Affaire ubuesque du Boeing 787 d'Air France : le dénouement

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  663  mots
Après des mois de blocage, la direction d'Air France et le SNPL ont enfin signé un accord permettant de refaire voler un B787 cloué au sol depuis un mois en raison d'un différend sur un sujet qui n'a rien à voir avec l'avion.

Article modifié le lundi 28 mai à 14h00.

C'est la fin d'un long et regrettable bras de fer entre la direction d'Air France et le Syndicat national des pilote de ligne (SNPL). Non pas sur le dossier des rémunérations, qui reste entier après 15 jours de grève coûteuse (plus de 300 millions d'euros), mais sur l'épineux dossier des Boeing 787, dont l'un des six exemplaires est contraint de rester sur le tarmac depuis le début du mois de mai en raison d'un différend entre les deux parties sur un sujet qui n'a rien à voir avec l'appareil puisqu'il concerne la sécurité des vols.

Un B787 pris en otage

Une affaire ubuesque qui a conduit la direction à envisager la location d'un de ses joyaux de la flotte à un concurrent, en l'occurrence à Air Austral, pour compenser le million d'euros de pertes mensuelles liées à son inactivité. C'est d'ailleurs ce qu'il adviendra si aucun accord n'est signé ce lundi.

Pour rappel, le SNPL a refusé de prolonger au-delà du 30 avril l'accord sur la mise en ligne du B787 qui permettait d'utiliser des instructeurs venant du secteur B777 pour former les pilotes et faire voler les avions. Sans cette prolongation, la quasi-totalité des instructeurs B787 ont donc été contraints de retourner sur 777, et la compagnie n'a plus eu assez de pilotes pour faire voler les six B787. Un appareil est donc cloué au sol depuis début mai et devait être loué à Air Austral si un accord n'était pas signé sur un sujet de sécurité des vols.

Le SNPL demandait, depuis plus d'un an, d'avoir une voix prépondérante au sein de la commission qui examine les retours d'expérience des pilotes (ASR ou Air Safety Report) et définit si ces derniers sont « acceptables » ou «inacceptables » en cas de manquement aux règles de sécurité. La direction a toujours refusé jusqu'ici en rappelant "le problème de réglementation et d'exercice des responsabilités pour la direction », que posait la demande du SNPL. Pour obtenir gain de cause, le syndicat des pilotes a refusé de signer l'accord sur le B787. Une situation qui a ému un grand nombre de salariés, notamment des pilotes, effarés par ce blocage.

Le SNPL a fait de belles avancées

Les lignes ont visiblement bougé ce week-end pour dénouer ce sac de nœuds. Après une journée intense de négociations, vendredi, au cours de laquelle le SNPL a fait de belles avancées, la direction a envoyé samedi matin un projet d'accord qui a été négocié ce lundi matin, puis mis à signature dans la foulée. Les syndicats et la direction l'ont signé en début d'après-midi. Le bureau du SNPL avait présenté le texte ce week-end au membre du conseil du syndicat en l'accompagnant de commentaires plutôt favorables.

Trois accords dont un concerne la maintenance prédictive

Il y a en fait trois accords qui ont été signés, dont deux sur la sécurité des vols, tous deux d'une durée déterminée de 6 mois, ce qui en limite néanmoins la portée. Le premier intègre le SNPL dans les processus de décision de l'acceptabilité d'un évènement de sécurité des vols, mais les dirigeants responsables d'Air France auront le dernier mot, contrairement à ce que voulait pendant des mois le SNPL Le second concerne, quant à lui, l'utilisation de données de vols qui vont permettre de développer des algorithmes capables de faire de la maintenance prédictive, mais aussi de mieux calibrer les outils de prévision de consommation de carburant.

Du coup, la signature du protocole instructeurs n'était plus liée à celle sur la sécurité des vols. L'accord signé sur ce point prévoit de le prolonger d'une année. Il n'y aura pas de location d'un B787, et l'avion devrait voler de manière optimale à partir du 1er juillet au plus tard.