Et si Bercy faisait capoter la vente des Rafale et des frégates en Egypte ?

Par Michel Cabirol  |   |  617  mots
Le Rafale de Dassault Aviation attend son premier contrat à l'export
Bercy rechigne à accorder des facilités de financement à l'Egypte qui souhaite s'offrir 23 Rafale et deux frégates multimissions FREMM. Une situation qui rappelle celle du Maroc en 2007 où le Rafale avait perdu un contrat imperdable.

La France va-t-elle encore rater un énorme contrat pour de simples facilités de financement que Bercy rechigne à accorder à l'Égypte ? Après le départ vendredi de la délégation égyptienne de très haut niveau présente à Paris pendant dix jours, c'est le sentiment qui dominait à Paris et qui rappelle étrangement l'énorme gâchis des négociations vendangées par la France au Maroc pour la vente du Rafale en 2007. Un contrat qui était imperdable mais que la France s'est faite in fine souffler par les États-Unis.

L'Égypte sera-t-elle un mauvais remake du Maroc? Pas impossible car la délégation égyptienne est repartie sans un accord formel sur le financement qu'elle était pourtant venue chercher à Paris pour 23 Rafale et deux frégates multimissions FREMM. Soit une opération évaluée entre 5 et 6 milliards d'euros. En arrivant en France, la délégation avait pourtant pour objectif de conclure. C'était en tout cas le vœu du président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, qui était venu en visite officielle en Paris fin novembre.

Un financement à trouver

A leur arrivée, aussi bien du côté égyptien que français, il existait réellement une volonté d'avancer tant sur les Rafale que les FREMM. Le Caire a besoin d'équipements modernes opérationnels très rapidement. La situation en Libye les y pousse, une intervention armée égyptienne n'étant d'ailleurs pas à exclure. En outre, Paris et Le Caire, qui estime que la France a une responsabilité dans la situation libyenne, partagent la même inquiétude sur le développement de la menace djihadiste en Libye. D'où la volonté du président égyptien de s'équiper rapidement. Les hésitations de Bercy ne devront pas perdurer, d'autres pays, comme au Maroc en 2007, pourrait prendre un malin plaisir à se substituer à la France si celle-ci hésitait un peu trop.

Car très vite les négociations entre les Égyptiens et les Français ont été freinées par les questions sur le financement de l'opération et des garanties de paiement, qui ont été abordées au cours du séjour parisien."Il y a un écart très (trop ?) important entre la volonté politique et Bercy qui reste très frileux", explique-t-on à La Tribune. Pour signer le contrat Rafale évalué à 3,6 milliards d'euros environ, les Égyptiens demanderaient à la France un crédit Coface pour une partie du financement des avions de combat et des FREMM. Certains évoquent un crédit Coface pour la moitié de l'opération. Les banques sont elles aussi très  réservées.

Et le Qatar?

Au Qatar, le dossier Rafale a été ralenti. Selon certains observateurs, Doha verrait d'un mauvais œil les étroites relations entre Paris et Le Caire. Ce qui compliquerait un peu les négociations entre Paris et Doha alors que tout a été négocié à l'exception du prix. En dépit de ces turbulences, certaines sources estiment qu'un contrat reste en très bonne voie et devrait être signé début 2015. Mais d'autres s'inquiètent de voir les Américains très actifs au Qatar. "La commande de F18 sera passée avant celle des Rafale, indique-t-on à La Tribune. Ce qui représente un vrai risque pour le Rafale, les Américains vont consommer une partie du budget prévue pour les Français".

Deux opérations - tant en Égypte qu'au Qatar - vitales pour l'industrie française et la loi de programmation militaire (LPM) 2014-2019. Le Rafale surtout et la FREMM doivent être exportés pour tenir la trajectoire financière de la LPM. Ce serait dommage que la France rate la dernière marche dans des négociations de long cours.