Ce qu’il faut savoir du délestage de kérosène de l’AF852 d'Air France au-dessus de Fontainebleau

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  642  mots
L'appareil s'est posé non pas à Orly mais à Roissy car Air France disposait sur cet aéroport d'un avion et d'un équipage de réserve, lequel a pu partir dans l'après-midi.
Dimanche, à la suite d'un incident moteur au décollage d'Orly, un B777 d'Air France a été contraint de se délester d'une partie de son carburant au-dessus de la forêt de Fontainebleau pour pouvoir se poser comme l'exigent les procédures de sécurité. Qui décide du lieu? Quelles sont les règles? Explications.

L'information fait le buzz depuis dimanche. A la suite d'un problème technique au décollage de l'aéroport d'Orly dimanche matin, un Boeing 777-200 d'Air France, un gros-porteur équipé de deux moteurs, a opéré une vidange d'une grande partie de son carburant au-dessus de la forêt de Fontainebleau (Seine-et-Marne), pour pouvoir ensuite se poser non pas à Orly mais à Roissy. La procédure a suscité l'indignation maire de la ville, Frédéric Valletoux (LR), qui a jugé sur Twitter "scandaleux que cette procédure soit encore autorisée". "La forêt de Fontainebleau, c'est 10 millions visiteurs/an, l'espace naturel le protégé en France", a-t-il ajouté.

Procédure

Que s'est-il vraiment passé ? A-t-on assisté à une mesure sauvage d'un commandant de bord déversant des dizaines de tonnes de kérosène sur la tête des promeneurs ?

Absolument pas. Au contraire. Cette procédure a un objectif premier : assurer la sécurité des passagers de l'avion. En cas de pompage réacteur comme ce fut le cas pour le moteur gauche du B777 au moment du décollage, l'avion doit revenir se poser à l'aéroport. Or, pour ce faire, la procédure des constructeurs fixe une masse maximale à l'atterrissage (208 tonnes pour le B777-200), laquelle est inférieure à celle du décollage (293,9 tonnes). "Ne pas les respecter pourrait entraîner une rupture du train d'atterrissage au moment de l'impact ou d'une vitesse excessive par rapport à la longueur de la piste", explique un observateur.

Le contrôle aérien détermine la zone

De fait, pour alléger l'avion et respecter les procédures des constructeurs qui ont été certifiées par les autorités de certification, les pilotes doivent se délester d'une partie du carburant embarqué, forcément de plusieurs dizaines de tonnes quand il s'agit d'un gros porteur en partance pour Cayenne. Le commandant de bord ne fait pas cela dans son coin et n'importe comment. Il demande l'autorisation au contrôle aérien qui va ensuite l'isoler du reste du trafic et lui indiquer la zone où il peut vidanger en fonction des règles établies par l'Organisation internationale de l'aviation civile (OACI) qui régit le transport aérien mondial.

Celles-ci exigent que l'avion soit à une altitude de 6.000 pieds (environ 2.000 mètres) au-dessus d'une zone non peuplée, un plan d'eau si possible, une forêt ou une montagne. C'est ce qui a été fait. Pourquoi au-dessus la forêt de Fontainebleau ?

"C'est l'une des rares zones inhabitées proche d'Orly", explique-t-on à la DGAC, la direction générale de l'aviation civile.

90% du kérosène s'évapore avant de toucher le sol

Pour autant, s'il y a un impact sur l'environnement, ce ne fut pas un déluge de kérosène sur la forêt comme certains ont pu l'imaginer. Le kérosène est pulvérisé sous forme de micro-gouttelettes et s'évapore en grande partie au contact de l'air. Selon les études de la DGAC, "90% du kérosène s'évapore avant de toucher le sol". Parmi ces 10% restants, une grande partie s'évapore ou se dégrade au contact du sol en fonction de l'hygrométrie et de la température au sol. Au final, la partie de kérosène restant au sol au sol se mesure "en milligrammes par m2", explique-t-on à la DGAC.

Ce type de manœuvre est rare. Il y en a eu 13 l'an dernier en France, dont deux en Île-de-France

L'appareil s'est posé non pas à Orly mais à Roissy car Air France disposait sur cet aéroport d'un avion et d'un équipage de réserve, lequel a pu partir dans l'après-midi.