Renault contraint à un retrait partiel en Chine

Par Nabil Bourassi  |   |  559  mots
Renault compte sur le K-ZE pour se positionner sur le très dynamique marché des voitures électriques chinois. (Crédits : Renault)
Le groupe automobile français fait marche arrière en Chine, sur ses activités de voitures thermiques. Il gardera ses activités de véhicules utilitaires, mais également de voitures électriques. Cette décision reflète les grandes difficultés de Renault dans un contexte de flottement stratégique majeur.

C'est une annonce spectaculaire que Renault vient de faire à un moment critique de l'histoire de l'industrie automobile. Le groupe automobile français a annoncé le redimensionnement de sa stratégie en Chine, pays où il s'est implanté très tardivement... il y a moins de quatre ans.

Fin des Koleos et Kadjar en Chine

Le groupe renonce à sa joint-venture avec DongFeng Motors, qui commercialisait sa gamme classique badgée au losange avec des Koleos et Kadjar. Le groupe automobile chinois, également actionnaire de PSA à hauteur de 13%, va ainsi racheter la part du français. Ce dernier annonce qu'il va se concentrer sur les véhicules utilitaires et sur les voitures électriques.

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Il poursuit donc sa co-entreprise avec le groupe Brilliance pour promouvoir sa gamme d'utilitaires qui ont fait de Renault la marque leader en Europe en volume. Avec 162.000 livraisons en 2019 pour un marché de 3,3 millions d'unités en Chine, Renault estime être en meilleure posture que sur le marché classique du thermique (180.000 immatriculations pour 28 millions de voitures vendues en 2019). En outre, le marché du véhicule utilitaire est réputé plus rentable.

Renault lorgne le marché électrique chinois

Renault suit la même logique pour la voiture électrique puisqu'il veut s'appuyer sur son leadership et son expérience afin de creuser l'écart sur le marché le plus dynamique du monde en matière d'électrification. Le groupe français estime que les voitures électriques pourraient représenter jusqu'à 25% du marché chinois d'ici 2030. Avec le lancement du K-Ze en 2019, un modèle moderne et très accessible, le groupe estime avoir enclenché une dynamique commerciale vertueuse. Il espère d'ailleurs amplifier cette dynamique avec d'autres modèles à venir. Une voiture mondiale, conçue sous le label Dacia, et déjà présentée sous forme de concept-car, devrait arriver en 2021. JMEV, du nom de la coentreprise de Renault sur la partie électrique, espère couvrir 45% du marché électrique chinois à terme.

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Il semblerait que Renault traverse une série de vents contraires qui l'obligent à redimensionner sa stratégie. En Europe, ses ventes ne cessent de baisser, tandis qu'en Chine, elles n'ont jamais vraiment décollé. Renault est effectivement arrivé au moment où le marché chinois se retournait en faveur des marques d'entrées de gamme. A cela, il faut ajouter la très grave crise managériale qui dure depuis déjà un an et demi et s'est traduite par l'arrestation de son PDG historique, Carlos Ghosn en novembre 2018, puis l'éviction brutale de son directeur opérationnel, Thierry Bolloré en novembre 2019. Cette crise de gouvernance n'a pas permis au groupe de gérer les ajustements stratégiques nécessaires au moment où le marché s'est largement essoufflé en 2019. Cette situation s'est largement aggravée avec la crise du coronavirus, au point que Renault est contraint de solliciter massivement (jusqu'à 5 milliards d'euros) de prêts garantis par l'Etat français.

Il faudra néanmoins encore attendre l'arrivée de son futur directeur général afin de stabiliser le management et espérer que Renault se donne enfin les moyens d'impulser une nouvelle stratégie vertueuse. Mais Luca de Meo, ancien PDG de Seat, n'arrive pas avant le 1er juillet...

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