Air France-KLM : la France et les Pays-Bas vont se pencher sur les accords de fusion de 2003

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  767  mots
(Crédits : Reuters)
La France et les Pays-Bas se sont engagés ce vendredi 1er mars à oeuvrer ensemble à l'amélioration des performances d'Air France-KLM. Un groupe de travail conjoint va travailler sur plusieurs sujets stratégiques, dont les accords de fusion de 2003, qui assure la domination française dans le groupe. Ses conclusions sont attendues d'ici à juin.

La tension politique retombe entre la France et les Pays-Bas au sujet d'Air France-KLM. Après l'entrée en force et par surprise de l'Etat hollandais dans le capital d'Air France-KLM (14%, soit le même niveau que celui de l'Etat français), les deux pays ont convenu de travailler ensemble pour améliorer les performances du groupe pour déterminer des conclusions d'ici à juin a annoncé le ministre français de l'Economie, Bruno Le Maire, après un entretien avec son homologue néerlandais, Wopke Hoekstra.

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"Nous nous nous sommes expliqués", a dit le ministre français, en s'abstenant de critiquer le raid hollandais qualifié deux jours plus tôt d'"inamical". "Nous avons surtout voulu nous tourner vers l'avenir avec, comme seul objectif, de faire d'Air France-KLM la compagnie aérienne la plus performante au monde".

Pour rappel, Air France-KLM n'est pas une compagnie mais un groupe français depuis le rachat en 2004 de KLM par Air France, composé de deux filiales, le groupe Air France, et le groupe KLM.

"Pour cela, un processus de travail a été mis en place. Il rendra ses conclusions d'ici la fin du mois de juin et travaillera en parfaite intelligence avec Ben Smith", le patron d'Air France-KLM, a-t-il ajouté. "Nous réaffirmons notre soutien à Ben Smith", a poursuivi le ministre.

Le résultat devra être équitable et équilibré

"Le résultat final devra être équitable et équilibré pour les deux parties", selon un communiqué des deux ministres diffusé après la réunion. Le groupe de travail mis en place sera présidé par Martin Vial, directeur général de l'Agence des participations de l'Etat (APE) et son homologue néerlandais, Christian Rebergeen, selon le communiqué.

Ce groupe devra examiner, "les participations des deux Etats dans Air France-KLM et la structure de capital de KLM et d'Air France, les règles de gouvernance et le respect par les deux Etats de règles de bonne conduite, la composition du conseil d'administration du groupe, la défense des intérêts des hubs de Roissy-Charles de Gaulle et Schiphol, leurs visions respectives sur la stratégie de long terme du groupe Air France-KLM telle mise en œuvre par le management du groupe Air France-KLM, et les accords du 16 octobre 2003 entre Air France, KLM et l'Etat néerlandais".

Diminution de l'influence française?

Vu l'ensemble des thèmes, c'est carrément toute la structure et l'organisation du groupe qui vont être étudiés puisque les accords de fusion de 2003, validés à l'époque par le gouvernement néerlandais, seront examinés. Or ces accords fixent les conditions de la domination française du groupe Air France-KLM. L'influence française est majoritaire au conseil d'administration d'Air France-KLM mais aussi au conseil de surveillance de KLM puisque le groupe nomme 5 des 9 administrateurs. Pour autant, l'expérience a montré que dans les faits, KLM a acquis une autonomie très importante.

Les discussions s'annoncent forcément houleuses entre des Hollandais qui vont tenter d'obtenir le plus possible d'avantages et les Français qui essaieront d'en conserver le maximum. Dans tous les cas, la place des Hollandais dans le groupe ne peut que s'accentuer et celle de la France que diminuer. Que peut-il se passer en cas de désaccord? KLM peut-il quitter le groupe? Il n'y a que deux possibilités pour cela : que le groupe Air France-KLM accepte de vendre sa filiale KLM, ou que l'Etat hollandais nationalise KLM, quitte à la placer en Bourse ultérieurement. Pas sûr qu'elle retrouve une alliance qui soit aussi bénéfique (KLM a doublé de taille depuis 2004) et aussi respectueuse de ses intérêts.

Autre point à surveiller : les deux Etats vont-ils s'accorder sur un plan de sortie du capital du groupe ? Certains ne l'excluent pas.

"C'est une occasion historique aujourd'hui de solder une bonne fois pour toutes les incompréhensions qui pouvaient exister entre la France et les Pays-Bas sur Air France-KLM", juge-t-on à Bercy où l'on souligne que les tiraillements ne datent pas de la crise ouverte cette semaine alors que KLM est nettement plus rentable qu'Air France.

En 2018, avec un résultat d'exploitation de plus de 1 milliard d'euros, KLM a en effet réalisé près de 80% du résultat du groupe. Depuis des années, cette différence de performance irrite les Hollandais, qui oublient le poids du coût du travail et de la fiscalité dans les résultats d'Air France et l'environnement au contraire très favorable dont bénéficie KLM aux Pays-Bas.