La SNCF contredit le conducteur du TGV qui a déraillé

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  662  mots
Jacques Rapoport, Pdg de SNCF Réseau (à gauche) et Guillaume Pëp (à gauche), président du directoire de SNCF et Pdg de SNCF Mobilités
L'accident est dû à une séquence de freinage trop tardive, selon un rapport immédiat de la SNCF. Le TGV a abordé une courbe à 265 km/h au lieu des 176 km/h exigés. Le conducteur a assuré aux enquêteurs qu'il avait respecté la vitesse.

Si le freinage avait débuté un kilomètre plus tôt au moins, le TGV n'aurait pas déraillé samedi 14 novembre, selon le rapport d'enquête immédiate de la SNCF dévoilé ce jeudi. Autrement dit, si le train avait freiné 10 secondes plus tôt, l'accident qui a fait 11 morts en Alsace n'aurait pas eu lieu.

Selon ce rapport, qui se fonde notamment sur l'examen des relevés informatiques de vitesse, l'origine immédiate de l'accident de la rame d'essai sur la ligne à grande vitesse (LGV) est due à une "séquence de freinage tardif".

«La courbe de raccordement de la LGV à la ligne classique a été abordée à 265 km/h au lieu de 176 km/h. La vitesse au moment du déraillement était de 243 km/h. Ce freinage tardif aurait dû être exercé au moins 1 km plus tôt », a indiqué, lors d'une conférence de presse, Guillaume Pepy, le président du conseil du directoire de SNCF, et Pdg de SNCF Mobilités.

Conducteur expérimenté

Le rapport contredit donc les propos du conducteur qui n'a été que très légèrement blessé dans l'accident. Selon Alexandre Chevrier, procureur-adjoint de Strasbourg, qui s'exprimait lundi dernier, le conducteur - un professionnel "très expérimenté" - a affirmé aux enquêteurs "avoir respecté parfaitement la vitesse qui lui était assignée sur ce tronçon", c'est-à-dire 176 km/h".

Pourquoi ce freinage tardif?

Pourquoi donc ce freinage tardif ? Provient-elle d'une erreur du conducteur qui, en fait, n'a pas respecté la vitesse ? Ou d'un problème technique, au niveau de l'indicateur de vitesse par exemple? L'enquête le dira.

"Aucune anomalie n'a été décelée dans l'état et le fonctionnement des infrastructures, aucun élément de défaillance de la rame d'essais techniques n'a été identifié, et il n'y a eu aucun événement anormal dans la gestion de la circulation", a expliqué Guillaume Pepy.

Ce dernier a d'ores et déjà évoqué de probables « erreurs de comportements humains » dans la cabine. "Parmi les points que l'enquête devra éclaircir figurent (...) sans doute des erreurs de comportements humains dans la cabine", a-t-il en effet déclaré, en précisant, peu de temps après, qu'il ne fallait pas "utiliser le terme d'erreur humaine".

Contrairement aux avions, il n'y a pas d'enregistreur des conversations dans la cabine des TGV.

"Nous ne connaissons pas le déroulement des faits dans la cabine", a déclaré Jacques Rapoport, Pdg de SNCF Réseau.

Sept personnes dans la cabine

En revanche, plusieurs défaillances ont été pointées, avec la présence à bord du train de personnes qui n'avaient rien à y faire (des enfants, par exemple), qui plus est dans le poste de conduite, dans laquelle il y avait 7 personnes, dont au moins deux invitées.

"L'enquête devra dire quelles personnes étaient nécessaires aux tests", a indiqué Guillaume Pepy.

Pour autant, " il n'y a pas de règles précises sur le nombre de personnes à bord", explique Jacques Rapoport.

Ainsi, "des procédures disciplinaires vont être engagées" et "conduiront, dès que l'enquête le permettra, aux sanctions justifiées", a ajouté Guillaume Pepy.

"Au vu de la gravité exceptionnelle et du bilan humain très lourd, des suspensions conservatoires vont être décidées, après audition des intéressés et de leur chaîne managériale", a-t-il ajouté.

Essais LGV gelés

La SNCF a par ailleurs décidé "geler les marches d'essai grande vitesse jusqu'à l'intégration des premiers enseignements des enquêtes dans le processus d'essai". Si l'ouverture en avril du deuxième tronçon de la LGV Est sera probablement décalée, la SNCF ne s'est pas prononcée sur un éventuel risque concernant les trois autres LGV qui doivent ouvrir d'ici fin 2017.

La SNCF a également décidé d'interdire à bord des trains d'essais toute personne ne participant pas à l'équipe projet et de renforcer le processus d'autorisation des présences à bord.