Environnement : mort de Robert Poujade, premier "ministre de l'impossible"

Par César Armand  |   |  455  mots
Dans son livre "Le ministère de l'impossible", Robert Poujade déclarait que la "la bataille du cadre de vie se gagne sur le terrain et non dans le kriesgspiel des directions de ministères parisiens. Elle suppose l'engagement des collectivités locales et le développement, avec elles, d'une politique contractuelle sans arrière-pensées." (Crédits : Twitter de Michel Barnier)
Robert Poujade, qui a été le premier ministre français de l'Environnement de 1971 à 1974, est mort le 8 avril à l'âge de 91 ans, a annoncé hier son fils à l'AFP. En 1975, il avait témoigné de son expérience dans un livre intitulé "Le ministère de l'impossible".

Maire de Dijon (1971-2002), député de Côte-d'Or (1967-1971, 1978-1981 et 1986-2002) et président du conseil général de Côte d'Or (1982-1988), Robert Poujade, 91 ans, est mort le 8 avril, a annoncé hier son fils à l'AFP. Cet homme politique est surtout connu pour avoir été, entre le 7 janvier 1971 et le 1er mars 1974, le premier ministre de la Protection de la nature et de l'Environnement, une fonction qu'il occupera jusqu'à un mois et un jour avant la mort du président de la République Georges Pompidou.

La bataille du cadre de vie

En juin 1975, dans un livre au titre explicite, Le ministère de l'impossible (Calmann-Lévy), Robert Poujade explique avoir voulu "explorer le champ du possible, dans une société inquiète, à la recherche d'elle-même, et qui semblait en effet paralysée par ce qu'elle croyait être l'impossibilité du passé et de l'avenir, sauf lorsqu'elle confondait l'un ou l'autre avec ses phantasmes".

"On m'a parfois dit que la protection de l'environnement était impossible dans un régime libéral et que je me trompais de société. Je crois toujours que rien n'est aussi fécond, riche de surprises que la liberté, quand elle est vraie. Non, un tel ministère n'aurait pas été, ne serait pas, dans un régime vraiment libéral, le ministère de l'Impossible", écrivait-il.

"Et cela d'autant moins que la règle du jeu libéral devrait être un effort systématique et persévérant de décentralisation et de déconcentration. La bataille du cadre de vie se gagne sur le terrain et non dans le kriesgspiel des directions de ministères parisiens. Elle suppose l'engagement des collectivités locales et le développement, avec elles, d'une politique contractuelle sans arrière-pensées."

L'environnement, une prise de conscience pompidolienne

La nomination de Robert Poujade à la tête d'un tel ministère intervient près d'un an après un discours fondateur du chef de l'Etat devant l'alliance française de Chicago. Ce 28 février 1970, Georges Pompidou souligne que "l'emprise de l'homme sur la nature est devenue telle qu'elle comporte le risque de destruction de la nature elle-même".

"Il est frappant de constater qu'au moment où s'accumulent et se diffusent de plus en plus les biens dits de consommation, ce sont les biens élémentaires les plus nécessaires à la vie, comme l'air et l'eau, qui commencent à faire défaut", souligne le locataire de l'Elysée.

"La nature nous apparaît de moins en moins comme la puissance redoutable que l'homme du début de ce siècle s'acharnait encore à maîtriser, mais comme un cadre précieux et fragile qu'il importe de protéger pour que la terre demeure habitable à l'homme."