La France n'est pas la championne d'Europe des taxes spécifiques au transport aérien

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  577  mots
(Crédits : Kevin Lamarque)
Selon l'association Airlines for Europe, les taxes spécifiques au transport aérien européen se sont élevées à 3,6 milliards d'euros au Royaume-Uni en 2017, contre 1,1 milliard en Allemagne et 600 millions en France et en Italie. En revanche, ces chiffres ne tiennent pas compte du coût du financement de la sûreté et du poids des charges sociales qui pénalisent les compagnies françaises. Selon une étude de PricewaterhouseCoopers, la suppression des taxes spécifiques permettrait d'augmenter le trafic vers la France et de faire progresser de 1,6 milliard d'euros le PIB de la France d'ici à 2020.

En plein pendant les Assises du transport aérien, le document casse certaines idées reçues. Contrairement à l'idée largement répandue en France, y compris parmi les professionnels du transport aérien, les taxes spécifiques au transport aérien en France ne sont pas les plus élevées d'Europe.

Le  Royaume-Uni, champion d'Europe des taxes

Selon un document de l'association Airlines for Europe (A4E), qui regroupe une quinzaine de compagnies aériennes européennes dont Air France et KLM, elles ont pesé en 2017 pour 600 millions d'euros dans l'Hexagone, contre 1,1 milliard d'euros en Allemagne et 3,6 milliards d'euros au Royaume-Uni, qui, à lui seul, avec notamment le poids exorbitant de l'Air Passenger Duty (de 13 à 146 livres par voyageur), a représenté un peu moins de la moitié des taxes spécifiques du transport aérien européen.
Pour la France, l'association a pris en compte la taxe de l'aviation civile, la taxe dite de solidarité, et une taxe sur les passagers voyageant en Corse.

[Cliquez sur l'infographie pour l'agrandir. Crédit A4E]

Difficile toutefois de tirer les conclusions sur les écarts de compétitivité entre les différents pays et entre les compagnies originaires de chaque pays, notamment entre les trois poids lourds du secteur en Europe, Air France, Lufthansa ou British Airways. Car il faut tenir compte également du financement de la sûreté, des redevances aéroportuaires, et du niveau de charges sociales.

[Cliquez sur l'infographie pour l'agrandir. Crédit A4E]

Le coût de la sûreté et les charges sociales pénalisent les compagnies françaises

Si les redevances aéroportuaires sont plus élevées à Londres et à Francfort qu'à Paris, le financement de la sûreté en particulier n'est absolument pas le même d'un pays à l'autre. En France, il pèse pour plus de 1 milliard d'euros et repose entièrement sur les compagnies et les passagers via la taxe d'aéroport quand, en Allemagne par exemple, il est en partie pris en charge par les Länder. "Les coûts de sûreté sont supérieurs de 35% à la moyenne européenne", indique la Fédération nationale de l'aviation marchande (Fnam).

Le document d'Airlines for Europe n'évoque pas non plus le poids des charges sociales, largement défavorables aux compagnies basées en France. Selon Air France, l'écart sur ce point par rapport à Lufthansa serait de 400 millions d'euros en faveur de la compagnie allemande.

Reste à voir si la prise en compte de tous ces paramètres explique à elle seule la différence de performance opérationnelle qui sépare Air France de Lufthansa et de British Airways. Vu l'ampleur de cet écart (1 milliard d'euros en 2017 avec la compagnie allemande, et 1,3 milliard avec British Airways), une partie ne peut s'expliquer que par des coûts intrinsèques à la compagnie française supérieurs.

La suppression des taxes serait bénéfique à l'Etat

Airlines for Europe plaide pour la suppression des taxes spécifiques qui pèsent sur le transport aérien français. Pour justifier sa demande, l'association explique qu'une telle mesure serait bénéfique à la France. Se basant sur une étude de PricewaterhouseCoopers, cette suppression des taxes spécifiques permettrait d'assurer 5 millions de vols supplémentaires en France d'ici à 2020, et d'accueillir 3,8 millions de touristes supplémentaires, lesquels feraient augmenter les dépenses touristiques de 1,1 milliard d'euros. Associés à une hausse de la TVA, de tels revenus permettraient à l'Etat d'augmenter son PIB de 1,6 milliard d'euros par an d'ici à 2020.