Fin du monopole et du régime de retraite de la SNCF : dossier ultra sensible pour Macron

Par latribune.fr  |   |  779  mots
Emmanuel Macron demande à la SNCF d'aller plus loin dans les réformes, le statut, la mobilité, le régime de retraite.

Forcément la perspective de la France bloquée en décembre 1995 par la longue grève des cheminots de la SNCF pour la défense des régimes spéciaux de retraite ressurgit avec les propos d'Emmanuel Macron. Alors que son prédécesseur à l'Elysée a souvent cherché à ménager les cheminots et leurs syndicats pour éviter une explosion sociale, Emmanuel Macron n'hésite pas à mettre les pieds dans les plats en évoquant sa volonté de s'attaquer à des sujets aussi sensibles que l'ouverture à la concurrence,  la suppression du régime spécial de retraite de la SNCF, ou la diversification de l'entreprise à d'autres activités de la mobilité.

"Nous demandons à SNCF d'aller plus loin sur les réformes, le statut, la mobilité, le régime de retraite", a déclaré Emmanuel Macron dans un entretien publié en juillet par le magazine interne du groupe, relayé mercredi par le Monde.

A part peut-être ce dernier point, que la direction a déjà largement entamé avec sa stratégie de « porte-à-porte », les deux autres points sont à déjà à eux tout seul des sujets explosifs. Débuté il y a une vingtaine d'années en Europe, l'ouverture à la concurrence est un épouvantail à la SNCF que les syndicats ont réussi à repousser, même si elle devenue une réalité dans le transport de marchandises et dans le transport international de passagers.. La suppression du régime spécial de retraites est lui aussi un sujet extrêmement sensible. Après l'échec du projet d'Alain Juppé en 1995, Nicolas Sarkozy a certes réussi en 2008 à aligner progressivement le régime des retraite des agents de la RATP et de la SNCF sur celui des fonctionnaires, mais cette mesure qui fait travailler les cheminots plus longtemps a fait l'objet de compensations fort coûteuses.

Début de la réforme mi-2018/début 2019

"Ce qui a été acquis dans les régimes passés reste acquis et vous cotisez à un nouveau régime. Je pense que c'est très important, parce que cela va redonner de la confiance dans le système", a déclaré le président, évoquant un "top départ" de la réforme à la mi-2018 ou début 2019 et précisant ainsi l'une de ses promesses de campagne.

En échange, il propose que l'Etat reprenne la dette de la SNCF et accentue les investissements publics vers l'entretien des lignes. Ces deux mesures permettraient de soulager le gestionnaire d'infrastructure qui, aujourd'hui est obligé d'augmenter ses péages (redevances sur le passage des trains) pour financer l'entretien du réseau, au grand dam de la SNCF qui a vu les marges de la SNCF s'effondrer depuis une dizaine d'années.

Les propos d'Emmanuel Macron ressurgissent au moment où les sénateurs Hervé Maurey (UDI) et Louis Nègre (LR) ont présenté ce mercredi une proposition de loi visant à encadrer l'ouverture à la concurrence du rail français, qu'ils prévoient de déposer "dans les tous prochains jours".

La concurrence sera possible à partir de 2019

Prévue par Bruxelles l'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs doit être traduite en droit français. Elle sera effective à partir du 3 décembre 2019 pour les services conventionnés (TER et trains d'équilibre du territoire, TET ou Intercités) et à partir de 2021, pour les TGV.

Le texte prévoit que les lignes TER et TET/Intercités, gérées par les régions et l'Etat soient confiées aux opérateurs dans le cadre de délégations de service public - comme c'est aujourd'hui le cas avec la SNCF. Les salariés, en priorité les volontaires, seraient transférés vers le nouvel opérateur. Rémunération, droits à la retraite, facilités de transport et garantie de l'emploi, seront maintenus, mais les règles d'organisation du travail seraient définies librement par l'employeur.

Pour les lignes TGV, les sénateurs craignent qu'une ouverture non régulée aboutisse "à la disparition de nombreuses liaisons moins rentables ou déficitaires, mais pourtant indispensables à l'aménagement du territoire". Ils préconisent donc que l'État accorde des "droits exclusifs" aux opérateurs pour faire circuler leurs TGV, "en contrepartie de la réalisation d'obligations de service public". Quant aux gares, elles doivent être séparées de SNCF Mobilités - opérateur ferroviaire de la SNCF - "afin de garantir un accès transparent et non discriminatoire des entreprises ferroviaires". Le texte prévoit ainsi qu'elles deviennent une société anonyme de droit public, filiale du groupe SNCF.
Par ailleurs, les voyageurs doivent pouvoir acheter un billet unique, même si leur voyage se fait sur des compagnies différentes.