Énergie : asphyxié par l'envolée des prix, le verrier Duralex baisse sa production et met ses employés au chômage partiel

Par latribune.fr  |   |  862  mots
(Crédits : Reuters)
Asphyxiée par la hausse des prix de l'énergie, le verrier Duralex va mettre son four en veille durant minimum quatre mois à partir de novembre et placer l'ensemble de ses salariés en chômage partiel pour économiser de l'énergie et préserver ses finances. Le groupe verrier Arc a été contraint, quant à lui, de placer ce jeudi une partie de ses salariés en chômage partiel.

Duralex sed lex ou plutôt nécessité fait loi. Le verrier Duralex va mettre son four en veille durant minimum quatre mois à partir de novembre et placer l'ensemble de ses salariés en chômage partiel. Il a indiqué ce jeudi affronter « depuis quelques mois des conditions financières de production conjoncturelles très défavorables, uniquement liées au prix de l'énergie ». Son président, José-Luis Llacuna, explique : « Produire au tarif de l'énergie au prix du jour générerait des pertes intenables. Limiter notre consommation d'énergie dans la période qui s'amorce nous permet donc de préserver l'activité et l'emploi de Duralex. »

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La production au sein de l'usine historique de Duralex, située à la Chapelle-Saint-Mesmin dans le Loiret, ne devrait reprendre qu'au deuxième trimestre 2023, la société disposant d'une « couverture tarifaire déjà contractée sur l'électricité ». Le spécialiste du verre trempé affirme disposer de stock suffisant pour poursuivre « normalement » son activité commerciale pendant la mise en veille de son four, qui répond aussi aux appels du gouvernement à limiter les consommations d'énergie industrielles durant l'hiver. Verres des restaurants scolaires, objets design de la boutique du MoMA de New York, contenants à whisky pour 007 dans Skyfall: les créations Duralex sont connues dans le monde entier et l'entreprise observe « des ventes en croissance », selon le communiqué. La verrerie de la banlieue d'Orléans avait été rachetée in extremis en janvier 2021, après avoir été placée en redressement judiciaire quelques mois auparavant, par International Cookware (Pyrex), devenu la Maison Française du Verre en début d'année. Créée en 1945 par Saint-Gobain, elle emploie 250 salariés et a réalisé en 2021 un chiffre d'affaires de 23,4 millions d'euros.

Le groupe verrier Arc est aussi dans la tourmente

Son confrère, le groupe verrier Arc, est aussi dans la tourmente. Il a placé jeudi une partie de ses salariés en chômage partiel pour les mêmes raisons. Il s'agit de « deux jours par semaine d'activité partielle » pour « 1.600 personnes à partir du 1er septembre jusqu'au mois de décembre » au moins, souligne le directeur de la communication de l'entreprise, Guillaume Rabel-Suquet. Sont concernés « les fonctions transversales et les fonctions supports et administratives », mais « il est fort probable qu'on mette en place de l'activité partielle  pour les ouvriers de production » dans les prochaines semaines. Les effectifs affectés par cette mesure continueront à être rémunérés à hauteur 84% de leur salaire net.

C'est une « grosse claque pour le personnel qui s'attendait plutôt, au regard de l'inflation, à avoir une augmentation de salaire », souligne Frédéric Specque, délégué central CGT. « Aujourd'hui plus personne ne veut acheter des articles de vaisselle, de verrerie. Les gens mettent plutôt leur argent sur le chauffage qu'ils vont payer cet hiver, le gasoil qu'ils vont mettre dans leur voiture. »

Installé près de Saint-Omer (Pas-de-Calais), le groupe emploie quelque 7.800 personnes, dont 5.000 en France. Il commercialise ses produits sous cinq principales marques : Luminarc, Arcopal, Cristal d'Arques Paris, Arcoroc et Chef&Sommelier.

Sur son site, le groupe indique produire « chaque jour 4,1 millions d'articles » et a réalisé en 2021 un chiffre d'affaires de 740 millions d'euros.

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ZOOM : LES CINQ MESURES PROPOSEES PAR LES INDUSTRIELS POUR SORTIR DE LA CRISE ENERGETIQUE

Les industriels français gros consommateurs de gaz et d'électricité, réunis au sein de l'association Uniden, proposent cinq mesures pour réformer le marché européen de l'énergie, une « urgence vitale » selon eux, pour sortir de la crise. D'abord, sortir de la règle européenne qui veut que le plafond du prix « spot » (au comptant) de l'électricité soit automatiquement relevé dans l'ensemble des États membres dès lors que ce prix s'en approche « ne serait-ce qu'une seule heure et dans un seul pays ».

Ils souhaitent aussi l'instauration d'un « plafond européen au prix du gaz, alimenté par une taxe, faible mais générale sur toutes les transactions énergétiques, acquittée par les fournisseurs et tous les intermédiaires de marché, servant, via une caisse de compensation européenne, à compenser l'écart par rapport aux prix internationaux ».

Ils demandent la possibilité juridique aux États membres qui le souhaitent de réguler le marché de gros par l'instauration de « tarifs d'adaptation à la crise (Tarac) », pour protéger les consommateurs contre des prix de marché « décorrélés des coûts de production », générant « des profits indus » d'un côté et de l'autre « une destruction de la demande par l'inflation ». Enfin, ils prônent la conception d'un nouveau marché « hybride » pour la fourniture en gros de l'électricité en Europe, tenant compte à la fois de la moyenne des investissements et des coûts de production décarbonée (nucléaire, hydraulique, renouvelables) et d'un marché « spot » construit, comme actuellement, sur les coûts de la dernière centrale appelée pour assurer l'équilibre du système électrique dans les 27 pays et empêcher un blackout.

(Avec AFP)