Alitalia n'a plus le pistolet sur la tempe pour négocier avec Air France-KLM

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  587  mots
Les actionnaires d'Alitalia ont 30 jours pour dire s'ils souscrivent ou pas à l'augmentation de capital
Les actionnaires ont validé le principe d'une augmentation de capital d'un maximum de 300 millions d'euros et ont 30 jours pour dire s'ils souscrivent ou pas. Pour autant, Alitalia est sûre de pouvoir compter sur 175 millions d'euros garantis par Poste Italiane et des banques.

La gestion du gouvernement italien dans le dossier Alitalia s'apparente à un véritable coup de maître. Il y a quelques jours, la compagnie italienne était à deux doigts de cesser ses vols faute de pouvoir honorer ses factures de kérosène. Une situation perdue qui l'aurait contrainte d'accepter, le pistolet sur la tempe, les conditions drastiques d'un sauvetage posées par Air France-KLM. Aujourd'hui, changement de décors. Alitalia est sûre de passer l'hiver et se retrouve dans une position de force pour négocier avec Air France-KLM (qui possède aujourd'hui 25% d'Alitalia).

175 millions d'euros garantis

C'est ce qui ressort de l'assemblée générale des actionnaires qui s'est tenue dans la nuit de lundi à mardi. Les actionnaires ont validé le principe d'une augmentation de capital d'un maximum de 300 millions d'euros, et ont 30 jours pour indiquer s'ils souscrivent ou pas. La probabilité d'une participation d'Air France-KLM à l'augmentation de capital d'Alitalia est à ce stade de "50-50", a déclaré mardi à Reuters une source proche du groupe français.

Pour autant, Alitalia est sûre de pouvoir compter sur 175 millions d'euros. En effet, les actionnaires ont également validé le principe de l'entrée au capital d'Alitalia de la compagnie publique Poste Italiane, qui pourra souscrire jusqu'à 75 millions d'euros d'actions nouvelles, ainsi que celle des banques Unicredit et Intesa San Paolo qui pourront acheter pour jusqu'à 100 millions d'euros de titres éventuellement non souscrits.

"Alitalia est garantie d'une injection de cash qui lui permettra de passer sans problème la saison hivernale, voire de lancer une restructuration, et d'arriver au début de la saison estivale (fin mars ndlr), où la compagnie commencera à faire entrer le cash des prises de réservations pour l'été. Grâce au soutien de Rome, qui a rendu la mariée plus belle, Alitalia a gagné du temps pour discuter avec d'autres opérateurs",  explique Yan Derocles, analyste chez Oddo Securities.

Le ministre des Transports, Maurizio Lupi, confirme. « Peut-être que l'opération qu'a menée le gouvernement ces dix derniers jours n'a pas été comprise. Nous ne voulons sauver personne (...) Nous avons identifié les conditions permettant une relance du plan stratégique (d'Alitalia), différent du plan actuel et qui permettent à une entreprise comme celle-ci de revenir négocier avec Air France sans être dans une position de faiblesse", avait-t-il insisté lundi.

Priorité donnée à Air France

Bref, Alitalia pourra refuser les exigences d'Air France-KLM si celles-ci étaient considérées comme trop strictes. Air France-KLM est prêt à monter jusqu'à 50% du capital à condition de ne pas reprendre la dette et qu'une restructuration soit mise en place.

Sur le papier, le groupe français semble en bonne position. Le gouvernement, qui a admis qu'Alitalia devait s'adosser à une autre compagnie, a déclaré qu'Air France-KLM avait sa priorité.  "Le gouvernement n'est pas un entrepreneur privé, mais en tant que gouvernement il cherchera, d'abord avec Air France, puis avec d'autres partenaires internationaux, à relancer un secteur qui pour nous est stratégique", a précisé Maurizio Lupi.

Air France-KLM est prévenu. Il va négocier en sachant que s'il ne tope pas, il prend le risque de voir Alitalia se vendre à un autre groupe, et la pénétration du marché haute contribution italien (le 4e d'Europe) se compliquer.

Aujourd'hui, il n'y a personne au portillon. Mais qui peut dire à ce jour qu'un investisseur chinois, du Golfe ou d'ailleurs, ne regarde pas demain le dossier ? Les opposants à ce dossier diront, au contraire, que ce serait, pour Air France-KLM, un mal pour un bien.