Air France va revoir la production de son usine de Roissy

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  680  mots
Copyright Reuters
Le système de vagues de correspondances à outrance qui a fait le succès de la compagnie pendant des années, coûte aujourd'hui très cher. Air France va davantage lisser son activité journalière organisée aujourd'hui en six vagues de correspondances afin d'augmenter la productivité du personnel et des avions et réduire les pertes des vols européens positionnés sur le hub qui engendre l'essentiel des pertes du moyen-courrier.

Le hub de Roissy : calqué sur l?exemple américain dans les années 80, ce système industrialisé de correspondances était au c?ur de la stratégie de redressement d?Air France de Christian Blanc quand celui-ci prit les manettes fin 1994 pour éviter la faillite de la compagnie nationale. Mis en service en 1996, il a été à l?origine de la période dorée qu?a connue Air France jusqu?en 2008. Mais aujourd?hui, la direction travaille pour, non pas abandonner ce modèle, mais le modifier. Car le concept de remplir les avions long-courriers par des passagers empruntant auparavant un vol court ou moyen-courrier (vol feeder) a un coût. Et s?il permet au long-courrier d?être proche de l?équilibre, il contribue néanmoins fortement aux pertes abyssales d?Air France sur son réseau moyen-courrier. En effet nos informations, les pertes du moyen-courrier positionné sur le hub de Roissy dépassent les 300 millions d?euros, soit plus de la moitié des quelque 600 millions de pertes enregistrées sur l?ensemble du réseau moyen-courrier d?Air France.

Une septième plage de hub?

Selon plusieurs sources internes, Air France a l?intention de lisser davantage son activité journalière à Roissy, aujourd?hui organisée en six plages de correspondances entre les avions moyen-courriers et long-courriers. Au cours de chacun de ces pics d?activité (de deux heures environ), une multitude d?avions moyen-courriers arrivent plus ou moins en même temps à Roissy avec à leur bord des passagers qui prendront dans la foulée (en 50 -55 minutes environ) un vol long-courrier. Si cette organisation est redoutable sur le plan commercial, les périodes creuses qu?elle engendre entraînent une faible productivité du personnel et de ses avions. En effet, un avion qui part par exemple de Marseille pour amener des passagers à Roissy et  qui revient immédiatement dans la cité phocéenne devra, à ce moment là, attendre avant de repartir pour Paris afin de pouvoir entrer dans la prochaine vague du hub. Aussi, selon nos informations, Air France travaille sur la création d?une septième plage de hub pour lisser l?activité sur la journée ("depeaking" dans le jargon) et mettre davantage de vols dans les périodes creuses de l?aéroport de Roissy. « On affaiblit un peu le système de correspondances par rapport à la concurrence mais on utilisera davantage les avions et le personnel », indique une source interne. En outre, l?augmentation de la durée des correspondances améliorera le taux de correspondances réussies et réduira les coûts liés aux pertes de bagages.

De nouveaux accords avec le personnel sont obligatoires
Reste à voir si la perte de recettes engendrée par un tel changement sera compensée par le gain d?efficacité escompté. La compagnie le pense, car le temps de correspondance le plus court possible pour réduire la durée globale du trajet est moins important aujourd?hui aux yeux du passager qu?il ne l?était il y a quelques années. Car la notion de prix et devenue aujourd?hui centrale. Pour autant, modifier le hub n?a d?intérêt que si les règles de fonctionnement des navigants sont renégociées pour que l?augmentation des heures de vols du personnel ne se traduise pas par une envolée des salaires. Ce sera l?un des aspects cruciaux de la renégociation avec les personnels d?ici au 30 juin.

Deux-tiers des passagers long-courriers à Roissy connectent vers l'Europe

Air France ne remet donc pas en cause son système de hub qui reste central dans sa stratégie de relier l?Europe au reste du monde. « Deux tiers de nos passagers long-courriers à Roissy prennent une connexion sur un vol intérieur ou européen. Ne pas être présent sur l?Europe et le marché domestique, c?est mettre en péril le réseau », expliquait en début de semaine Henri de Peyrelongue, Senior vice-président du réseau d?Air France-KLM au colloque French Connect.