Elections : d'un dimanche à l'autre...

Par Emmanuelle Duez et Yann Miran  |   |  372  mots
BLOG. L'oeil des Bosons sur les élections régionales et la montée du FN.

Dimanche soir

Dimanche soir, j'allume la télé et je m'étonne
Je m'étonne que le Front National puisse conquérir 6 régions
Je m'étonne que les jeunes aient pu être séduits
Je m'étonne du sens que ce vide semble apporter

Dimanche soir, j'allume la télé et j'observe
J'observe l'échec de la réponse républicaine
J'observe des partis s'inscrire en contre, mais bougrement incapables d'alternatives sensées et audacieuses
J'observe la peur et la lassitude, puissants leviers

Dimanche soir, j'allume la télé et j'entends
J'entends un bruit sourd et profond partout en Europe
J'entends le repli vers les extrêmes
J'entends déferler une vision du monde, simpliste donc cohérente

Dimanche soir j'allume la télé et je comprends
Je comprends que 30 ans de chômage laissent des séquelles
Je comprends la détresse financière
Je comprends que parmi les diplômés un quart ne trouvera pas d'emploi

Dimanche soir j'ouvre les yeux sur le monde et je vois
Je vois que d'autres pays ont fait d'autres paris
Je vois que certains peuples ont eu le courage du progrès et de la réforme
Je réalise que le Canada et son gouvernement multicolore et multi-compétences me fait rêver

Dimanche soir dans un an
Je marche dans les rues de France dans la rue et j'imagine.
J'imagine devoir faire 200 km pour aller au planning familial
J'imagine des certitudes imposées sur la famille, le couple, l'amour
J'imagine le nombre de policiers

Dimanche soir dans un an, je vois
Je vois les conditions de naturalisation se durcir
Je vois la suppression du droit du sol
Je vois la fin du regroupement familial

Dimanche soir dans un an, j'apprends
J'apprends que le système carcéral sera bien plus accueillant
J'apprends que le jeudi, on ne sert que du porc dans les cantines
J'apprends qu'à défaut du reste, l'euro sera franc

Dimanche soir dans un an, j'allume la télé et je note
Je note que 30 ans de chômage laissent toujours des séquelles
Je note une détresse financière qui persiste
Je note que la simplicité séduit, mais qu'elle ne change rien

Dimanche soir, je marche dans un roman d'Orwell, la littérature en moins

Dimanche soir. J'éteins la télé.
Dimanche matin je vote.

Respectons nous.