Désormais américain, Latécoère veut doubler de taille d'ici à 5 ans

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  813  mots
Ce mardi 24 décembre, l'Autorité des marchés financiers (AMF) a annoncé que le fonds d'investissement américain Searchlight Capital Partners détenait 65,55% du capital et 64,75% des droits de vote à l'issue de l'OPA qu'il avait lancée en septembre et qui s'est achevée vendredi 20 décembre. Sa directrice générale, Yannick Assouad, précise les grandes lignes du plan stratégique à 5 ans de l'équipementier aéronautique français.

Lancée en septembre, l'offre publique d'achat (OPA) de Searchlight Capital Partners sur Latécoère est désormais terminée. Ce mardi 24 décembre, l'Autorité des marchés financiers (AMF) a annoncé que le fonds d'investissement américain détenait 65,55% du capital et 64,75% des droits de vote à l'issue de l'opération qui s'est achevée vendredi 20 décembre. L'OPA était déjà un succès le 3 décembre puisque Searchlight détenait à ce moment-là 62,76% du capital et au moins 61,99% des droits de vote. Sa prolongation jusqu'au 20 décembre ne lui a pas permis de récolter beaucoup plus d'actions et d'atteindre les 90% qui auraient fait sortir Latécoère de la Bourse. Si Searchlight avait raflé 90% des actions, la Loi Pacte obligeait les détenteurs des 10% restants à lui vendre leurs actions au prix fixé de l'OPA de 3,85 euros par action. Et dans ce cas de figure, explique la directrice générale de Latécoère, Yannick Assouad, Searchlight, conformément à l'accord d'engagement passé avec le ministère des Finances, devait revendre 10% des actions à un investisseur agréé par Bercy. Searchlight, n'ayant pas atteint 90% des actions, ce scénario n'a donc pas lieu. Et le groupe Latécoère va rester coté avec un gros actionnaire contrôlant et un petit flottant, comme l'est par exemple Dassault Aviation, contrôlé à 62% par le Groupe Industriel Marcel Dassault.

"Le meilleur des deux mondes"

La situation convient néanmoins à Yannick Assouad. Pour elle, "Latécoère a le meilleur des deux mondes", puisque la Bourse apporte l'avantage "de la notoriété et de la transparence" financière, et la présence d'un actionnaire "contrôlant" et désireux de développer le groupe permet d'assurer le financement de cette croissance.

"Même si le flottant ne suit pas, nous sommes assurés de faire des choses.  Pour une "mid-cap", c'est confortable. Car ce n'est pas facile d'avoir la Bourse qui vous suit pour des augmentations de capital. Et les banques ne sont pas non plus le meilleur moyen de financement aujourd'hui ", a indiqué Yannick Assouad à quelques journalistes, en précisant que "la note de crédit de Latécoère n'était pas suffisamment attrayante pour émettre des obligations".

Acquisitions en vue dans l'aérostructure

Une augmentation de capital n'est pas exclue, idéalement dans deux ou trois ans pour accompagner un plan particulièrement ambitieux. Ce plan vise à quasiment doubler le chiffre d'affaires de Latécoère d'ici à 5 ans par rapport à 2018, à 1,2 milliard d'euros, confie Yannick Assouad, avec une activité "interconnexions" (systèmes de câblages embarqués) qui pèserait autour de "450-500 millions d'euros" de chiffre d'affaires, grâce essentiellement à de la croissance organique (même si quelques acquisitions ciblées ne sont pas exclues après celle des activités câblage de Bombardier en cours en négociation), et une activité "aérostructures" (partie de la structure de l'avion, comme les portes), laquelle, "avec un, deux, ou trois mouvements de croissance externe, représenterait "au moins 700 millions d'euros de chiffre d'affaires", contre 400 millions aujourd'hui. En parallèle, des investissements importants sont prévus dans le produit, essentiellement dans ceux concernant "l'intégration de la cabine d'avion", pour les porter "au plus haut niveau mondial" afin qu'ils soient choisis non seulement pour de nouvelles plateformes d'avion mais également au moment où les compagnies aériennes réaménagent leur cabine d'avion (rétrofit). Latécoère compte sur la technologie Lifi pour percer dans ce domaine, notamment pour rendre la cabine indépendante des circuits électriques de l'avion.

Parmi ces trois priorités stratégiques, le doublement de la taille dans les  aérostructures va demander le plus de moyens.

"Pour faire de la croissance externe. C'est là que nous avons besoin d'un actionnaire un fort, car nous ne pouvons pas tout faire en dette, Il faut un investisseur qui nous accompagne", explique Yannick Assouad.

Près de 400 millons d'euros d'augmentation de capital ?

Ce qui signifie la réalisation d'une augmentation de capital dans les deux ou trois ans. L'enveloppe est conséquente : pour financer la totalité du plan, près de 400 millions d'euros sont nécessaires.

"Elle peut être de l'ordre de la capitalisation boursière de Latécoère aujourd'hui, soit 365 millions d'euros", explique Yannick Assouad.

Latécoère étant peu endetté aujourd'hui, Yannick Assouad veut que la dette soit dans 5 ans toujours inférieure à 3 fois l'ebitda (bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement). "Sinon insoutenable", confie-t-elle. Un ebitda récurent qui a vocation à grossir. D'ici à cinq ans, l'objectif est de tripler l'ebitda récurrent par rapport à la cinquantaine de millions d'euros dégagée en 2018, selon Yannick Assouad.

Selon elle, la consolidation européenne dans les aérostructures se produira davantage sous forme d'intégration que par achat-ventes, afin de "créer un champion indépendant d'un avionneur comme l'est Spirit aux Etats-Unis".