Les salariés de Goodyear sont "mabouls" (Maurice Taylor, patron de Titan)

Par latribune.fr  |   |  513  mots
L'usine Goodyear d'Amiens Nord est menacée de fermeture.
"Mabouls", "pirates", le patron de Titan Maurice Taylor a rhabillé pour l'hiver les salariés de l'usine Goodyear d'Amiens, qui séquestrent depuis lundi après-midi deux dirigeants de l'entreprise.

"C'est fou, les retenir en otage, enfin ! Soyez sérieux ! Il n'y a aucune raison de faire cela, ça ne va rien changer…" Le patron de Titan, un temps intéressé par le rachat de l'usine Goodyear d'Amiens, n'en est pas à sa première déclaration choc.

En février 2013, le PDG du fabricant de pneu américain accédait à la célébrité en France en adressant une lettre au ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg. Il y dénonçait de "soi-disant ouvriers" ne travaillant que "trois heures par jour".

"Mon dieu, ils sont mabouls"

Mais il fait encore plus fort cette fois au micro de la radio RTL, qualifiant carrément ces "soi-disants ouvriers" - du moins ceux qui retiennent deux de leurs dirigeants depuis lundi - de "mabouls" :

Ce ne sont pas les grands patrons, ils ne peuvent rien faire. Vous savez ce que ça montre au reste du monde ? Mon dieu, ils sont mabouls. On devrait rentrer et faire arrêter ces pirates mais vous savez que ça ne va pas se passer, car c'est comme ça en France.

Aux Etats-unis, affirme en effet Maurice Taylor, les choses se seraient passées différemment :

"Ils prennent les gens en otage : aux Etats-Unis c'est du kidnapping. S'ils faisaient ça là-bas, ils iraient en prison. Pourquoi ne vont-ils pas, masqués, faire un braquage dans une série de banques françaises ? Ainsi, ils pourraient racheter Goodyear… S'ils pensent qu'ils sont si intelligents..."

Lundi, un compte Twitter géré par du personnel du site Goodyear d'Amiens Nord tweetait que "la vraie lutte commen(çait) aujourd'hui", alors que le secrétaire adjoint CGT du comité de l'entreprise indiquait à l'AFP que le directeur de production de l'usine, Michel Dheilly, et le directeur des ressources humaines (DRH) de l'usine, Bernard Glesser, étaient retenus dans les locaux de l'usine contre leur gré.

"Quelques jours, quelques semaines"

Les syndicats entendaient ainsi faire appliquer une version "améliorée" d'un plan de départs volontaires abandonné en 2012. Le 31 janvier 2013, la direction de l'entreprise avait annoncé sa décision de fermer l'usine Amiens-Nord, où sont employées 1.173 personnes.

"L'emploi est perdu, puisque depuis un an on perd tous nos jugements", a expliqué à Reuters le délégué CGT Franck Jurek. "Alors on a décidé avec les ouvriers de changer de tactique (...) pour gagner le plus de fric possible."

"On va aller jusqu'au bout du processus", a-t-il ajouté. "Ça peut durer encore quelques heures, ça peut durer quelques jours, quelques semaines. Tant qu'on n'aura pas gain de cause, ces deux personnes (...) resteront avec nous."

L'initiative pourrait toutefois être écourtée par la désignation par la justice d'un huissier "pour s'assurer de la sécurité et de la libre circulation des biens et personnes", selon les termes employés par l'AFP mardi midi.

Sur Radio Classique, le n°1 de FO Jean-Claude Mailly avait auparavant jugé que la séquestration de dirigeants n'était "pas la bonne méthode", mais que, "quand ça se passe correctement sur le plan humain, ce n'est pas non plus un drame".