Peugeot : pourquoi la nouvelle 208 sera aussi importante que la 3008

Par Nabil Bourassi  |   |  914  mots
(Crédits : DR)
La marque automobile française lance la nouvelle génération de la célèbre citadine. Placé sur un segment extrêmement concurrentiel et peu rentable, la 208 revêt toutefois des enjeux industriels et économiques majeurs pour Peugeot. Explications.

Pas question de ralentir le rythme... Peugeot poursuit sa stratégie produit fondée sur deux piliers : un lancement par an, chacun devant symboliser la montée en gamme de la marque. Mais après une salve de produits plutôt situés sur les segments supérieurs (3008, 5008, 508), la marque au lion renoue cette année avec l'entrée de gamme. Avec la nouvelle 208, Peugeot joue une partie à la fois difficile, mais où l'enjeu de repositionnement sera plus aisé.

« La guerre sera totale »

Le segment des citadines est le plus concurrentiel en Europe... Il l'est encore plus depuis que le segment des micro-citadines (Twingo, 108....) est déserté. Les marges sont si serrées que Peugeot a décidé de transférer sa production de l'usine de Poissy (Ile-de-France) vers son usine slovaque. En outre, cette catégorie de voitures s'exporte très peu en dehors du Vieux Continent, les volumes doivent donc se faire ici. Mais c'est aussi un segment en partie dominé par les marques françaises notamment la Renault Clio. 2019 sera d'ailleurs leur année puisque Renault et Peugeot lancent simultanément le renouvellement de leur championne respective : la Clio, numéro un en Europe, et la 208 donc. « La guerre sera totale », prévient Guillaume Clerc, chef de projet 208.

Pour Peugeot, la mission de la nouvelle 208 poursuit trois objectifs. Un objectif de prestige qui est de ravir la place de numéro un à sa compatriote en France, voire aussi en Europe. À condition toutefois de vaincre la Volkswagen Polo et la Ford Fiesta.

« On fera tout pour prendre la place de numéro un, mais nous ne sacrifierons pas nos marges », précise celui qui a mené le projet 208.

Car la marque au lion, et c'est le second objectif, veut améliorer son « mix produit », c'est-à-dire le niveau de finitions et des options prises par les clients et qui sont sources de très forte rentabilité. Avec la nouvelle 208, Peugeot vise en moyenne 15% de ventes en finition GT Line, la plus cher. C'est quasiment deux fois plus que la version précédente.

 Le repositionnement stylistique de Peugeot

La marque emmenée par Jean-Philippe Imparato espère reproduire le même succès enregistré avec les 3008 et 5008 qui ont affiché des taux de finition supérieurs records, jusqu'à 85% dans les premiers mois après leur sortie et qui est resté à un niveau « jamais vu » de plus de 50%. Le repositionnement stylistique de Peugeot (plus agressif et plus radical) a créé une très juteuse dynamique de marque. « L'enjeu pour nous est de remporter le leadership en termes d'image de marque qui est la meilleure source de mix-produit élevés » complète Guillaume Clerc.

Sauf que la cinquième édition de cette icone de l'automobile française vendue à 18 millions d'unités depuis son lancement en 1983 n'empruntera pas tous les codes qui ont fait le succès du 3008, le SUV le plus vendu en France. « Nous sommes sur un segment plus large et nous devons répondre à une clientèle plus diverse, des jeunes, des cadres, des hommes, des femmes, des retraités... C'est vrai que la 208 a plus de rondeurs qu'un 3008, nous sommes clairement sur un autre registre d'expression que sur les SUV » explique Guilaume Clerc.

Mais la 208 a la même ambition premium et reprend le tableau de bord digital du célèbre SUV appelé i-Cockpit, mais avec une version améliorée puisqu'elle incorpore un élégant effet 3D.

Enfin, le troisième objectif, et pas le moindre, de la nouvelle citadine de Peugeot est de réaliser une percée dans l'électromobilité. En effet, la 208 sera disponible dans une version 100% électrique (contrairement à sa rivale de chez Renault qui va plutôt miser sur de l'hybridation laissant à la Zoé le soin d'occuper le terrain). Il s'agira de la première voiture électrique conçue par le groupe (la Peugeot Ion est fabriquée par Mitsubishi).

Une fantastique opportunité pour respecter les objectifs

L'enjeu est de permettre au groupe PSA de rester dans les clous des objectifs de CO2 qui entreront en vigueur le 1er janvier 2021. Chaque groupe automobile devra respecter une moyenne de 95 grammes par voiture sur l'ensemble de ses ventes annuelles, sous peine d'amende conséquente. Pour rappel, la moyenne actuelle de l'Union européenne est de 118 grammes... La Commission européenne a toutefois accepté de doubler le bonus pour chaque voiture 100% électrique. Chez Peugeot, on estime que la 208 est une fantastique opportunité pour respecter les objectifs. D'abord parce que naturellement, la 208 est une voiture peu émettrice de CO2, ce à quoi il faut ajouter les volumes conséquents propres à cette catégorie, la contribution est donc mathématiquement importante. Mais cette nouvelle génération ne sera pas davantage économe en CO2 par rapport à la précédente. Plus longue et plus lourde, la marque s'est plutôt attachée à ce qu'elle reste dans les mêmes niveaux d'émission, ce qui est déjà un exploit en soi. De plus, l'État-major de la marque estime que le seuil de 15% des ventes en version électrique dès le lancement est à portée de main.

 Peugeot a prévu un volume de production de 300.000 voitures par an réparties entre deux usines dont celle de Tarnava (Slovaquie) et de Kenitra, au Maroc qui doit être inaugurée cette année (50.000 unités prévues pour la 208 sur ce site). C'est un minimum pour un nouveau modèle qui s'est encore vendu à 355.000 exemplaires en 2018 et plus de 500.000 en 2017 (chiffres monde).