Boulanger dans le piège de Saturn

Par Juliette Garnier  |   |  526  mots
Boulanger espérait rentabiliser le rachat de Saturn en trois ans.
L'enseigne d'électroménager n'a pas réussi à digérer les 35 magasins Saturn repris il y a un an. Elle doit maintenant reclasser 600 personnes.

Boulanger paye une grosse erreur de timing. Un an après avoir racheté les magasins français de Saturn à l'allemand Metro, l'enseigne d'électroménager élargit son plan de sauvegarde de l'emploi à 600 postes. En février, le distributeur détenu par l'Association familiale Mulliez prévoyait déjà de reclasser 394 personnes. Parmi elles, beaucoup sont employées par la centrale d'achat de Saturn à Ris-Orangis (Essonne) et dans des magasins qui font doublon avec ceux de la centrale de Boulanger à Lesquin (Nord). Quatre mois plus tard, l'enseigne ajoute 200 autres postes. En cause : les suites du rachat de 35 magasins de l'enseigne déficitaire Saturn.

Aucun magasin n'a trouvé peneur

Bouclée en juillet 2011, l'opération qui concernait 2.000 salariés devait permettre à Boulanger de franchir allègrement la barre de 2 milliards d'euros de chiffre d'affaires, de développer sa notoriété d'un coup, partout en France avec plus de 100 magasins, et de mieux aiguillonner Darty, leader absolu du marché de la distribution d'électroménager. Mais depuis, l'enseigne n'est pas parvenue à se défaire de six magasins (Angers, Aubergenville, Le Havre, Mulhouse, Toulon et Tours) dont, , l'Autorité de la Concurrence exigeait la cession pour position dominante régionale dans un délai de six mois.

« Aucun n'a trouvé preneur », déplore Christophe de Rolland, directeur général délégué, chargé depuis trois mois de gérer le dossier Saturn auprès de Francis Cordelette, directeur général de Boulanger. Cette cession était fort compliquée. L'Autorité de la Concurrence exigeait la cession des fonds de commerce à d'autres enseignes d'électroménager. Or, elles sont rares en France ; la principale est Darty. Et le marché de l'électroménager se complique sous la pression du e-commerce (plus de 10% des ventes). Depuis 2011, les ventes de TV chutent. Qui pouvait dès lors s'aventurer à reprendre des anciens magasins Saturn avec leur personnel ?

Des mesures d'accompagnement pour tous

Mi-avril, l'Autorité de la Concurrence a accordé le droit à Boulanger de céder ses baux à des enseignes alimentaires qui exploitent des rayons d'électroménager. Bien que l'enseigne puisse alors céder ces magasins sans, cette fois, le personnel, ce ne sera guère plus aisé ; les hypermarchés s'interrogent précisément sur l'avenir de ce rayon dans leurs magasins (Casino l'a transféré à son site Cdiscount). Mais la décision de l'Autorité de la Concurrence a au moins le mérite d'accorder plus de souplesse dans la gestion du personnel de ces six magasins (300 personnes environ). « Ils pourront soit rejoindre Boulanger, soit bénéficier des mesures d'accompagnement du plan de sauvegarde de l'emploi », assure Christophe de Rolland.

Contactés par La Tribune, les représentants du personnel des anciens magasins Saturn n'étaient pas en mesure de commenter cette annonce. « Nous venons d'apprendre cette mesure d'élargissement du PSE. C'est une surprise », indiquent-ils. Selon Boulanger, cet épisode ne doit pas remettre en cause la pertinence du rachat de Saturn. « Il n'y a aucune modification du plan de marche établi », observe Christophe de Rolland. A l'époque, Boulanger espérait « rétablir la rentabilité de Saturn en trois ans ». Cette grosse opération de croissance externe lui coûte cher.