L'éolien français reste dans l'expectative après la Conférence environnementale

Par Dominique Pialot  |   |  881  mots
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Le Syndicat des énergies renouvelables (SER) affiche sa satisfaction face aux orientations données par François Hollande en ouverture de la Conférence environnementale, mais la Fédération de l'énergie éolienne (FEE) attend encore des améliorations dans la feuille de route qui doit être envoyée cette semaine par le Premier ministre.

Après le discours prononcé par le chef de l'Etat en ouverture de la Conférence environnementale, l'heure était plutôt à la satisfaction chez les écologistes. Les professionnels des filières vertes telles que les énergies renouvelables, directement concernés, adhéraient à ce sentiment général tout en espérant des détails lors de l'allocution du Premier ministre à l'issue des tables rondes. Ils en ont été pour leurs frais. Sur le solaire comme sur l'éolien, les annonces concrètes ont été faites au compte-goutte. Jean-Marc Ayrault n'a pas ajouté grand-chose aux annonces faites la veille par François Hollande : lancement de deux appels d'offres d'ici la fin de l'année pour deux sites éoliens offshore et pour de grandes centrales photovoltaïques sur toitures et nécessité affirmée d'un « cadre réglementaire stable, transparent et favorable aux investissements. »

Or les deux filières ont de grandes attentes, car elles sont l'une et l'autre en situation précaire. Surtout l'éolien, qui affiche des chiffres de raccordement très faibles depuis le début de cette année, et se prépare à une troisième année de baisse de régime, très en-deçà du rythme nécessaire pour atteindre les objectifs du Grenelle fixés à 19.000 mégawatts (MW) en 2020 pour les parcs terrestres.

Disparition des zones de développement de l'éolien

A l'issue de la Conférence environnementale des 14 et 15 septembre, la fédération de l'énergie éolienne (FEE) se réjouit de la disparition annoncée des zones de développement éolien (ZDE) qui depuis 2000 déterminent l'accès au tarif de rachat et du maintien du principe des tarifs de rachat. D'autant plus que cette dernière décision est contraire aux recommandations d'un rapport du CGEIET (Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies) et du CGEDD (Conseil général de l'économie et du développement durable), remis vendredi 14 septembre à la ministre de l'Environnement Delphine Batho. Ce rapport préconisait au contraire la disparition progressive de ces tarifs au profit de la généralisation des appels d'offres.

Quant à la disparition des ZDE, même si le calendrier n'en est pas précisé et si la gestion de la phase de transition reste floue, « cela va faire gagner environ 18 mois par dossier », anticipe Frédéric Lanoë, directeur général France et Belgique de EDP Renovaveis et porte-parole de FEE. Il rappelle à ce propos qu'en France, la durée moyenne de montage d'un projet éolien est de 6 à 8 ans, contre 2 à 3 ans en Allemagne. Aujourd'hui, les ZDE font doublon avec les Schémas régionaux du climat, de l'air et de l'énergie (SRCAE), en cours d'élaboration, qui doivent définir des zones favorables à l'éolien. « Encore faut-il que ces SRCAE soient signés (ce qui était prévu pour le mois de septembre au plus tard) , et correctement définis », précise Frédéric Lanöe. Or ce n'est pas encore le cas. « Le SCRAE de la région Auvergne, par exemple, ne nous convient pas car il ne laisse que 20 % de l'espace accessible aux éoliennes. »

Pas de nouvel arrêté tarifaire en perspective

Par ailleurs, la FEE demandait qu'un nouvel arrêté tarifaire soit notifié à la Commission européenne. En effet, le tarif actuellement en vigueur est « gelé ». Suite au recours d'une association demandant son annulation, en mai dernier le Conseil d'Etat a sursis à statuer et posé une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne relative à la légalité de cet arrêté. Alors que le gouvernement considère que le problème ne se poserait que dans l'hypothèse d'une annulation effective et refuse de notifier auprès de Bruxelles un nouveau tarif (qui serait du même niveau que l'actuel), la profession fait valoir que cette incertitude dissuade les investisseurs. « Cette simple mesure conservatoire permettrait de gagner du temps au cas où il y ait effectivement annulation », plaide Frédéric Lanoë.

Concernant le classement des parcs éoliens en ICPE (installations classées pour l'environnement), qui alourdit et allonge également les procédures, la FEE observe que sans aller jusqu'à une déclassification totale, il serait possible de passer d'un régime à autorisation à un régime déclaratif.

25 % du mix à l'horizon 2030

Enfin, les professionnels regrettent que deux autres sujets n'aient pas été évoqués : la « loi des 5 mâts », qui interdit tout projet inférieur à 5 éoliennes, ou encore la loi « littoral et montagne », dont les exigences (implantation en continu et éloignement des habitations) sont jugées contradictoires par les développeurs. Ces règles constituent selon la FEE des freins importants au développement de l'éolien en France. Ils espèrent encore dans les détails de la feuille de route.
« On a encore du boulot pour expliquer que l'éolien est une énergie compétitive » reconnaît Frédéric Lanoë, qui en situe le coût « entre le nucléaire historique et celui qui sera produit par l'EPR ». « On est prêts à fournir 25 % du mix en 2030 », conclut-il. Ce qui impliquerait 10.000 éoliennes de plus et 20 parcs offshore. Il reste en effet encore un peu de boulot... Les détails de la feuille de route attendue cette semaine le rendront-ils plus simple ?