Comment Tavares va faire des économies chez PSA

Par Alain-Gabriel Verdevoye, à Genève  |   |  894  mots
Carlos Tavares (à gauche) sera président du directoire de PSA à la place de Philippe Varin (à droite) le 31 mars. / DR
PSA veut réduire le nombre de modèles à son catalogue pour éviter les dispersions. Carlos Tavares, son futur dirigeant, a aussi détecté de gros gisements de productivité dans les usines. Les sites slovaque, espagnol (Vigo) et portugais sont appelés un jouer un rôle majeur. Pour réduire les coûts.

« Il n'est pas impossible de gagner de l'argent en Europe », affirme Carlos Tavares, le nouveau patron opérationnel de PSA, qui deviendra le président du directoire du groupe au 31 mars.

« L'augmentation de capital permet d'assurer la continuité des investissements dans la société. Mais il faut que l'entreprise fasse des profits minima. Sinon, il faudrait vite une nouvelle augmentation de capital avec des conséquences graves pour l'entreprise ».

Mais comment donc réduire encore les coûts, pour que PSA fasse enfin des profits ?

« PSA doit réduire le gaspillage ». Tout d'abord, il « faut faire un nombre plus limité de modèles. On a trop de voitures au catalogue. Il faudra être plus sélectif pour mieux allouer nos ressources créatrices », souligne au salon de Genève l'ex-bras droit de Carlos Ghosn chez Renault.

« A l'international aussi, on n'a pas besoin de mettre autant de voitures au catalogue en Russie ou en Amérique latine ».

« Le niveau des remises est trop élevé sur les marchés. Si on se disperse moins et qu'on se concentre sur des voitures encore meilleures dont le client veut, ça permet de soutenir le niveau des prix », argue-t-il.

Encore du travail dans les usines

Carlos Tavares « a visité sept usines ces dernières semaines ». Et, sur ces sites industriels, il y a « a encore un énorme potentiel d'amélioration, dans l'organisation, les coûts de l'énergie, les rendements, le nombre de retouches à effectuer en bout de chaîne ».

Le groupe automobile français avait annoncé le mois dernier son intention de produire à l'avenir ses petites voitures « généralistes » hors d'Europe occidentale. PSA Peugeot Citroën n'a évidemment pas de projet à moyen terme de construire une nouvelle usine hors d'Europe de l'ouest.

« Pour l'instant ce n'est pas du tout sur la table. Notre capacité de financement n'est pas très élevée », rappelle Carlos Tavares, même si PSA a ramené sa consommation de cash de 3 milliards en 2012 à 426 millions l'an dernier.

D'ailleurs, « nous avons des usines en périphérie de notre pays qui sont à des niveaux de coûts compétitifs comme Trvana (Slovaquie), Vigo (Espagne) et Mangualde (Portugal). Or, elles ne sont pas saturées ».

Le site slovaque produit actuellement environ 250.000 Peugeot 208 et Citroën C3 Picasso, pour une capacité de 350.000 unités. Et Vigo, qui fabrique des utilitaires et le monospace C4 Picasso de Citron, tourne « à 60% de son potentiel » seulement.

Or, « il faut les saturer », souligne le dirigeant, qui doit dévoiler à la mi-avril un nouveau plan stratégique, qui courra jusqu'en 2016 avec « quelques perspectives au-delà ». PSA, qui a cessé de produire les petites Citroën C3 en octobre dernier dans son site d'Aulnay-sous-Bois en région parisienne, s'est engagé à ne pas fermer d'autre site en France jusqu'à 2016.

Pertes hors d'Europe

Hors d'Europe, il y a aussi du travail.

« On perd de l'argent en Russie où on a une usine limitée qui a trop parié sur des chiffres de productions trop optimistes ». Au Brésil aussi, « il y a des choses à faire. Il faut aligner les coûts d'achats, des produits, avoir une meilleure rentabilité industrielle ».

Maxime Picat, Directeur général de la marque Peugeot, renchérit :

« il faut plus d'intégration locale en Amérique latine où on est déficitaires ».

En clair, il faut produire de pièces localement pour échapper aux droits de douane et aux fluctuations de changes. PSA perd de l'argent en Europe, mais aussi sur la plupart de ses grands marchés extérieurs. Et, en Chine, les dividendes de sa co-entreprise DPCA sont dérisoires.

Du potentiel en R&D

Dans la recherche et le développement, PSA a également du pain sur la planche, même si beaucoup de travail a déjà été fait.

« Nous avons mis en place une politique de 83 modules, qui représentent le quart du prix d'une voiture. Cela va des armatures de sièges à la télématique, en passant par les modules de plates-formes, de groupes motopropulseurs. Nous poursuivons le déploiement de cette politique », souligne Gilles Le Borgne, patron de la R&D de PSA. But : réduire le coût de la diversité et réaliser des économies d'échelle.

« On fait aussi des socles de communauté (de composants) pour des silhouettes de véhicules différents pour Peugeot, Citroën, DS et Opel (NDLR : marque de GM avec qui PSA développe des modèles conjoints) ».

Enfin, PSA limite désormais les variantes d'assemblages de moteurs et de boîtes. Afin de réaliser davantage de synergies.

Déficit encore en 2013

PSA a encore affiché l'an dernier une perte opérationnelle pour les activités automobiles de 1,04 milliard d'euros. Soit une marge négative de 2,9%. La perte nette du groupe a atteint 2,31 milliards. Et la dette nette du constructeur dépasse les 4,1 milliards.

La firme tricolore a annoncé à la mi-février un accord stratégique permettant au groupe public chinois Dongfeng de prendre 14% de PSA à travers une augmentation de capital de 3 milliards d'euros. La famille Peugeot détiendra également 14% du capital et l'Etat français une part équivalente. PSA, qui vient d'obtenir le trophée de la « voiture de l'année » pour sa compacte Peugeot 308, apparaît prêt à redémarrer. A condition qu'il ne soit pas trop tard.

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