Quand le Brésil se fâche contre les Américains, le Rafale marque des points

Par latribune.fr (source AFP)  |   |  642  mots
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L'annulation par les Etats-Unis de l'achat d'avions d'attaque légers brésiliens et le choix de l'Inde en faveur du Rafale ont renforcé les chances du chasseur français de remporter l'appel d'offres visant à moderniser l'armée de l'air brésilienne, selon des sources gouvernementales et des analystes.

Le Brésil a réagi avec courroux jeudi soir à l'annonce abrupte par l'Armée de l'air américaine qu'elle annulait un contrat de 355 millions de dollars pour l'achat de vingt AT-29 Super Tucano fabriqué par le brésilien Embraer. Cette annulation fait suite au dépôt d'une plainte par un avionneur américain, Hawker Beechcraft, mécontent que son appareil AT-6 ait été écarté. Le Pentagone a déclaré mercredi qu'il allait lancer rapidement un nouvel appel d'offres. Le ministère brésilien des Affaires étrangères a dit avoir reçu "avec surprise" cette nouvelle et a estimé que cette décision "ne favorisait pas les relations de défense entre les deux pays".

Selon une source gouvernementale, cette annulation "sera prise en compte" et "affectera" la décision du Brésil d'acheter 36 avions de chasse pour quelque 5 milliards de dollars. Le Rafale du français Dassault est en compétition avec le F/A-18 Super Hornet de l'américain Boeing et le Gripen NG du suédois Saab. Le numéro deux du Département d'Etat américain, William Burns, en visite au Brésil, a cependant estimé que les deux dossiers "n'étaient pas liés".

Le résultat de la présidentielle française va jouer

Le ministre brésilien de la Défense Celso Amorim a déclaré récemment que la présidente Dilma Rousseff pourrait prendre une décision au cours de ce semestre, relançant l'appel d'offres suspendu l'an dernier pour des raisons d'économies budgétaires. Le gouvernement brésilien a prévu de prendre sa décision seulement après les voyages de la présidente Rousseff en Inde, fin mars, et aux Etats-Unis en avril, et seulement une fois connus les résultats de l'élection présidentielle française en mai. Ce sont trois "facteurs" qui auront une influence sur la décision, a dit la source gouvernementale.

L'Inde a annoncé en février qu'elle ouvrait des négociations exclusives avec l'avionneur Dassault pour l'achat de 126 Rafale, un méga-contrat de 12 milliards de dollars, marquant le premier succès à l'exportation de l'avion français. Le ministre brésilien de la Défense s'est rendu peu après en Inde et a reconnu l'intérêt de son pays pour le Rafale, déclarant qu'il était "très important que le Brésil échange des informations" avec l'Inde. "Le Rafale a gagné beaucoup de points avec ce contrat en Inde", explique Nelson During, directeur du site spécialisé Defesanet. Il a toutefois souligné que les trois avions avaient un bon palmarès et que le Gripen avait aussi marqué des points avec une vente à la Suisse.

Le Brésil très attentif au contrat de Rafale en Inde

"Si la décision du Brésil sur les chasseurs avait lieu cette semaine, le F-18 aurait perdu beaucoup de points, mais à plus long terme il est difficile de prévoir l'impact", a estimé l'expert. Pour l'analyste militaire et général de réserve Alvaro Pinheiro, "beaucoup dépendra de la négociation en Inde" sur le prix et l'étendue du transfert de technologie. "Le Brésil n'a pas encore choisi le chasseur (qu'il va acquérir). Il y a une préférence pour le Rafale mais cela ne signifie pas qu'il a gagné".

Le Brésil exige un transfert de technologie total pour construire sur place l'appareil, avec la possibilité de le vendre ensuite sur le marché régional. Sur ce point, le Rafale est clairement le mieux placé, le gouvernement français s'étant engagé à un transfert "sans restriction" et les Brésiliens étant méfiants sur la possibilité des Etats-Unis de faire de même en dépit de leurs engagements, selon les analystes. En revanche, les Etats-Unis offrent, avec leur F-18, le meilleur prix.