Bretagne : l’hôtellerie monte en gamme et verdit son offre

SÉRIE D'ÉTÉ. TOURISME, CULTURE ET PATRIMOINE EN BRETAGNE (1/3). En 10 ans, le nombre d’hôtels quatre et cinq étoiles a plus que quadruplé en Bretagne. Cette tendance ne se concentre pas uniquement dans la métropole de Rennes ou sur le littoral. Soucieux d’offrir une expérience, les nouveaux hôtels prennent aussi en compte l’enjeu du développement durable. Cet été, la Bretagne devrait attirer 10% de l'ensemble des vacanciers français.
Dessiné par Anthony Rio, de l'agence d'architecte Unité, le concept de l'arbre-hotel L'EssenCiel, est inédit en France. Cette réalisation aux prestations haut-de-gamme, avec vue imprenable sur la verdure depuis l'oculus de chaque chambre, ouvrira au premier semestre 2022.
Dessiné par Anthony Rio, de l'agence d'architecte Unité, le concept de l'arbre-hotel L'EssenCiel, est inédit en France. Cette réalisation aux prestations haut-de-gamme, avec vue imprenable sur la verdure depuis l'oculus de chaque chambre, ouvrira au premier semestre 2022. (Crédits : Groupe Legendre)

Au domaine du Château des Pères, à 25 minutes au sud de Rennes, le chantier du futur hôtel-spa 4 étoiles, L'EssenCiel, avance à vive allure. Pour cette réalisation rétro-futuriste située dans un écrin de verdure de 31 hectares à deux pas d'un château du XVIIe siècle, la famille Legendre, propriétaire des lieux depuis 2011, a vu grand en investissant 12 millions d'euros.

Imaginé par Jean-Paul Legendre, le président du directoire du groupe familial rennais de construction, d'immobilier et d'énergie (660 millions de chiffre d'affaires), le futur hôtel de 42 chambres, qui ouvira ses portes au premier semestre 2022, se distingue par son allure avant-gardiste en forme d'arbre. Dessiné par Anthony Rio, de l'agence d'architecte Unité, le concept est inédit en France.

« Il fallait un projet atypique et ambitieux pour faire venir les gens jusqu'à Piré-Chancé », a reconnu Jean-Paul Legendre, lors d'une visite du chantier fin juin. « Installer un nouvel hôtel dans le château n'avait rien de différenciant, construire un hôtel lambda non plusLes clients viendront pour ce nouveau lieu et pour son calmeLe projet a été guidé par l'image des cabanes perchées et du concept d'essence de l'arbre.»

Depuis l'oculus de chaque chambre, la vue sur la verdure est imprenable.

Une bulle à 28 mètres de haut

Associé à une ambiance intérieure épurée, l'ensemble vise une clientèle en quête d'expériences insolites, à 300 € maximum la nuit.

« La pose en juillet de la dernière bulle tout en haut de l'hôtel, à 28 mètres de haut, va signer le début d'une période consacrée à l'aménagement intérieur afin de donner vie au cœur de l'arbre », signale Julien Legendre, gérant de ce site dédié à l'accueil d'évènements professionnels et grand public. « L'hôtel, qui ajoutera deux nouveaux concepts de restauration en plus du restaurant gastronomique du site, va positionner le Château des Pères comme une véritable destination touristique.»

Quatrième espace naturel le plus fréquenté en Ille-et-Vilaine (35), le domaine accueille déjà plus de 60.000 visiteurs par an. Plus largement, L'EssenCiel offre une illustration concrète de la montée en gamme de l'hôtellerie dans la région de Rennes et en Bretagne.

6% des séjours en Bretagne réalisés en ville ?

En 2010, la Bretagne comptait 22 hôtels quatre et cinq étoiles (1.095 chambres), en 2020, elle en affichait 96 (5.569 chambres) sur un parc total de 1.000 établissements, indique le CRT Bretagne.

Après un an et demi de pandémie, l'accroissement du parc hôtelier est plutôt une bonne nouvelle sur le plan économique pour le secteur touristique breton (7 milliards de retombées économiques, 8% du PIB régional et 58.000 salariés).

Cet été les destinations touristiques bretonnes devraient attirer 10% des vacanciers français, selon une étude de conjoncture conduite par le Comité régional du tourisme de Bretagne en partenariat avec ADN Tourisme. C'est un petit mieux que l'an passé (9%).

L'été dernier, après le premier confinement, la fréquentation des hôtels breton, était remontée à 90% de l'activité, rapportait récemment l'Insee Bretagne. Les perspectives sur 2021 s'annoncent donc au moins aussi bonnes, avec une perspective inattendue pour les destinations urbaines. Cet été, 6% des séjours en Bretagne pourraient être réalisés en ville (1% en 2020).

Une aubaine pour la métropole rennaise, où l'offre, actuellement constituée de 35 hôtels pour 2.000 chambres, se diversifie rapidement selon un rapport Christie & Co publié au printemps. Le lancement de la LGV Paris-Rennes (1h25 depuis 2017) a contribué à renforcer la destination auprès d'une clientèle d'affaires (69%) mais aussi touristique privée (city break).

Investissement de groupes rennais et d'indépendants

« Les performances hôtelières de Rennes suivaient, jusqu'à la crise sanitaire, une tendance haussière soutenue depuis 2016 suite à une croissance de son attractivité », relève Emmanuel Aubrée, responsable régional Nord-Ouest de Christie & Co.

« La ville fait l'objet d'un renouvellement urbain. En parallèle, l'offre hôtelière, associée à de nouveaux services lifestyle et technologiques, monte en gamme dans la foulée de l'ouverture de l'Hôtel Balthazar, le premier cinq étoiles de Rennes inauguré en 2014. Elle se modernise, y compris dans les zones plus industrielles, là où s'installent les entreprises », explique-t-il.

