Air France-KLM : la puissance de feu avec Delta appelée à se renforcer

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  728  mots
La compagnie américaine Delta multiplie les prises de participations capitalistiques
Avec les prises de participations de Delta dans Aeromexico et Virgin Atlantic, l'évolution de la coentreprise Air France-KLM/Delta/Alitalia sur l'axe transatlantique semble inévitable avec l'intégration à terme des compagnies mexicaine et britannique. L'avenir d'Alitalia dans cette alliance pose quant à lui question.

Sept ans après sa mise en service, la coentreprise transatlantique entre Air France-KLM, Delta et Alitalia, tous membres de l'alliance Skyteam, est appelée à évoluer significativement au cours des prochaines années. Ceci, en raison des liens très étroits qu'entretient Delta avec Aeromexico et Virgin Atlantic dans lesquelles la compagnie américaine est présente dans le capital de manière significative. Dans le même temps, l'avenir d'Alitalia, aujourd'hui dans le giron de la compagnie d'Abu Dhabi Etihad, laquelle développe son propre système d'alliance, pose également question.

13 milliards de dollars de chiffre d'affaires

Pour rappel, de telles coentreprises, appelées joint-ventures (JV) dans le transport aérien, reposent sur un partage des coûts et des recettes entre les différents membres, mais aussi sur une harmonisation des horaires des vols et, des forces commerciales sur un plan de vol commun. Il s'agit du plus haut degré de coopération commerciale dans le transport aérien. Une véritable machine de guerre qui, dans le cas d'Air France-KLM/Delta et Alitalia, a généré en 2014 13 milliards de dollars de chiffre d'affaires.

"Il faudra probablement faire évoluer la JV transatlantique", a indiqué à La Tribune, Patrick Alexandre, directeur général adjoint commercial ventes et alliances d'Air France-KLM.

Cette évolution devrait donc de passer par l'intégration d'Aeromexico dans laquelle Delta est en train de finaliser sa montée au capital à hauteur de 49%.

"C'est sûrement une opportunité", a déclaré Frédéric Gagey, le Pdg d'Air France pour "le renforcement de l'ensemble vaste que constitue Skyteam sur le nord Atlantique".

La réflexion sur l'évolution de la "JV" portera inévitablement sur l'intégration de la compagnie britannique Virgin Atlantic, dans laquelle, là aussi, Delta détient 49% du capital depuis 2013. Lors de cette opération, Delta et Virgin avait créé une coentreprise entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni en parallèle de celle en vigueur sur l'axe transatlantique entre Air France-KLM, Delta et Alitalia. Il avait été prévu à l'époque de faire un point ultérieurement pour voir s'il avait lieu d'intégrer la "JV" Delta/Virgin dans la "JV" Air France-KLM/Delta/Alitalia.

L'accord de coentreprise européenne dénoncé

Outre Aeromexico et Virgin Atlantic, l'avenir d'Alitalia dans la "JV" pose également question. La compagnie italienne, qui, pour se sauver, a préféré se placer sous l'aile d'Etihad en 2014 plutôt que sous celle d'Air France-KLM, a en effet dénoncé la coentreprise européenne (entre l'Italie et la France et les Pays-Bas) avec Air France-KLM. Ce partenariat expire fin 2016 et les compagnies impliquées discutent de nouvelles conditions pour le prolonger. En cas d'échec, l'avenir d'Alitalia dans la JV transatlantique se posera même si l'accord entre la compagnie italienne et les autres membres de la "JV transatlantique" court, lui, jusqu'en 2022. Il est difficilement concevable qu'Alitalia soit partenaire d'Air France-KLM sur le transatlantique et concurrent sur tous les autres axes, notamment européens.

Réservoir de croissance

Ce remodelage de la JV transatlantique passe par des négociations très fines entre chacun pour respecter les équilibres entre les intérêts américains et européens. Il est clair que le poids de Delta, présent au capital d'Aeromexico et de Virgin, est écrasant par rapport à celui d'Air France-KLM qui n'a pas d'emprise sur Alitalia, contrairement à ce que le groupe espérait lors de l'entrée de la compagnie italienne dans la "JV"en 2010. Pour autant, un déséquilibre par rapport au "pôle Delta" peut constituer pour Air France-KLM un réservoir de croissance afin de lui permettre de disposer d'une offre du même niveau.

Si elle devait se concrétiser, une extension de cette "JV' devrait obtenir au préalable l'immunité antitrust de Washington.

Dupliquer le modèle avec la Chine

Par ailleurs, Air France-KLM tente de dupliquer ce modèle de coentreprise entre l'Europe et la Chine avec ses partenaires chinois China Southern et China Eastern. Aujourd'hui Air France dispose d'une "JV"avec China Southern et China Eastern tandis que KLM travaille uniquement avec China Southern. L'idée est de mettre en place une coentreprise globale réunissant tous les acteurs. Il faudra du temps pour que ces alliances chinoises parviennent à atteindre le niveau de la coentreprise transatlantique. En 2014, elles ne généraient que 800 millions d'euros de chiffre d'affaires.