L'Airbus A321LR, quand un avion conçu pour le moyen-courrier fait un vol de 11h !

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  617  mots
(Crédits : DR)
Airbus a réalisé ce vendredi un vol de 10h50 entre les Seychelles et Toulouse avec un A321LR, la version à long rayon d'action du monocouloir de l'avionneur. Les monocouloirs sont généralement utilisés sur les vols moyen-courriers.

De quoi conforter les ambitions d'Airbus de capter une partie du marché long-courrier avec des avions initialement conçus pour faire des vols moyen-courriers. En cours de certification, l'A321 LR (à long rayon d'avion) a effectué ce vendredi un vol sans escale entre les Seychelles et Toulouse (8.300 km, soit 4.500 miles nautiques) en 10h50. L'avion était chargé dans des conditions similaires à un vol commercial puisqu'il transportait en plus des onze techniciens et des cinq membres d'équipage, 165 mannequins, soit l'équivalent de 180 personnes à bord.

Equipé de deux moteurs LEAP du couple Safran-General Electric, l'appareil dispose d'un réservoir supplémentaire pour augmenter son rayon d'action. Grâce à l'installation d'un troisième réservoir, l'A321 LR peut en effet franchir des distances allant jusqu'à 4.000 miles nautiques (7.400 kilomètres), et relier ainsi l'Europe à la côte Est américaine ou les Emirats arabes Unis avec plus de 200 passagers à bord dans une configuration biclasse et 240 dans une version monoclasse. Airbus avance également des liaisons comme Lisbonne-Recife au Brésil, Dubaï-Pékin, Kuala Lumpur-Tokyo ou encore Singapour-Sydney qui n'étaient possibles qu'avec des long-courriers.

L'avion doit obtenir sa certification au deuxième trimestre 2018 pour une entrée en service au quatrième trimestre.

Contournement des hubs

Combinée à des coûts unitaires similaires, voire inférieurs à ceux des gros porteurs, la faible capacité pour le long-courrier que propose ce type d'avion permet d'envisager le développement de manière rentable de lignes long-courriers à faible flux de trafic. Et plus précisément de remplir des vols sans besoin de les alimenter par des passagers en correspondance comme c'est le cas pour les compagnies dites « de réseau » organisées autour de puissants systèmes de hubs, comme Air France ou Lufthansa. Ces vols de point-à-point sont l'apanage des compagnies à bas coûts long-courriers.

"Aujourd'hui, pour des missions de 10 heures, on exploite des avions bi-couloir (long-courrier, ndlr). "L'A321LR va permettre de desservir des nouvelles destinations pour un moyen-courrier, d'ouvrir des marchés qui n'existaient pas jusque-là, ajoute-t-il. On connaît le Paris-New York, mais on ne conçoit pas le Bordeaux-Baltimore. Un moyen-courrier peut ouvrir des routes secondaires qui ne seraient pas exploitables avec un long-courrier. Cela intéresse autant les compagnies low-cost que les compagnies traditionnelles.souligne Joaquin Toro-Pietro, responsable des études marketing et en charge des relations clients chez Airbus.

Des précédents mais différents

L'A321LR n'est pas le premier monocouloir à effectuer des vols long-courriers. Dans sa catégorie de sièges, les compagnies américaines utilisent depuis une dizaine d'années sur certaines routes transatlantiques des B757-200, un appareil qui avait été conçu initialement pour relier les Etats-Unis à Hawaï ou pour effectuer des vols entre la côte Est et la côte Ouest (« coast-to-coast »). Par ailleurs, depuis une quinzaine d'années, des B737 ou des A319 ont quant à eux été utilisés pour des vols long-courriers « courts » mais dans une configuration 100% classe affaires (Lufthansa en 2003, Air France vers les destinations pétrolières, British Airways et Qatar Airways aujourd'hui). Avec très peu de sièges à bord, ces avions affichent des coûts aux sièges sont aux antipodes de ceux espérés pour faire du low-cost.

L'A321 LR ajoute une corde à l'arc de l'A321 dont le succès en agace Boeing. Si ce dernier a lancé le B737 MAX-10 pour contrer l'A321Neo, il n'a pas encore lancé une version long-courrier. Une telle offre sur le long-courrier devrait en fait venir du lancement d'un nouvel appareil d'une capacité allant de 220 à 260 sièges disposant d'un rayon d'action d'au moins 4.000 miles nautiques. Boeing travaille en effet sur ce concept. Mais un tel avion n'est pas prévu avant les années 2024-2025.