Embargo sur les produits raffinés russes : les Occidentaux frappent fort la manne pétrolière de Moscou

Par latribune.fr  |   |  746  mots
En 2022, avant le début de la guerre, l'Union européenne était le principal acheteur de gazole russe, pour près de 700.000 barils par jour, plus de la moitié de ses importations totales. (Crédits : Reuters)
Après deux mois d'embargo de l'Union européenne sur le brut russe et de plafonnement de son prix par le G7, l'Occident espère que ses nouvelles sanctions, visant les produits pétroliers, vont frapper plus fort la manne pétrolière de Moscou. Les Occidentaux visent désormais la production de carburants, notamment le gazole. Avec, comme conséquence, une possible augmentation des prix à la pompe.

Un second embargo de l'UE sur les achats de produits pétroliers russes par voie maritime cette fois, couplé à un prix plafond de ces produits appliqué par les pays du G7, est entré en vigueur dimanche.

Les pays du G7, ainsi que l'Australie, avaient, en effet, annoncé vendredi dernier dans un communiqué commun, s'être entendus pour plafonner le prix des produits pétroliers russes. L'accord comprend un prix plafond de 45 euros le baril pour des produits peu raffinés comme le mazout, et un autre de 100 dollars le baril pour des produits plus chers comme le gazole.

Des sources diplomatiques ont qualifié ces prix « d'équilibrés » permettant de « réduire les revenus russes tout en garantissant l'accès des pays tiers » non-membres de l'UE à ces produits. C'est également l'objectif affiché par la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen qui a estimé qu'« avec le G7, nous fixons des prix plafond sur ces produits, pour réduire les revenus russes tout en assurant la stabilité du marché global de l'énergie ». « Nous devons continuer à priver la Russie des moyens de faire la guerre à l'Ukraine », a-t-elle ajouté.

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Le plafond du pétrole russe mis en place par l'UE depuis début décembre a déjà impacté les revenus de la Russie. Selon les économistes du KSE Institute, un think tank basé à Kiev, le pays a représenté en décembre 2,1 milliards de dollars de revenus pétroliers en moins par rapport à la moyenne des revenus mensuels de 2021.

Des sanctions « beaucoup plus perturbantes » pour la Russie

Vendredi, le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, a fustigé cette nouvelle mesure « négative » qui « déséquilibrera davantage les marchés internationaux de l'énergie », assurant que la Russie « prenait des mesures pour couvrir (ses) intérêts contre les risques qui apparaissent ». En représailles des premières mesures, Moscou a interdit depuis le 1er février la vente de son pétrole aux pays utilisant le prix plafond. Et en début de semaine, le gouvernement russe a interdit aux exportateurs nationaux de pétrole et aux organes de régulation de respecter les plafonds sur les prix imposés par les Occidentaux sur son brut russe.

Les sanctions annoncées vendredi devraient être « beaucoup plus perturbantes » pour le Kremlin, car les Occidentaux visent désormais la production de carburants, notamment le gazole, plafonné à cent dollars, assène Stephen Brennock, analyste chez PVM Energy.

En 2022, avant le début de la guerre, l'Union européenne était le principal acheteur de gazole russe, pour près de 700.000 barils par jour, plus de la moitié de ses importations totales. Malgré une forte diminution depuis un an, plus d'un quart des importations de gazole en Europe venait toujours de Russie début 2023, soit un volume quotidien de 450.000 barils, selon S&P Global.

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Moscou obligée de trouver de nouveaux clients

Moscou va donc se trouver forcé de trouver de nouveaux marchés. Les candidats les plus évidents semblent être les géants asiatiques comme la Chine ou l'Inde, devenus les plus gros clients du pétrole russe depuis le début de la guerre. Mais « leur appétit vorace pour le brut ne s'appliquera pas aux produits pétroliers raffinés », affirme Stephen Brennock. En effet, la Chine, l'Inde et la Turquie sont intéressés par les prix bradés du brut russe pour pouvoir le raffiner, car ces pays disposent d'importantes capacités pour le faire. Il existe donc moins de marchés de remplacement « facilement accessibles » pour l'excédent de carburant russe, précise l'analyse. La Russie pourrait alors n'avoir d'autres « choix que de raffiner moins de carburant, ce qui devrait entraîner une baisse de la production de brut » du pays.

Une hausse des prix à la pompe en Europe ?

Selon plusieurs spécialistes du marché pétrolier, l'embargo européen pourrait également avoir pour conséquence de faire remonter les prix à la pompe en Europe, car les pays européens vont devoir rapidement trouver d'autres sources d'approvisionnement, sur un marché déjà en tension.

Certains pays, ainsi que le Royaume-Uni, ont déjà commencé à se tourner ces derniers mois vers les Etats-Unis, mais aussi l'Arabie saoudite et les Emirats arabes unis pour anticiper cette baisse.

(Avec AFP)