Le coronavirus est plus dangereux dans les villes polluées

Par Giulietta Gamberini  |   |  589  mots
"Les gouvernements auraient dû s'attaquer à la pollution atmosphérique chronique il y a longtemps, mais ils ont donné la priorité à l'économie plutôt qu'à la santé en faisant preuve d'indulgence avec l'industrie automobile", dénonce EPHA. (Crédits : Gonzalo Fuentes)
La pollution de l'air est à l'origine d'affections aggravant le risque de mortalité, met en garde l'ONG European Public Health Alliance. Elle appelle les pouvoirs publics à intervenir en vue d'autres futures pandémies.

Les habitants des villes polluées sont exposés à un risque accru face au coronavirus. C'est l'alerte lancée lundi 16 mars par la European Public Health Alliance (EPHA), ONG basée à Bruxelles. La pollution de l'air est en effet à l'origine de nombreuses affections considérées comme autant de facteurs aggravants du risque de mortalité en cas de contagion: l'hypertension, le diabète, les maladies respiratoires.

"Les patients souffrant de maladies pulmonaires et cardiaques chroniques provoquées ou aggravées par une exposition à long terme à la pollution atmosphérique sont moins en mesure de lutter contre les infections pulmonaires et plus susceptibles de mourir. C'est probablement aussi le cas pour Covid-19", souligne Sara De Matteis, professeur en médecine du travail et de l'environnement à l'Université de Cagliari (Italie).

Une corrélation déjà établie pour le SRAS

L'ONG cite notamment une étude publiée en 2003 par des chercheurs californiens et chinois sur "la pollution de l'air et la létalité du SRAS en République populaire de Chine": on y constatait déjà que patients contaminés par le SRAS vivant dans des régions avec des niveaux de pollution de l'air modérée avaient 84% plus de chances de mourir que les patients de régions peu polluées.

"En abaissant les niveaux de pollution atmosphérique, nous pouvons aider les plus vulnérables dans leur lutte contre cette pandémie et contre d'éventuelles pandémies futures", souligne donc le docteur De Matteis.

Trop "d'indulgence avec l'industrie automobile"

Face à l'épidémie en cours, le mal est malheureusement fait, regrette le secrétaire général par intérim d'EPHA, Sascha Marschang.

"Les gouvernements auraient dû s'attaquer à la pollution atmosphérique chronique il y a longtemps, mais ils ont donné la priorité à l'économie plutôt qu'à la santé en faisant preuve d'indulgence avec l'industrie automobile", dénonce-t-il.

Fin 2019, 71 procédures d'infraction en matière de qualité de l'air avaient d'ailleurs déjà été engagées contre les Etats membres par l'Union européenne, rappelle EPHA.

Une accalmie en Chine et en Italie

Toutefois, à l'inverse, l'épidémie semble être en train de produire un effet positif sur la pollution. Fin février, des images du satellite européen Sentinel-5 avaient déjà permis de constater une baisse particulièrement longue et significative des émissions de dioxyde d'azote entre le 10 et le 25 février 2020, liée aux mesures contre l'épidémie de coronavirus.

La même accalmie est désormais constatée au Nord de l'Italie depuis l'adoption des mesures de confinement.

"Retirer les véhicules sales de nos routes"

Cette baisse ne risquant toutefois d'être que contingente, EHPA encourage toutefois les autorités publiques à tirer par la suite les leçons de l'épidémie.

"Une fois cette crise terminée, les décideurs devraient accélérer les mesures pour retirer les véhicules sales de nos routes. La science nous dit que des épidémies comme Covid-19 se produiront avec une fréquence croissante. Le nettoyage des rues est donc un investissement de base pour un avenir plus sain", recommande Sascha Marschang.