Mediator : la polémique enfle encore

Par latribune.fr  |   |  539  mots
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Des médecins de Bourgogne auraient alerté dès mars 1998 l'Agence du médicament sur le coût et les effets du Mediator. La caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) compte se retourner contre les laboratoires Servier si des victimes du Mediator décidaient de mener des procédures juridiques.

Selon le Figaro, un rapport de médecins de l'Assurance maladie de la région Bourgogne alertait dès mars 1998 l'Agence du médicament du coût très élevé pour la collectivité du Mediator (ce médicament des laboratoires Servier, destiné aux diabétiques en surpoids mais qui dont l'usage a été détourné en coupe-faim) ainsi que de son "efficacité" et de sa "sécurité". Rien que pour la région Bourgogne, cela coûtait à la Sécurité sociale 4 millions de francs par an (600.000 euros).

Les médecins de l'Union régionale des caisses d'assurance-maladie (Urcam) Bourgogne se posaient des questions non seulement sur ur "l'efficacité" mais aussi sur "la sécurité" de la molécule des laboratoires Servier en ces termes : "Bien que faisant partie d'une liste de substances anorexigènes...le Mediator ne fait pas l'objet d'une prescription restreinte. On ne peut que s'étonner de cet état de fait qui prend une dimension particulière lorsque l'on pose parallèlement la question de l'utilité réelle du Mediator sur un plan médical".
 

Ils recommandaient même dans un premier temps "un reclassement dans le groupe des amphétamines avec la législation qui s'y rapporte (prescription restreinte)"  et au delà disaient "s'interroger sur la légitimité à rembourser un médicament dont les indications thérapeutiques ne sont pas respectées et ne répondent donc pas à un souci de qualité, de sécurité et d'efficacité".


Voilà une nouvelle pièce à verser à ce dossier qui s'alourdit de jour en jour. Ce week-end, on apprenait que la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) était prête au conflit judiciaire avec les laboratoires Servier, fabricant du Mediator, commercialisé en France à partir de 1976 jusqu'à son retrait du marché, en 2009. Utilisé par cinq millions de personnes, il pourrait être responsable de 500 à 2000 décès et aurait coûté 423 millions d'euros en dix ans à la Sécurité sociale. Quelque 3.500 personnes auraient été hospitalisées pour des lésions cardiaques, selon la Cnam.

Pour Frédéric Van Roekegem, directeur de la Cnam, "les enjeux financiers sont tels que nous avons décidé d'organiser un suivi national et une coordination de l'ensemble des actions des caisses" d'assurance maladie. Dans d'éventuelles procédures juridiques ouvertes par des victimes ou des parents de victimes, "les caisses feront valoir leurs droits", a-t-il précisé, et ce afin que "la Sécurité sociale puisse se faire rembourser des sommes qui auraient été prises en charge à la suite de problèmes consécutifs à la prescription du Mediator".

Le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, avait annoncé vendredi sur RTL que tous les patients ayant pris du Mediator bénéficieraient d'une "prise en charge intégrale par l'assurance maladie". Il a invité les malades à consulter leur médecin pour déceler d'eventuelles complications liées à la prise du médicament. Quelques jours plus tôt, il avait évoqué de graves défaillances dans le fonctionnement du système du médicament en France. Un numéro vert - le 0 800 880 700 - a été mis en place par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) le 16 novembre pour permettre aux patients de s'informer sur les risques liés à la prise du Mediator.