Vents porteurs pour l'éolien en France

Par Jérôme Marin  |   |  960  mots
La filière éolienne espère encore accélérer, notamment sur les installations en mer. Elle redoute cependant une multiplication des recours juridiques qui ralentissement l'entrée en service des parcs.

"Tous les clignotants sont au vert". L'heure est à l'optimisme chez les professionnels de l'éolien. Malgré une légère baisse de la puissance raccordée au réseau en 2018, "la filière tient ses objectifs", souligne Olivier Pérot, le président de France Energie Éolienne (FEE), en marge de la publication de son observation annuel. Surtout, poursuit-il, "2019 a été une année charnière", citant une prise de conscience de plus en plus forte et une demande croissante pour les énergies vertes.

Pour autant, la filière doit "encore accélérer" pour atteindre les prochains objectifs de développement. L'association, qui représente 300 entreprises du secteur, espère en particulier un coup de main de l'État, notamment sur les appels d'offres pour l'éolien en mer, segment sur lequel la France est très retard sur ses voisins européens. FEE réclame aussi un raccourcissement des délais d'instruction, qui ralentissement le développement du parc.

Délai de 8 ans

"En moyenne, il faut 8 ans avant qu'un parc éolien n'entre en service", regrette Olivier Pérot. La faute à "une obstruction systématique menée par des organisations très structurées qui ont des relais importants auprès des pouvoirs publics", ajoute Pauline Le Bretre, déléguée générale de FEE, qui assure que "95% des recours sont rejetés ou considérés comme abusifs". "Ils diffusent de fausses informations pour jouer sur la peur", regrette la responsable. Notamment auprès des agriculteurs pour qu'ils refusent l'installation d'éoliennes sur leurs exploitations.

L'an passé, la filière éolienne a raccordé 1.552 mégawatts au réseau. Cela représente un repli de 8% par rapport à 2017, qui avait été une année record. La puissance cumulée s'établissait, fin 2018, à 15.309 mégawatts, plaçant la France au quatrième rang européen, derrière l'Allemagne, leader incontesté en Europe, l'Espagne et le Royaume-Uni. En termes de production, l'éolien affiche une croissance de 15% par rapport à 2017. Mais il n'a représenté, l'an passé, que 5,1% de l'électricité produite dans l'Hexagone.

8.000 éoliennes en France

La prochaine programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) a fixé un objectif de 35.000 mégawatts installés en 2028 pour l'éolien terrestre. Pour l'atteindre, la filière va devoir raccorder 2.000 mégawatts par an. Un seuil qui ne sera pas atteint cette année, puisque le chiffre devrait être similaire à celui de 2018. Outre des instructions plus rapides, le secteur réclame à l'armée d'ouvrir des zones aujourd'hui interdites aux éoliennes. Mais aussi à l'aviation civile de lever certaines contraintes sur les éoliennes de grande hauteur.

La FEE espère également "harmoniser" le développement de l'éolien sur l'ensemble du territoire. Si la France compte 1.400 parcs et 8.000 éoliennes, la moitié des installations sont en effet concentrées dans les régions Hauts-de-France et Grand Est. Cela s'explique par leur potentiel venteux plus élevé. FEE propose ainsi de modifier les paramètres des appels d'offres, qui tournent aujourd'hui autour du prix de rachat de l'électricité, pour y intégrer une dimension régionale. Un moyen, aussi, de calmer la gronde dans des régions qui s'estiment saturées.

Baisse des tarifs de rachat

Autre axe de développement: l'éolien offshore. Huit ans après les premiers appels d'offres, la confiance est enfin de mise. Le gouvernement a en effet promis de relever le rythme des appels d'offres à 1 gigawatt par an. A Saint-Nazaire, le premier parc en mer est en cours de construction, pour une mise en service espérée début 2022. Trois autres parcs devraient bientôt être purgés de recours. La filière française espère parvenir à une puissance raccordée de 3.500 mégawatts d'ici à 2026. Des projets d'éoliens flottants, qui permettent d'installer des mats plus loin des côtes, sont aussi en cours.

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L'optimisme de la filière s'explique aussi par la baisse des tarifs de rachat, qui sont garantis aux développeurs de parcs. Ils sont tombés sous les 65 euros lors des derniers appels d'offres pour l'éolien terrestre. "C'est comparable avec le nucléaire amorti et deux fois moins que le nouveau nucléaire", note Pauline Le Bertre. La différence entre les tarifs garantis et le prix de marché de l'électricité a ainsi fortement baissé. Pour le offshore, les tarifs sont même inférieurs aux 50 euros, car les parcs comportent des mats plus nombreux et plus puissants, ce qui permet de mieux amortir les coûts d'exploitation.

18.200 emplois

Face aux critiques, de plus en plus visibles, les professionnels de l'éolien entendent en outre "rétablir certaines vérités". "Aucun lien de causalité n'a été démontré entre la baisse de la production laitière de vaches et la présence d'éoliennes", souligne par exemple Charles Lhermitte, vice-président de FEE. Par ailleurs, ajoute-t-il, "le coût du démantèlement n'est pas de 600.000 euros comme certains le prétendent, mais de 30.000 euros". Et il souligne que les éoliennes sont aujourd'hui recyclables à 95% - seules les pales, fabriquées en fibre de verre, ne peuvent pour le moment qu'être valorisées.

La filière met également en avant les effets positifs du développement de l'éolien. Elle revendique désormais 18.200 emplois directs et indirects, soit 15% de plus en deux ans. "Ce sont des emplois qui ne sont pas délocalisables", se félicite Olivier Pérot. L'association insiste par ailleurs sur les rentrées fiscales générées par les éoliennes pour les collectivités locales. Et sur les loyers versés par les promoteurs, en particulier aux exploitants agricoles. Pour un parc moyen, ces retombées s'élèveraient à un million d'euros par an.