Cancer, AVC... pourquoi ces maladies coûtent de plus en plus cher à la Sécu

Par Jean-Yves Paillé  |   |  715  mots
Les cancers ont coûté 14,1 milliards d'euros au régime général de l'Assurance maladie en 2015.
Entre 2012 et 2015, les dépenses du régime général de l'Assurance maladie dédiées aux pathologies et aux hospitalisations ponctuelles ont augmenté de 10,2 milliards d'euros à 133,6 milliards d'euros par an. En cause, le prix des nouveaux traitements et la hausse des effectifs dans certaines maladies, notamment.

"La tension persiste dans notre système de santé." Tel est le constat effectué par Luc Barret, médecin au Conseil national de l'Assurance maladie, lors de la présentation d'un rapport de l'institution sur les détails de ses dépenses de santé entre 2012 et 2015;

Cette dernière a analysé les coûts de prise en charge des assurés pathologie par pathologie en y ajoutant les hospitalisations ponctuelles pour 57 millions de bénéficiaires du régime général. Une cartographie qui pourrait permettre à l'institution améliorer l'efficience de la prise en charge des maladies.

Les dépenses supplémentaires tirées à la hausse par les cancers

On apprend dans ce rapport que les dépenses du régime général ont atteint 133,6 milliards d'euros en 2015, soit 10,2 milliards d'euros de plus qu'en 2012 (+8%). Trois groupes de pathologies sont à l'origine plus d'un tiers des dépenses du régime général : les cancers, les maladies carcardioneurovaculaires (AVC, embolies, insuffisances cardiaques,...), les maladies psychiatriques (et les remboursements de psychotropes). À eux trois, ces groupes de pathologie ont généré 4 milliards des 10,2 milliards d'euros de dépenses supplémentaires.

En première ligne, les cancers ont coûté 14,1 milliards d'euros à l'Assurance maladie en 2015, soit une hausse de 1,568 milliard d'euros en trois ans, dans le cadre du régime général. La prise en charge pour les cancers en phase active (en phase de traitement), touchant un million de personnes en 2015, a augmenté pour atteindre en moyenne 11.400 euros par an par patient. "Pour les cancers du seins, par exemple, les nouvelles immunothérapies ont fait croître le coût de la prise en charge", juge Luc Barret. Celle-ci est passée de 11.288 euros par patient en 2012 à 12.035 euros en 2015 pour cette affection.

Les dépenses des hôpitaux inscrites dans les listes en sus (prise en charge par l'Assurance maladie de dépenses non-incluses dans le forfait de soins des établissements hospitaliers) ont bondi de 22% entre 2014 et 2015 pour atteindre 2,5 milliards d'euros. Cela est dû à l'arrivée de plusieurs nouveaux anticancéreux basés sur l'immunothérapie, inscrit dans la liste en sus ces dernières années, à l'instar de l'Avastin de Roche, un traitement contre le cancer du sein.

De plus en plus de patients touchés par des maladies cardiovasculaires

En ce qui concerne les maladies cardioneurovasculaires, le coût moyen de prise en charge par patient et par an stagne à 3.500 euros. Mais l'augmentation du nombre de malades (3,8 millions de personnes, soit 3,1% de plus en trois ans) a boosté les dépenses de soins liées à ces maladies. Elles ont augmenté de 1,206 milliard d'euros en trois ans à 13,2 milliards d'euros.

Enfin, les dépenses dédiées aux maladies psychiatriques et aux psychotropes sont passées à 19,3 milliards d'euros par an, soit 1,279 milliard de plus qu'en 2012. Cela est dû à une hausse des coûts moyens de prise en charge, alors que le nombre de personnes malade a légèrement diminué. "C'est une tendance que l'on retrouve dans d'autres pays", estime Christelle Gastaldi-Ménager, directeur adjoint du département "Études sur les pathologies et les patients", de la Caisse nationale de l'Assurance maladie.

Pour les troubles psychotiques par exemple, la dépense annuelle moyenne remboursée est chiffrée à 10.300 euros par personne en 2015 (régime général + sections locales mutualistes), avec une forte part de dépenses hospitalières (3,8 milliards d'euros par an sur 4,9 milliards de dépenses totales pour cette maladie). En 2014, l'institut Montaigne déplorait "le poids excessif de l'hospitalisation complète" dans la prise en charge de ces maladies.

580.000 personnes supplémentaires malades ou hospitalisées en 2020

Ces dépenses vont-elles continuer à croître à l'avenir ? La Caisse nationale d'Assurance maladie a choisi de ne pas donner de projection chiffrée sur les coûts des prises en charge des pathologies, un montant prévisionnel fixé chaque année par l'Objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam). Elle a toutefois estimé que "580.000 personnes supplémentaires auront une pathologie, une hospitalisation ponctuelle ou un traitement au long cours, alors qu'elles n'en avaient pas en 2015". Cette croissance du nombre de malades devrait néanmoins ralentir par rapport aux dernières année, précise la Cnam. Une chose est sûre selon Luc Barret : "La tension perdurera avec le vieillissement de la population."