Le Conseil d'Etat préconise de rejeter les requêtes d'EDF contre l'Arenh

Par latribune.fr  |   |  724  mots
La décision a été mise en délibéré et le Conseil d'Etat devrait la rendre publique d'ici quelques semaines. (Crédits : Regis Duvignau)
Le Conseil d'Etat a examiné mercredi des recours contre la décision du gouvernement en 2022 de forcer EDF à vendre davantage d'électricité bon marché à ses concurrents pour contenir la facture d'électricité des Français. La rapporteure publique a préconisé le « rejet de l'ensemble des requêtes, portées, entre autres, par EDF.

Le Conseil d'Etat est parti pour ne pas donner raison à EDF qui l'a saisi pour demander l'annulation du décret pris le 11 mars 2022 par le gouvernement prévoyant le relèvement du plafond de l'Arenh (« Accès régulé à l'électricité nucléaire historique »), un mécanisme qui permet aux concurrents d'EDF d'acheter une partie de sa production d'électricité à prix fixe et bon marché.

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La rapporteure publique, dont les conclusions sont généralement suivies, a préconisé le « rejet de l'ensemble des requêtes », estimant que les arguments des différents requérants n'étaient pas fondés. Outre EDF, la haute juridiction administrative avait été saisie par des administrateurs salariés de l'énergéticien, des actionnaires salariés et retraités et un fournisseur d'énergie alternatif. Cette demande avait déjà fait l'objet d'un recours en référé des fédérations syndicales, retoqué début mai par le Conseil d'Etat.Les requérants ont notamment critiqué cette mesure sur le terrain du droit de l'Union européenne, la qualifiant d'aide d'Etat et estimant qu'elle aurait dû être notifiée à l'Europe.

« Ce qui est contesté ici, c'est la base légale qui sous-tend ce dispositif », a déclaré lors de l'audience le représentant d'EDF, rappelant son coût de quelque 8 milliards d'euros pour EDF, dont les finances étaient déjà dans le rouge, la faute notamment à une production nucléaire historiquement basse en raison de l'indisponibilité d'une grande partie de son parc.

Pour l'avocat d'EDF, « une aide nouvelle qui doit être notifiée et acceptée par la Commission européenne »

 Alors que l'Arenh prévoit la vente par EDF d'une partie de l'électricité qu'il produit avec ses centrales nucléaires, le relèvement de son plafond par l'Etat de 100 à 120 TWh a « conduit à obliger EDF à céder de l'énergie qu'il n'a pas, énergie qu'elle doit donc acheter au fournisseur alternatif qu'est le marché pour ensuite revendre à perte », a dénoncé son avocat. « Il s'agit de prendre EDF non plus comme un producteur d'électricité mais comme un opérateur économique », a-t-il poursuivi, concluant : « à partir du moment où il s'agit d'un mécanisme d'achat et de revente, il s'agit assurément d'autre chose et donc puisqu'il s'agit au bout du compte de financer une subvention du consommateur final, il s'agit d'une aide nouvelle qui doit être notifiée et acceptée par la Commission européenne ». La décision a été mise en délibéré et devrait être rendue publique d'ici quelques semaines

Le gouvernement travaille à remplacer l'Arenh qui prend fin le 31 décembre 2025

L'Arenh est régulièrement dénoncée par EDF comme un « poison » qui pèse sur ses finances déjà mal en point. La ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher indiquait fin octobre que le gouvernement travaillait sur le dispositif appelé à succéder à l'Arenh, qui fin au 31 décembre 2025. « Il faut le remplacer par quelque chose » qui permette à la fois de « protéger nos entreprises industrielles » et « qu'EDF puisse continuer à se développer », ajoutait-elle à l'occasion du débat sur les crédits 2023 en faveur de l'Ecologie.

Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire avait annoncé quant à lui que l'Etat avait décidé d'abaisser à 100 térawattheures (TWh) le volume d'électricité nucléaire qu'EDF devra vendre à bas prix à ses concurrents en 2023, soit environ le tiers de sa production.

Selon  Luc Rémont, qui s'apprêtait alors à devenir président d'EDF, ce système est « à bout de souffle » et induit « une sous-rémunération » de l'activité nucléaire d'EDF.

Agnès Pannier-Runacher rappelait que « l'Arenh est un mécanisme qui bénéficie au consommateur final » et a permis « de baisser le coût de l'énergie de manière forte par rapport aux autres pays européens pour nos industriels français en 2022 ».  Il a notamment « préservé 45.000 emplois et 150 (entreprises) électro-intensives », mais, « ça ne veut pas dire que l'Arenh a toutes les qualités du monde ». Créé par une loi de 2010, « il a été prévu pour faciliter le déploiement de nouvelles capacités d'investissement au service de la production électrique » et « ça ne s'est pas traduit dans les faits, il faudra en tirer les conséquences ».

 (Avec AFP)