Volkswagen s'interroge sur l'avenir du diesel

Par Nabil Bourassi  |   |  682  mots
Le nouveau Volkswagen dont le plan stratégique a été publié la semaine dernière doit faire la part belle aux voitures 100% électriques.
Le Pdg du groupe allemand juge que cette technologie est désormais coûteuse et contrainte par la réglementation. Il estime que le développement de l'électromobilité est devenue une alternative de plus en plus crédible au diesel.

C'est une nouvelle brèche qui s'ouvre. Le patron du groupe Volkswagen s'est officiellement interrogé sur l'opportunité de poursuivre le développement des technologies diesel. Dans le quotidien allemand Handelsblatt, Matthias Müller a déclaré : "Au bout d'un moment, la question va se poser de savoir si nous devons dépenser encore beaucoup d'argent pour poursuivre le développement du diesel."

"Nous savons qu'une législation renforcée sur les émissions doit venir en 2020. Nous nous doutons de ce qui suivra cinq ou dix ans plus tard. Il est ainsi déjà prévisible aujourd'hui que la réduction des gaz polluants pour le diesel va devenir énormément coûteuse et sophistiquée. En même temps, l'électromobilité devient meilleure marché", a pointé le dirigeant.

"Le diesel est toujours très apprécié de nos clients en Allemagne et en Europe", a toutefois assuré M. Müller.

La question du diesel est un sujet épineux surtout en Europe qui en avait fait une priorité pour lutter contre les émissions de CO2. Mais depuis la déclaration du diesel comme carburant cancérogène par l'Organisation mondiale de la santé, notamment en raison de ses fortes émissions de particules fines, les autorités européennes ont peu à peu changé de braquet.

Une technologie trop européenne, trop cher

En France, la part des ventes de diesel a baissé de 20 points entre 2008 et 2015 passant de 77% à 57% des ventes. Pour les constructeurs, cette technologie est beaucoup trop européenne alors qu'ils souhaitent standardiser leurs motorisations au niveau mondial. Aux Etats-Unis, les ventes de diesel représentent moins de 4% des ventes nationales, tandis qu'en Chine, le diesel est quasiment inexistant. Au Brésil, le diesel est interdit aux particuliers. Il ne représente que 1% du marché japonais. Les constructeurs pourront toujours écouler leurs moteurs en Inde, un marché très "diésélisé" (50% des ventes). Autre écueil, les diesels ne sont plus disponibles sur les petites voitures de type Twingo, 106 ou C1 parce qu'ils impliquent de nouveaux équipements beaucoup trop chers (filtres à particules, SCR...).

Les marques françaises continuent d'y croire

Les constructeurs automobiles français, eux, ne semblent pas encore prêts à adopter une nouvelle doctrine. Ils restent arc-boutés, en tout cas dans leur discours, sur les avantages du diesel. Ils jugent que c'est la seule technologie qui doit permettre d'atteindre les objectifs de réduction d'émissions de CO2. Le diesel fait également parti d'une forte culture interne. Ainsi, Renault a annoncé en septembre 2015 au salon de Francfort, le lancement d'un moteur hybride diesel, et ce, malgré l'échec cuisant de cette solution chez PSA.

|Lire aussi: Diesel ou essence: pourquoi les constructeurs français font semblant d'hésiter

Les constructeurs français continuent à estimer que les gros utilitaires continueront à opter en grande majorité pour les diesels, ainsi que les flottes d'entreprises qui roulent beaucoup. Mais les constructeurs attendent désormais peu de gains d'efficience sur les diesels, en tout cas pas assez pour amortir de nouveaux lourds investissements.

Volkswagen veut se défaire de la culture du diesel

Pour Matthias Müller, le groupe Volkswagen a payé trop cher son obstination dans le diesel, notamment en tentant de l'imposer au marché américain quitte à installer un logiciel de triche en vue d'améliorer artificiellement ses performances en matière d'émissions polluantes. Un scandale dont la facture finale, même s'il est encore impossible de le chiffrer, pourrait atteindre des dizaines de milliards de dollars.

Matthias Müller, qui a promis de changer la culture du groupe, pourrait ainsi faire tomber le dogme du tout diesel, après avoir abattu celui de la course à la taille. L'annonce la semaine dernière d'une nouvelle stratégie corrobore d'ailleurs cette idée puisque Volkswagen veut lancer pas moins de 30 modèles 100% électriques dans les dix prochaines années avec l'ambition que cette technologie représente 25% des ventes à horizon 2025.

Reste à savoir si avec cet abandon, Volkswagen n'enterre pas définitivement l'avenir du diesel. Il restera bien quelques marques pour défendre cette technologie, mais pas de l'envergure du deuxième groupe automobile mondial.