Rafale : Dassault Aviation joue sa carte à fond au Canada

Par Michel Cabirol  |   |  948  mots
Le PDG de Dassault Aviation Eric Trappier
Canada, Malaisie et Inde. Trois campagnes export évoquées par le nouveau patron de l'avionneur Eric Trappier lors de sa conférence de presse avant l'ouverture du salon aéronautique du Bourget. Trois campagnes où Dassault Aviation veut croire en ses chances de succès.

Faut-il croire aux chances du Rafale au Canada ? Difficile même si le gouvernement canadien est très agacé par la facture en très nette hausse présentée par Lockheed Martin pour l'avion de combat américain, le F-35. Aussi, Dassault Aviation a décidé de jouer sa carte sans complexe avec le Rafale. "Nous sommes très volontariste au Canada", a souligné vendredi le PDG, Eric Trappier. Pourquoi ? "Le Canada, a-t-il expliqué, est un pays important pour nous puisque c'est un pays qui avait fait le choix unilatéral de participer au programme JSF, aujourd'hui F-35, dans le cadre de son développement. Ce choix pourrait être remis en cause. Les autorités canadiennes ont lancé un appel à informations pour étudier une alternative au F-35". Pour le nouveau PDG de l'avionneur, c'est donc "l'occasion de montrer que nous avons l'excellence avec le Rafale". Dassault Aviation est donc en train de répondre au RFI (Request for information) lancé par le gouvernement canadien. Au passage, il a fustigé les choix des pays européens, comme le Danemark et les Pays-Bas, qui ne semblent pas quant à eux remettre en cause leur choix d'acquérir des F-35 en dépit d'une facture qui gonfle. "En Europe, il existe un Buy American act qui semble laisser supposer que c'est toujours mieux d'acheter américain", a-t-il regretté.

Eric Trappier estime que le Rafale a ses chances au Canada. Pour plusieurs raisons. "Les militaires canadiens ont vu le Rafale en opération que ce soit au Mali ou même avant, en Libye", a-t-il fait valoir. Les militaires canadiens ont pu apprécier les performances opérationnelles de l'appareil. "Cela démontre très clairement que les avions de combat français, Rafale en particulier, sont au bon niveau pour répondre aux besoins opérationnels" de l'armée de l'air canadienne. Parallèlement, le patron de Dassault Aviation a rappelé que "le F35 a des difficultés". Notamment au niveau financier avec une facture sur les coûts de développement de plus en plus élevée et des coûts de support de l'appareil qui pourraient faire reculer certains pays acheteurs. L'heure de vol du F-35 (environ 36.000 euros) serait deux fois plus chère que celle du Rafale (environ 14.000 euros), estime-t-on dans l'armée de l'air. "C'est l'occasion de montrer qu'en termes budgétaires les avions américains, même s'ils bénéficient de l'avantage du dollar, dérivent fortement dans leurs développements", a insisté Eric Trappier. Et de rappeler que "cela n'a pas été le cas du Rafale". "La Cour des comptes a montré que ce programme, qui a été décidé il y a plus de 20 ans, a eu 4 % à peu près de dérive budgétaire", a-t-il expliqué. Pour le PDG de Dassault Aviation, "le Rafale est un modèle dans ce domaine contrairement au F-35, qui a un développement qui dure et qui rencontre certaines difficultés techniques et surtout quelques problématiques budgétaires". Il a conclu que "les Canadiens se posent des questions sur le calendrier et sur la problématique budgétaire. Car, semble-t-il, le F35 va coûter cher en terme opérationnel".

Dassault très actif en Malaisie

Dassault Aviation est "très actif en Malaisie", a précisé Eric Trappier, qui a rappelé que l'avionneur avait envoyé à plusieurs reprises le Rafale surplace. La Malaisie, qui souhaite remplacer d'ici à 2015 sa flotte de MIG-29 russes, a présélectionné les trois concurrents européens - le Rafale, l'Eurofighter, fabriqué par EADS, BAE Systems et Finmeccanica, et le Gripen du suédois Saab - ainsi que le F18 de Boeing et le Sukhoi russe. Elle souhaite 18 avions de combat. Eric Trappier a réaffirmé que Dassault Aviation était prêt à installer une chaine d'assemblage du Rafale en Malaisie : "nous avons des partenariats industriels avec des entreprises en Malaisie. Nous avons commencé à travailler il y a deux ans. Nous sommes prêts à installer une chaîne d'assemblage si la demande se confirme". Et de souligner que "ce n'est pas le cas pour les autres compétiteurs". Pour le patron de l'avionneur, "c'est un grand avantage". Interrogé pour savoir si une chaine d'assemblage du Rafale était intéressante pour 18 appareils seulement, Eric Trappier a estimé que si les Malaisiens "la veulent, ils l'auront. Aussi, s'ils veulent se la payer, ils l'auront. Ce n'est pas compliqué de transférer une chaine d'assemblage".

Enfin, en Inde, "la négociation se poursuit", a-t-il précisé. Elle se poursuit sur deux volets : la vente de Rafale et sur les licences de fabrication de l'ensemble des composants du Rafale. Prié d'expliquer si le partage des responsabilités entre la France et l'Inde était un point de blocage, Eric Trappier a expliqué que ce travail entre les sociétés françaises et les sociétés indiennes se poursuivait. "Il n'y a jamais eu de blocage", a-t-il affirmé. Tout au plus "il y a des discussions volontaristes, qui sont quelques fois difficiles puisque c'est quand même un gros sujet. Mais cela se poursuit dans la très bonne humeur avec HAL (l'industriel indien choisi pour être le partenaire de Dassault Aviation, ndlr) et le ministère de la Défense indien. Il espère que cela aile "le plus vite". "Si on écoute nos amis indiens et si on s'écoute nous-mêmes, on aimerait bien finir en 2013. Quand je dis finir, c'est signer un contrat", a-t-il souligné. L'Inde a choisi le Rafale en janvier 2012 après un appel d'offres portant sur 126 appareils et potentiellement sur une option de 63 avions supplémentaires. "Des discussions sont en cours sur cette option", a déclaré Eric Trappier.