Quatre jours de grève, des membres de la direction expulsés ce vendredi du comité d'entreprise extraordinaire, des comptes et un cours de Bourse plombés, une dette abyssale,... forcément, quand le nouveau PDG d'Air France, Alexandre de Juniac, déclare mercredi au Sénat qu'il nourrit l'ambition de faire de la compagnie « le numéro un mondial en 2016 en termes de passagers transportés et de qualité de service », les propos interpellent.

 De quoi parle t-on. D'Air France ou d'Air France-KLM ? De trafic en nombre de passagers transportés, de trafic mesuré en passagers kilomètres transportés (PKT), ou de passagers kilomètres transportés sur les vols internationaux ?

 En théorie, Alexandre de Juniac parle au nom de la compagnie tricolore qu'il préside et pour laquelle il expliquait la stratégie aux sénateurs. Or, quelle que soit la mesure de trafic utilisée, Air France n'a aucune chance d'être le numéro un mondial dans quatre ans. Explications :

 - En passagers transportés : avec sa cinquantaine de millions de voyageurs transportés par ans, la compagnie française ne rattrapera jamais United, le leader mondial aujourd'hui avec 146 millions de passagers accueillis à bord de ses avions en 2011, ou le transporteur qui l'aura dépassée d'ici à quatre ans par le jeu des fusions. Il n'y arriverait pas plus en comptant KLM qui porte le trafic d'Air France-KLM à 75 millions (106 millions pour le groupe Lufthansa), voire Alitalia (25 millions) dans l'éventualité d'une fusion en 2013.

 - En passagers kilomètres transportés (PKT) : le verdict est le même. United et Delta sont trop loin devant.

 - En passagers kilomètres transportés à l'international : là aussi, Air France ne rattrapera jamais le leader Emirates qui ne peut qu'accentuer son avance au fil des ans au regard de son énorme carnet de commandes d'avions (70 A380 à recevoir, 70 A350, plusieurs dizaines de B777, ...).

 C'est pourtant avec cette dernière unité de mesure de trafic, en passagers kilomètres transportés à l'international, que l'objectif semble avoir été fixé. Mais il ne peut prendre en compte Air France seule, mais Air France-KLM. Car en réunissant les chiffres des deux compagnies s?urs, la première place du podium est envisageable. Elle l'est d'autant plus que le groupe franco-néerlandais est déjà... numéro un mondial dans cette unité de mesure du trafic, selon les statistiques de l'association internationale du transport aérien (Iata) en 2010... Bref plus qu'une couronne à ravir, c'est une position à défendre.

 En revanche, en raisonnant au niveau d'Air France-KLM, le leadership mondial en termes de qualité de services semble impossible à réaliser. Déjà difficile pour Air France face aux compagnies asiatiques et du Moyen-Orient, il devient hors d'atteinte avec la compagnie néerlandaise dont le niveau est déjà inférieur à celui d'Air France.

 Bref, ce slogan qui entend donner une justification (et un peu de rêve) aux efforts demandés aux salariés, mérite d'être affiné.