Affaire des diesels Renault : un an d'enlisement médiatique et judiciaire

Par Nabil Bourassi  |   |  721  mots
Le constructeur plaide la bonne foi et réfute toute présence de logiciel tricheur.
En janvier 2016, la DGCCRF perquisitionnait les locaux Renault, sur fonds de scandale sur des motorisations diesel truquées. Un an plus tard, son enquête aboutit à une saisine officielle de juges d'instruction qui vont désormais enquêter sur les agissements du constructeur automobile français en matière de dépollution. Un véritable cauchemar pour Renault qui plaide la bonne foi, mais que d'aucuns accusent d'avoir volontairement triché...

L'année commence mal...Cela fait deux années de suite que Renault clame la même rengaine. Cette année, elle survient avec l'ouverture d'une enquête officielle de la justice française concernant le sérieux des équipements antipollution de ses voitures diesel. Cette histoire démarre il y a tout juste un an, lorsque des syndicalistes CGT révèlent que la DGCCRF a effectué une perquisition dans les locaux de Renault dans le cadre de leurs investigations sur les écarts d'émissions de polluants. Quatre mois après le scandale des diesels truqués de Volkswagen, cette annonce avait provoqué un effondrement de l'action Renault : -22% en une seule journée.

Pas de logiciels tricheurs

Quelques jours après, le 14 janvier, la commission Royal, formée au lendemain du scandale Volkswagen pour contrôler la réalité des émissions de Nox et Co2 des voitures diesel, convoque des cadres de Renault pour s'expliquer sur les écarts d'émissions de pollution constatés sur le Captur. Face à l'emballement médiatique, Ségolène Royal en personne a dû préciser que cette convocation n'était pas liée à la découverte d'un logiciel tricheur.

De son côté, Renault se confond en communiqués pour expliquer qu'il avait lui-même identifié un problème de calibrage du système EGR (qui permet la recirculation des gaz d'échappements dans le moteur afin d'être brûlés et ainsi neutralisés), qui annulait l'efficacité du filtre à particules. Le problème avait été identifié en septembre et Renault avait indiqué avoir déjà engagé sa modification.

Pour faire bonne mesure, la marque au losange avait également annoncé qu'il renonçait au NoxTrap pour adopter la technologie SCR. Plus cher, le SCR est réputé plus efficace que le NoxTrap pour capturer et neutraliser les particules fines. Certains avaient suggéré que Renault aurait volontairement calibré l'EGR de sorte qu'il ne gêne pas l'agrément de conduite à froid.

Une enquête allemande renforce les soupçons

Ce soupçon va être renforcé par une enquête du gouvernement allemand dont quelques fuites sont publiées par l'AFP en avril. D'après une source proche du dossier, les autorités de contrôle allemandes ont constaté que le système de filtration des émissions polluantes est systématiquement désactivé quand la température extérieure descend sous un certain seuil. Une procédure illégale en droit communautaire.

En août, le Financial Times publie un article qui va avoir l'effet d'une bombe en France. Le quotidien économique britannique révèle que le gouvernement français aurait volontairement occulté les résultats de la commission Royal visant les modèles de la marque Renault. Le Financial Times écrit même que Renault aurait également eu recours à un logiciel de triche sur ses motorisations diesels, à l'image de Volkswagen. Le journal s'appuie sur les témoignages de trois membres, restés anonymes, de cette commission. Là encore, c'est le système de dépollution du Captur qui serait en cause. Pour certaines associations environnementales, seul un logiciel est capable de désactiver les systèmes de dépollution en cas de baisse de température. La suspicion autour de Renault se généralise et cette fois, c'est l'intégrité de la commission Royal qui est remise en cause.

La commission s'insurge contre les accusations de complaisance à l'égard de Renault. Elle reconnait néanmoins ne pas avoir la compétence pour déceler la présence d'un logiciel et avoir ainsi mandaté un laboratoire spécialisé pour approfondir les investigations.

Renault plaide sa bonne foi

En attendant, l'enquête de la DGCCRF se poursuit. Elle décide de transmettre, le 10 novembre, ses conclusions à la Justice qui saisit le parquet de Nanterre. C'est cette saisine qui aboutira à l'ouverture, vendredi 13 janvier, d'une enquête préliminaire par des juges d'instruction.

Renault, lui, s'est toujours contenté de répéter qu'il "respecte la législation française et européenne (...) les véhicules Renault ont tous et toujours été homologués conformément à la loi et aux réglementations. Ils sont conformes aux normes en vigueur (...) et ne sont pas équipés de logiciels de fraude aux dispositifs dépollution". Le constructeur devra désormais convaincre la justice de sa bonne foi.