Florange : Mittal prend le thé à l'Elysée

Par Eric Walther, directeur de la rédaction  |   |  463  mots
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Lakshmi Mittal est donc un habitué de l'Elysée. Le 29 février dernier, il y avait déjà rencontré un Nicolas Sarkozy devenu depuis quelques jours davantage candidat que président. Le débat sur la désindustrialisation de la France battait son plein, impossible donc pour le pouvoir en place de laisser ce dossier pourrir sa campagne: on avait déjà réussi à convaincre PSA de mettre en veilleuse le projet de fermeture d'Aulnay, on n'allait pas se faire humilier par un milliardaire indien. Un accord fumeux permettra le lendemain à Nicolas Sarkozy de claironner un redémarrage des hauts fourneaux pour le second semestre. On sait ce qu'il en a été.
Qu'espérer de la nouvelle visite rendue hier par Mittal au nouveau président? Les plus lucides répondront "rien", les moins pessimistes pas "grand-chose". Certes, François Hollande s'était rendu avant les élections sur le site pour assurer les 2500 salariés de son soutien. Soit. Mais, depuis, il est devenu président, et mesure chaque jour la difficulté à résoudre l'impossible. C'est bien de cela dont il s'agit. Qui peut imaginer sérieusement relancer une production d'acier compétitive en France avec un investissement important à la clef dans une conjoncture aussi déprimée? Qui peut croire que l'on va forcer la main à une multinationale étrangère alors que l'on a cédé -on ne peut pas dire autrement les choses- à un groupe français, PSA?
François Hollande a la réponse. Comme Arnaud Montebourg, son ministre du redressement dépêché hier sur place, qui a clamé qu'une «partie de bras de fer était désormais engagée». Il espère que Mittal va accepter de céder son site. Et après? A qui, pour quoi faire? Le nationaliser comme l'ont demandé les syndicats? Si la direction du groupe sidérurgique annonce lundi prochain qu'il ferme le site, ce qui semble probable, le gouvernement se «tiendra prêt à rechercher un opérateur industriel durable et sérieux». Le problème est que dans ce genre de situation les investissements en appétit le sont rarement, sérieux. On l'a vu dans le dossier Petroplus.
La mort lente de Florange est au moins aussi dramatique que celle d'Aulnay en ce qu'elle signe celle d'une industrie. La valse des hypocrites qui entoure le malade donne un rien la nausée. D'autant que tous les danseurs ont un objectif commun: gagner du temps. Lakshmi Mittal est peut-être déjà dans son avion et doit se dire en bouclant sa ceinture que, décidément, ces Français sont de drôles d'oiseaux. Il oubliera vite. François Hollande devra malheureusement bientôt ajouter une nouvelle croix à son tableau de l'impuissance. En attendant, les 2500 salariés de Florange attendront.