Renault : les cinq recettes miracle de la Dacia Logan II à bas coûts

Par Alain-Gabriel Verdevoye, à Malaga  |   |  1137  mots
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Le constructeur livrera fin novembre ses premières Logan II et Sandero II. Améliorées sur tous les plans, ces voitures roumaines demeurent au même tarif ! Malgré des équipements supplémentaires. Ingrédients clés : simplicité, une seule plate-forme, 80% de composants partagés entre les modèles et main d'œuvre à bon marché...

Ca y est, elles arrivent! Des voitures très attendues. Des Porsche, Ferrari, BMW? Pas du tout, de simples Dacia roumaines à bas coûts! Renault va livrer à la fin du mois les premières Dacia Logan II et Sandero II. Comptant parmi les principales attractions du dernier Mondial de l'auto parisien, début octobre, les nouveaux modèles du groupe au losange constituent quasiment une révolution. Ils sont en effet beaucoup plus aboutis que les précédentes Logan (quatre portes) et Sandero (cinq portes), avec une carrosserie plus aguicheuse, des intérieurs moins spartiates, des équipements supplémentaires et même un moteur inédit, le «mini» trois cylindres à essence inauguré il y a un mois à peine par la Renault Clio IV! A la clé: 90 chevaux et 116 grammes de C02 seulement émis au kilomètre. Pas mal.

Bien meilleures que les devancières, donc beaucoup plus chères? Pas du tout. Les Logan II et Sandero II demeurent au même prix. Soit à partir de 7.700 euros pour la première, 7.900 pour la deuxième. Ne cherchez pas, il n'y à quasiment rien à ce tarif chez les concurrents! C'est au bas mot 5.000 euros de moins qu'une Renault Clio avec les mêmes moteurs et le même espace intérieur, voire même davantage! En prime : une garantie de trois ans ou 100.000 kilomètres. Et, après les avoir essayées en Andalousie, autant le dire tout de suite : ce sont de bonnes petites autos, polyvalentes, confortables, sûres et habitables. Evidemment, une Renault Clio IV est davantage sophistiquée, plus agréable à conduire. Mais, la différence n'est pas si flagrante. En tous cas, question qualité-prestations-prix, les nouvelles Logan II et Sandero II sont canons. Avec en outre une fiabilité de bon aloi, comme le démontrent les multiples enquêtes auprès des consommateurs, ainsi qu'un faible coût d'entretien, en corollaire. Un nouveau break Logan est prévu, lui, pour 2013.

Alors que Volkswagen commence à peine à réfléchir à un futur modèle à bas coûts, Renault a fait incontestablement figure de pionnier. Une recette qui... marche aussi pour les finances du constructeur. La marge sur la gamme «Entry» de Renault tournerait, selon nos informations, autour de 10%. Pas si loin des marges de BMW ou d'Audi, spécialistes allemands du haut de gamme. La production de la gamme «Entry» représente «le tiers des ventes du groupe Renault. Et nous allons en faire un tout petit peu moins d'un million en 2012, dont 62% sous la marque Renault et 38% sous le label Dacia», explique Arnaud Deboeuf, patron du programme «Entry» de Renault. «Le Brésil et la Russie tirent, mais le marché européen est en difficulté et il y a une inconnue : l'Iran». Renault fabrique cette gamme «Entry» dans onze usines mondiales. Quels sont donc les ingrédients d'une telle réussite que les concurrents envient à Renault? Voici les cinq recettes miracle:

 

1. Reconduction des plates-formes existantes

La première recette, c'est de reprendre la fameuse plate-forme «B Zéro» -devenue "M Zéro" après quelques modifications- inaugurée par la première Logan de 2004. Les nouvelles Logan II et Sandero II «partagent 50% des composants en valeur avec leurs prédécesseurs», souligne Arnaud Deboeuf. Cette reprise d'une plate-forme archi-connue, ainsi que les progrès en efficacité, permettent à «la nouvelle Logan II d'avoir coûté 30% moins cher en développement que la première». N'oublions pas que c'est  pas moins de 3,5 millions de Logan et Sandero qui ont été assemblées à ce jour au total.  Avec les Duster (4x4) et les récents Lodgy (monospace) ou Dokker (fourgonnette et ludospace), on arrive à 4 millions de véhicules au cumul. C'est sûr, ça fait des économies d'échelle! «Le coût de développement des nouvelles Logan II et Sandero II a été sensiblement moins élevé que celui de la Clio IV», renchérit Arnaud Deboeuf.

2. Beaucoup de composants interchangeables

Certes, la plate-forme évolue sur les nouveaux modèles. Mais, les Logan II et Sandero II reprennent les évolutions dont avait bénéficié déjà le monospace Lodgy, lancé au printemps dernier. «70% des pièces sont communes avec le Lodgy. En, les Logan II et Sandero II partagent entre elles pas moins de 80% de composants», poursuit Arnaud Deboeuf. Toute la partie avant jusqu'au pilier central, y compris le pare-brise et les portes avant, ainsi que l'intérieur, sont communs.

3. Modèles plus simples

Les véhicules de la gamme «Entry» sont simples. «Une Sandero II comporte 1.800 pièces, contre 2.300 dans une Clio», assure Arnaud Deboeuf. La gamme elle-même comporte bien moins de variantes, pour éviter le coût de la diversité. «C'est un design plus simple avec moins d'ingénierie», résume le responsable de cette ligne de voitures à bas coûts. Le constructeur a toutefois dû ajouter des nouveaux équipements, comme une direction assistée dès le premier niveau de finition ou le GPS, un nouveau moteur à essence trois cylindres pour faire baisser les émissions de C02 ou prendre en compte de nouvelles normes comme celle concernant le choc piétons... Pour compenser ce surcoût, «nous avons réduit le coût de certaines pièces. Nous avons diminué celui des sièges, des poignées de portes, du câblage où nous avons gagné quelques dizaines d'euros par véhicule». Car, dès le début du projet, «il était clair que nous devions conserver les mêmes prix de vente et les mêmes marges», indique Arnaud Deboeuf.

4. Main d'?uvre bon marché

Evidemment, ces véhicules ne sont produits que dans des pays à main d'?uvre bon marché. Les versions vendues en France de Logan II et Sandero II proviennent de Roumanie. Le Maroc devrait en fournir cependant une partie à partir de l'an prochain. Les nouveaux véhicules seront progressivement mis également en production au Brésil et en Russie, pour les marchés locaux. Entre le site de production roumain de Pitesti et une usine française, le rapport est d'un à quatre pour le salaire d'un opérateur de base, affirme-t-on chez Renault. Entre le Maroc et la France, le rapport est carrément d'un à sept! Ca compte, d'autant plus qu'une production en Roumanie ou au Maroc signifie que nombre de pièces achetées proviennent également de fournisseurs installés sur place.

5. Une distribution également à bas coût

Pour la distribution, Dacia a aussi innové. Au programme: des halls d'exposition tout aussi simples. «Le niveau de publicité est très bas et les remises inexistantes», précise Arnaud Deboeuf. Très réticents au départ, les distributeurs affichent désormais «5% de marge». Déjà ça. Réduction des coûts à tous les étages? Ca marche. Même si l'image de Renault auprès du public n'en sort pas forcément grandie. C'est là l'écueil.