Les nouveaux projets du centre comptent notamment ceux de l'Hôtel Dieu, qui proposera une auberge de jeunesse de standing de 250 lits à horizon 2024 et du Palais du Commerce, qui inclura un hôtel Aloft by Marriott de 105 clés. En 2023, un nouveau quatre étoiles de 119 chambres ouvrira cette fois Place des Lices dans le cadre du projet de reconversion de l'ancien siège de la Banque Populaire de l'Ouest.

« La dynamique à venir va être assez forte, notamment sur la deuxième partie de l'année. L'arrivée d'enseignes comme Marriott qui investit désormais dans des villes plus petites, apporte aussi une nouvelle impulsion en poussant les groupes hôteliers à investir ou à rénover », ajoute Emmanuel Aubrée.

De gros acteurs investissent dans ces nouveaux projets, à l'image des groupes de l'immobilier et des services, Legendre, Blot, Samsic, mais aussi d'indépendants comme Ferré Hôtels, Ruello (qui vient de lancer la marque charme et authenticité Ar Collection) ou Beautiful Life Hôtels. Présidé par Gérard Jicquel, ce dernier multiplie, malgré la crise du Covid-19, les acquisitions à Rennes, Carnac, Lorient, Brest ou encore Saint-Malo où il vient d'acquérir deux quatre étoiles, Le Grand Bé et Le Grand Hôtel de Courtoisville.

« Pour la clientèle locale, française et internationale, en saison comme en hors-saison, il y avait un manque. L'offre hôtelière en Bretagne avait besoin d'être tirée vers le haut et de s'adapter aux modes de consommation des clients. Les investissements sont nombreux dans les établissements existants, notamment dans les environnements plus urbains ou littoraux », fait remarquer Audrey Legardeur, directrice du CRT Bretagne.

« L'offre se positionne sur des hôtels haut de gamme mais pas non plus ultra luxe. Ces établissements disposent aussi, parfois, d'un écolabel. Quel que soit le type d'hôtel, l'enjeu lié au développement durable est présent, et pris en compte, soit dans la construction, soit dans les usages (borne pour voiture électrique, gestion de l'eau, des déchets...).»

Fonds Tourisme Durable et regain d'intérêt pour la campagne

En pleine nature, dans les lieux ruraux ou rétro-littoraux, les hôtels poussent également : les tendances montrent que la campagne bretonne est de plus en plus attractive. Cet été, 22% des Français ayant prévu de séjourner en Bretagne opteront pour une destination rurale. C'est 5 points de plus que l'an passé.

À La Gacilly (Morbihan), le groupe Yves Rocher a fait figure de précurseur avec l'ouverture en 2009 de son hôtel-spa La Grée des Landes (30 chambres). Du sol au plafond, tous les matériaux utilisés sont naturels et éco-responsables : bois des murs, peintures bio-sourcées, toits végétalisés, panneaux solaires. Le bourg de 4.000 habitants, fief du groupe, n'a ni la mer, ni musée, ni monument. Mais l'hôtel affiche un taux d'occupation de plus de 80%.

« La sensibilité au développement durable continue sa progression. 35% des Français ayant prévu de séjourner en Bretagne cet été opteront plus fréquemment pour des hébergements engagés dans cette démarche, 44% consommeront davantage de produits locaux » , souligne Audrey Legardeur.

Pour obtenir des financements, cette dernière invite les professionnels de la restauration et de l'hébergement à s'engager dans cette démarche de maîtrise de la consommation d'énergie et d'eau, mais aussi de valorisation des déchets ou de lutte contre le gaspillage alimentaire. Avec l'UNAT Bretagne, le CRT Bretagne a en effet été retenu par l'Ademe pour déployer le Fonds Tourisme Durable en Bretagne, doté d'une enveloppe de 50 millions d'euros, dans le cadre du plan France Relance.

« Outre l'accès à des financements, une offre d'accompagnement personnalisé est proposée qui comprend un diagnostic gratuit pour 120 établissements, la réalisation d'un plan d'action et d'un suivi de mise en œuvre. Depuis fin avril, nous avons reçu plus de 200 marques d'intérêt de la part des professionnels.»

Nouvelles expériences

Afin de valoriser et recenser les professionnels qui font le choix de s'engager dans cette voie, la Région Bretagne a ouvert en 2011 le site grand public dédié « voyagez-responsable ».

Elle les accompagne aussi pour que l'offre d'hébergement évolue et s'étoffe. Aux côtés des hôtels, campings et locations classiques, de nouvelles expériences émergent. «

Ceux qui n'investissent pas dans leur hôtel ni dans des expériences en subiront à terme l'impact », met en garde Emmanuel Aubrée.

En baie de Quiberon, dans l'éco-village Dihan Evasion, les touristes peuvent se reconnecter à la nature et aux grands espaces dans des bivouacs, des cabanes dans les arbres, des chalets ou des tentes bulles réalisés en matériaux recyclés. Le site qui dispose de son propre potager cultivé en permaculture, propose aussi des séjours thématiques, autour du bien-être (yoga du son, chant-sophrologie, massages shantala en famille, rando et détox...), de la reconnexion à la nature (permaculture, auto construction...), de l'art (écriture, musique, poterie...).

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Commentaire 1
à écrit le 02/08/2021 à 8:54
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Le problème n'est pas l’hôtellerie mais la bulle spéculative immobilière que tous les riches imposent en achetant plein de baraques dans les endroits qu'ils trouvent sympa s'ils pouvaient de se fait ne plus acheter se logeant dans ces hôtels de luxe ...

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