pénalité ne s'appliquait plus qu'en cas de non-respect de l'obligation de recherche d'un repreneur. Mais son montant a été jugé par les Sages "manifestement hors de proportion avec la gravité du manquement". Si elles n'avaient pas été censurées, ces pénalités auraient été reversées à la Banque publique d'investissement (BPI) pour financer des projets créateurs d'activité et d'emplois ou de promotion des filières industrielles, dans le territoire concerné par la fermeture de l'établissement.