Pourquoi Gazprom a décidé de ne plus livrer la France en gaz

Par latribune.fr  |   |  580  mots
Gazprom accuse Engie de n'avoir pas réglé toutes les livraisons de gaz de juillet. (Crédits : SPASIYANA SERGIEVA)
Gazprom va suspendre totalement à partir de jeudi ses livraisons en gaz à la France. Pour se justifier, le géant gazier russe a reproché à Engie de n'avoir pas payé l'intégralité des livraisons effectuées en juillet. Côté français, une source industrielle explique qu'il s'agit « simplement » d'un « différend commercial lié avant tout à une différence d'interprétation ».

Pourquoi Gazprom a-t-il coupé le gaz à la France ? Mardi, le géant gazier russe a annoncé qu'il prévoyait la suspension totale de ses livraisons vers le pays à compter du jeudi 1er septembre. En guise de justification, Gazprom assure que l'énergéticien français Engie n'a pas payé l'intégralité des livraisons effectuées en juillet. Or, un décret de Vladimir Poutine signé fin mars spécifie « qu'il est interdit de livrer davantage de gaz naturel à un acheteur étranger si l'acheteur n'a pas effectué le paiement en intégralité dans le délai fixé dans le contrat ». La coupure perdurera « jusqu'à la réception en intégralité des sommes financières dues pour les livraisons », a-t-il précisé.

« Différence d'interprétation »

Ce mercredi, une source industrielle a avancé une autre explication : celle d'un « différend commercial lié avant tout à une différence d'interprétation ». Depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine et en réponse aux sanctions économiques occidentales prises contre la Russie, Gazprom n'a de cesse de réduire les livraisons de gaz à l'Europe. En ce qui concerne la France, elles sont récemment passées à seulement 1,5 TWh par mois. Engie avait évoqué fin juillet une part de gaz russe dans ses approvisionnements de l'ordre de 4%. Pour légitimer cette baisse drastique des volumes gaziers fournis à Engie, Gazprom a invoqué la « force majeure » ; une clause qui permet de l'exonérer de sa responsabilité en cas d'événement exceptionnel. La partie française a pour sa part contesté cette « force majeure » et a déduit une partie des dommages qu'elle estime avoir subi de sa facture au géant russe, ce que permettent les contrats, selon une source industrielle.

« A ce stade, c'est un différend commercial assez classique sur ce qui est ou pas la force majeure. Simplement, ce différend, somme toute classique, voit son règlement très compliqué par le fait qu'on est dans un contexte géopolitique très particulier », a observé la source industrielle, estimant qu'il est trop tôt pour savoir quel sera l'effet de cette crise sur la relation bilatérale entre les deux entreprises à long terme.

« Pas d'impact pour les clients en France »

« Il n'y a pas d'impact sur la capacité à approvisionner les clients en France et pas d'impact notable a priori sur l'approvisionnement vers l'ensemble de l'Europe puisque les volumes de la Russie vers l'UE sont restés stables », a-t-on noté. Les volumes qui ne sont pas livrés à Engie le sont ainsi ailleurs en Europe.

Toutefois, l'Europe doit, actuellement, faire face à l'interruption des livraisons via le gazoduc Nord Stream depuis mercredi. Selon Gazprom, propriétaire de cette conduite qui relie directement les champs gaziers sibériens au nord de l'Allemagne, d'où le gaz est ensuite exporté à d'autres pays européens, cette coupure est liée à des travaux « nécessaires » dans une station de compression située en Russie. Bien qu'ils soient programmés jusqu'à samedi, l'Europe s'inquiète de voir cette situation perdurer.

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En France, la présidente de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), Emmanuelle Wargon, s'est montrée, elle aussi, confiante « sur la capacité à passer l'hiver en France sans gaz russe ». Cela ne changera « heureusement pas grand-chose » pour les consommateurs, a-t-elle estimé mercredi sur LCI, soulignant l'effort de diversification des approvisionnements et le bon remplissage des stockages.

(Avec agences)