Air France  : "la grève des pilotes est un acte de sabotage" (Juniac)

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  755  mots
Le PDG d'Air France-KLM a dénoncé l'appel à la grève des syndicats de pilotes. Pour Alexandre de Juniac, le coût de la grève imputera les investissements futurs.

Alexandre de Juniac, le PDG démissionnaire d'Air France-KLM et futur patron de l'association internationale du transport aérien (IATA), n'a pas mâché ses mots pour dénoncer l'appel à la grève pendant l'Euro des trois syndicats de pilotes d'Air France, le SNPL, le SPAF et Alter.

"C'est un acte de sabotage », a-t-il déclaré ce jeudi, en aparté de l'assemblée générale de l'IATA qui se déroule à Dublin. "C'est un coût pour la compagnie qui viendra amputer de futurs investissements de la compagnie, c'est mauvais commercialement."

Pour rappel, les 14 jours de grève en septembre 2014 avaient coûté 450 millions d'euros à la compagnie.

Croissance ou pas

Frédéric Gagey, le PDG d'Air France, a de son côté déploré que "l'on profite d'un évènement heureux pour les Français pour appeler à la grève". Pour lui, les réponses aux demandes des syndicats ne se font pas en quelques jours.

"Le débat sur plus de croissance, ce n'est pas en 8 jours qu'on va le décider", a-t-il dit jeudi soir en aparté de l'assemblée générale de l'IATA.

Le matin même, il estimait qu'après des années de pertes, la question de la croissance pouvait à nouveau se poser. Il renvoyait à l'automne prochain la décision de mesures stratégiques, le temps de laisser le nouveau PDG d'Air France-KLM, Jean-Marc Janaillac, prendre ses marques.

Ce sujet de la croissance fait débat. Plusieurs administrateurs d'Air France-KLM refusent de lancer le groupe dans une stratégie de croissance tant que de nouvelles mesures de réduction de coûts n'auront pas été introduites. Non seulement pour financer la croissance mais aussi pour ne pas se retrouver au pied du mur en cas de retournement.

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Taxes et redevances

Le SNPL de son côté demande une stratégie de croissance pour Air France et dénonce une soi-disant délocalisation de l'activité de la compagnie française au profit de KLM.

"Air France-KLM gagne de l'argent en faisant passer son trafic via Amsterdam, dont les redevances aéroportuaires sont moins chères qu'à Paris et les taxes moins importantes qu'en France", a expliqué à la Tribune Philippe Evain, le président du SNPL Air France. Il demande notamment le retour à l'équilibre de la production entre Air France et KLM fixé lors du rapprochement entre les deux groupes en 2004. "Cela risque de provoquer un surcoût pour Air France mais c'est à l'Etat de faire quelque chose".

Philippe Evain prévoit d'autres mouvements si les pilotes n'obtiennent pas gain de cause.

Alors que beaucoup se demandent pourquoi les syndicats n'ont pas attendu l'arrivée du nouveau PDG d'Air France-KLM pour mener des discussions, Phillipe Evain répond : "Nous avons demandé de le rencontrer, il ne souhaite pas le faire avant son entrée en fonction le 4 juillet. Nous prenons notre destin en main".

Course à l'échalote

Le SNPL s'est fait prendre de vitesse par le SPAF, lequel avait décidé le premier de déposer un préavis de grève.

"Le SNPL hésitait, mais, dans cette course à l'échalote avec le SPAF (21% des voix aux élections professionnelles pilotes), il a préféré suivre", explique un pilote. D'où cette tentative de trouver une méthodologie différente de celle du SPAF "pour ne pas mettre la boîte à genoux", selon l'expression d'un pilote.

Alors que le SPAF prévoit 4 jours pleins de grève du 11 au 14 juin, le SNPL et Alter ont déposé des préavis pour 3 plages horaires chaque jour (5h30-8h30, 12-15h, 21h30-00). "Cela provoque simplement des retards de 3 heures maximum", assure un membre du SNPL.

Par ailleurs, il y a eu visiblement une divergence entre les syndicats sur le contenu du communiqué  qui ne demande pas, contrairement à une lettre du président du SPAF à Frédéric Gagey, l'annulation des mesures du solde du plan Transform, mises en place le 1er juin et qui avaient suscité la grogne des pilotes et des syndicats.

Reste à savoir si les pilotes vont suivre le mouvement. "Le premier mouvement devrait être suivi, mais il n'est pas garanti que les suivants le soient, car les revendications ne sont pas claires", estime un pilote.

En raison de la différence de méthodologie, il sera difficile de mesurer la participation de chaque syndicat. En outre, la présence des trois syndicats semble garantir d'ores et déjà un bon taux de participation global.